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Ouvrages remarquables des écoles normales
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Title
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La croissance pendant l'âge scolaire : applications éducatives
Subject
The topic of the resource
Enfants
Croissance
Description
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16 planches hors texte
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godin, Paul (1857-19..)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Delachaux et Niestlé SA éditeurs
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1913
Date Available
Date (often a range) that the resource became or will become available.
2013-03-11
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
http://www.sudoc.fr/063386003
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
1 vol. au format PDF (337 p.)
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Text
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
MAG D 37 987
Provenance
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Ecole normale de Douai
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Université d'Artois
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LA CROISSANCE PENDANT L'AGE SCOLAIRE
�OUVRAGES DU DR PAUL GODIN
SUR LA CROISSANCE (AUXANOLOGIE) Essai sur l'éducation "physique dans la Famille et au Collège. — Thèse pour le Doctorat en Médecine (Faculté de Paris, octobre 1881) et Académie des Sciences morales et politiques. Asymétries normales des organes binaires chez l'homme. Ie note. Académie des Sciences, 19 février 1900. 2e note. Académie des Sciences, 3 octobre 1910. Note sur la taille minima que doivent présenter les enfants de 13 ans destinés à s'engager à 18 ans (Archives de Médecine et de Pharmacie militaires. Août 1900). Mémoire couronné par l'Académie de Médecine, 1912. Du rôle de VAnthropométrie en éducation physique. Ouvrage couronné par l'Académie de Médecine (1912). Paris, Maloine, édit. Hygiène et Education. Conférences publiques récompensées par l'Académie de Médecine (médaille de bronze de l'Hygiène de l'enfance (1901). Recherches anthropométriques sur la Croissance des diverses parties du corps. Ouvrage couronné par la Société d'anthropologie de Paris (1902) et par l'Académie de Médecine (1903). 224 p. Paris. Maloine, édit. Un diagnostic morphologique au moyen de l'Anthropométrie à l'Hôpital de Montpellier. Académie de Médecine, séance du 2 oct. 1906. De la puberté à la nubilité. Société d'Anthropologie, 7 juil. 1909. Alternances des Accroissements (semestriels) au cours du développement du corps humain ( dans le sexe masculin) mitre 13 et 18 ans. Société de Biologie, séance du 25 juin 1910. Etude couronnée par l'Académie de Médecine (1912). Les Proportions du Corps pendant la Croissance, 6 figures et 9 tableaux. Ouvrage couronné par l'Académie de Médecine (1912). Paris. Maloine, édit. Variations des Proportions de longueur et de largeur du Corps dans le sexe masculin au cours de l'Ontogénie post-fœtale. Académie des Sciences, séance du 19 juin 1911. Etude couronnée par l'Académie de Médecine (Prix Larrey, 1912). Essai d'explication du rôle de la puberté chez l'homme. Soc. d'Anthropologie, 19 octobre 1911. Les Droits de l'Enfant, in-8°. 279 pages. Ouvrage honoré d'une souscription du Ministère de l'Instruction publique. Paris. Maloine, édit., 1912. Le Médecin, l'Enfant et la famille. Croissance et Education, in-8°. 200 pages. Clé de la « Formule individuelle » de croissance pour le médecin. Paris. Maloine, éditeur. (Sous presse).
Imp. Delachaux & Niestlé S. A., Neuchâtel — 1913
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ÉCOLE NORMALE D'INSTITUTRICES
DE DOUAI
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D'ACTUALITÉS PÉDAGOGIQUES
PUBLIÉE SOUS LES AUSPICES DE L'iNSTITUT J.-J. ROUSSEAU
Dr PAUL GODIN
Lauréat de l'Institut, de l'Académie de Médecine et de la Société d'Anthropologie de Paris. Professeur à l'Ecole des Sciences de l'Education (Institut J.-J. Rousseau) de Genèoe.
LA CROISSANCE PENDANT L AGE SCOLAIRE
APPLICATIONS ÉDUCATIVES
NEUCHATEL DELACHAUX & NIEST.LÉ ÉDITEURS
Tous droits de traduction réservés y compris la Suéde et la Norvège.
S.A.
i.U.F.M. Hcrd - Pas d© Ca;&»w
Médiathèque de Douai 161, rue ci'Esquerchin O.P. 827 53508 DOUAI Tél. 03 27 93 51 78
SSÊS
�« ....Ce qui fait l'intérêt, pour l'instituteur, des phénomènes de croissance physique, c'est qu'ils ont une répercussion sur les fonctions psychiques et sur l'énergie du travail mental....» Ed. CLAPARÈDE,
(Psychologie de l'enfant, '/nie édit., p. 155.)
�AVANT-PROPOS
J'ai un plaisir vrai, chers élèves, maîtres vousmêmes et éducateurs, à vous dédier cet ouvrage qui sort tout entier de l'observation continue de l'enfant et qui réunit les leçons que vous avez voulu suivre. L'attention si vivante que vous m'avez accordée me détourne de toute forme autre que celle qui a retenu votre bienveillant intérêt. Vous voulez que l'enfant soit votre maître unique, selon l'épigraphe lumineuse de l'Ecole des Sciences de l'Education, Discat a puero magister ! et vous avez senti que, simplement, j'essayais d'être l'interprète de l'enfant. Car c'est bien lui qui, par sa croissance individuelle, nous ouvre une large fenêtre sur l'intimité de sa vie, et nous donne une merveilleuse leçon de choses, en nous invitant à découvrir Vunité qui préside aux multiples transformations et qui est sa personne même. Si vous savez beaucoup de son individualité physique, vous savez aussi beaucoup de sa fonction céré-
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AVANT-PROPOS
brale qui est faite pour une large part de la condition du cerveau et de ses relations avec le reste du corps. Vous rendiez hommage au pouvoir éclairant de l'étude de la croissance quand, au cours d'une leçon qui nous faisait pénétrer jusqu'au cœur de l'enfant, vous me disiez dans un élan que je ne puis oublier : « Comme vous le connaissez bien ! » Lorsqu'en feuilletant ce livre vous rencontrerez : « Nous voyons, nous déduisons.... », figurez-vous que nous travaillons encore ensemble à l'Institut J.-J. Rousseau. Vous êtes présents à chacune de ces pages.
DR PAUL GODIN. 1
ER
Juin
1913.
�INTRODUCTION
Les pages qui suivent ne sont point un assemblage de documents chiffrés, ces documents ayant été publiés pendant les douze années précédentes. Elles sont une clé de la « Formule individuelle », un manuel opératoire de sa détermination somatique et devraient plutôt être intitulées : « De la Croissance, comme moyen de pénétrer l'individualité physique de l'enfant, de l'écolier. » J'ai fait précéder la pratique de la méthode préconisée par l'exposé des résultats anatomo-physiologiques que je lui dois (conception scientifique de la croissance, connaissance des proportions du corps aux âges successifs du développement, analyse de la puberté envisagée comme effet et comme cause, lois de la croissance individuelle, etc..) et de quelquesunes des principales applications pratiques auxquelles elle m'a conduit. Pour l'éducateur qui entend faire un choix éclairé, il est indispensable de connaître les résultats scienti-
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INTRODUCTION
fiques et les applications pratiques dus aux diverses méthodes et de n'opter pour l'une d'elles qu'après un sérieux examen. Il existe deux grandes méthodes d'étude objective du développement morphologique post-fœtal de l'enfant : la méthode simultanée et la méthode périodique. Celle-là examine simultanément, en quelque sorte, un nombre plus ou moins grand d'enfants de tous âges. Chaque enfant est observé une fois pour toutes. La méthode périodique examine le même enfant périodiquement à travers les phases successives de son développement. La première méthode fournit des moyennes utiles aux comparaisons générales entre les âges, entre les sexes, entre les races ; mais, qu'elle multiplie ou non le nombre des mesures et des notations, l'évolution individuelle du développement n'en demeure pas moins tout entière en dehors d'elle avec tous les phénomènes biologiques qui la caractérisent et que précisément l'éducateur a intérêt à connaître. Comme ici tout dérive de la méthode périodique, on conçoit que les travaux, conduits selon la méthode simultanée n'aient qu'un rôle documentaire limité.
�PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE DE LA CROISSANCE
��PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE DE LA CROISSANCE
CHAPITRE I
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MOTIFS POUR LESQUELS LA CROISSANCE A SA PLACE PARMI LES MATIÈRES ENSEIGNÉES DANS UNE ÉCOLE DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION. L'âge scolaire est avant tout un âge de croissance. — La croissance a une double influence sur la fonction cérébrale. — Enseignement nouveau; sur quoi il s'appuie. — Aperçu des données que peut fournir l'étude de la croissance. — Son aboutissant est la détermination de l'individualité somatique de l'enfant.
L'âge scolaire, suivant les études poursuivies, suivant la carrière visée, peut s'arrêter à la veille de la puberté, ou se prolonger au delà. On peut le prendre à partir de l'admission au collège, ou dès l'entrée dans la classe des tout petits, à l'Ecole Maternelle. L'âge scolaire est avant tout un âge de croissance. — L'âge scolaire s'étend réellement à la plus grande partie de la période de développement que l'enfant ait à parcourir pour devenir un adulte. Scolarité et croissance marchent parallèlement, et pour bien comprendre cette dernière, il y a inté-
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
rêt à la suivre à partir de la naissance. (Pl. II, IV, IX et XVI). Il est bien difficile d'admettre que la scolarité, qui met l'enfant dans des conditions artificielles si singulières, n'ait pas une influence sur l'évolution de la croissance. Il appartient à l'éducateur de faire que cette influence soit aussi peu néfaste que possible. Son premier soin sera de connaître la croissance pour en comprendre les besoins et travailler sans relâche à ce que la scolarité soit compatible avec un développement normal de l'enfant astreint aux gênes qu'elle comporte. La croissance a une double influence sur la fonction cérébrale. — L'âge scolaire est celui de la culture cérébrale. Le cerveau n'est point un organe isolé, il fait partie de l'organisme dont il est un morceau, dont il reçoit la nutrition; il ne peut se dissocier du reste du corps à aucun moment de l'existence; il lui faut en partager les conditions de vie avantageuses et désavantageuses. Le cerveau est effectivement sous la dépendance végétative de l'organisme, bien que relativement indépendant. Dans son fonctionnement spécial, psychique, il reçoit les informations des sens, du toucher comme de la vue. L'état de ces sens influe sur leur acuité, sur la précision des renseignements qu'ils fournissent, et c'est d'après eux que le cerveau apprécie le milieu, l'entourage, juge de l'opportunité d'agir, effectue la première partie de son fonctionnement.
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Les sens sont le corps lui-même, dont ils reflètent les alternatives de bien-être et de malaise, d'euphorie ou de souffrance, alternatives qui retentissent sur leur fonctionnement d'une façon inévitable. La première partie de l'opération psycho-motrice (Manouvrier) qui est le propre du cerveau, dépendra de l'état même du soma (c'est-à-dire de tout ce qui, dans l'organisme, n'est pas le cerveau). La seconde partie de l'opération cérébrale emprunte les instruments dont elle a besoin, à l'appareil locomoteur, dont l'état participe à celui du reste du soma. Comment pourrait-on se représenter une vie cérébrale, une fonction psycho-motrice se réalisant sans le corps 1 Parmi les causes capables d'influer sur les dispositions de l'organisme, la croissance figure au premier rang pendant toute la période d'élaboration de l'adulte. La croissance doit s'entendre de toutes les modifications qui concernent les dimensions des diverses parties du corps. Elle provoque de continuels changements dans les conditions intérieures de fonctionnement organique, ce qui, pour les raisons données tout à l'heure, ne peut manquer d'intéresser indirectement le cerveau. Mais le cerveau lui-même est soumis à la croissance, et de ce chef il subit des modifications qui suffiraient à influencer son activité fonctionnelle.
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
Le cerveau est donc doublement tributaire de la croissance, et c'est une nécessité pour qui, comme l'éducateur, étudie son fonctionnement, pour qui surtout veut tenter d'en prendre la direction, de connaître très bien le processus de la croissance. Enseignement nouveau ; sur quoi il s'appuie. — Ce processus est complexe, il embrasse toute une évolution, il fait assister à des apparitions d'organes, à des transformations, à des variations dans les dimensions des diverses parties du corps et dans leurs rapports réciproques; il découvre à l'observateur méthodique le mécanisme de plusieurs phénomènes de vie avec leur caractère d'individualité. La croissance mérite toute une étude qui comporte son analyse entre deux synthèses. Comme nous voilà loin des trois mesures, taille, périmètre et poids, pris pour expression de la croissance et auxquelles convient tout juste la dénomination de mesure métrique de la longueur du corps, de mesure métrique de la grosseur du thorax, à tel niveau, et de mesure pondérale de la masse du corps. Ce sont trois des cent vingt-neuf mesures que comprend l'observation métrique de la croissance humaine, trois mesures qui représentent les deux centièmes du seul travail de mensuration, auquel s'ajoutent l'observation physiologique et l'observation clinique, constituées par quarante-six notations environ. Les résultats que je vous expose dans ces entre-
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tiens s'appuient sur deux mille observations, sur trois cent mille mensurations, et je n'hésite pas cependant à vous demander de les vérifier, de les contrôler aussi souvent que vous le pourrez, dès que vous serez en possession des procédés d'investigation qui font l'objet d'un chapitre spécial, mais qui ne cessent de soutenir nos leçons par les conférences pratiques qui les doublent. Car il ne s'agit pas pour vous d'acquérir de vagues notions théoriques. Il vous faut être en mesure de reprendre l'observation pour votre propre compte avec toute la rigueur que comporte la méthode scientifique, le départ une fois fait entre les obligations sans nombre de la recherche de laboratoire et le manuel opératoire réduit à l'utile de l'observation courante. Cette réduction de la technique n'est motivée et valable qu'autant qu'elle a été précédée par l'investigation patiente et complète, et qu'elle en a reçu le cadre indispensable de notions et d'idées générales sans lesquelles il n'y a pas de science. Vous avez donc besoin de connaître tout d'abord des résultats et des lois, et d'en saisir les applications. Mais cela ne se rencontre jusqu'ici dans aucune étude de la croissance. Je vais m'efîorcer de vous présenter les résultats, les lois et les applications que vingt années de recherche m'ont fait rencontrer. Votre direction éducative et votre enseignement tireront un bénéfice considérable de ces notions de
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
croissance, parce qu'elles vous conduiront à la découverte de l'individualité physique de vos pupilles. Par là vous vous trouverez amenés à connaître le terrain de la mentalité de chacun, vous pourrez approprier à la personne de chaque enfant vos soins d'éducateur et de maître. Vous réaliserez le progrès le plus désirable en éducation. Or c'est la première fois qu'est enseignée la croissance; tout le mérite en revient aux hardis novateurs qui ont créé l'Ecole des Sciences de l'Education, l'Institut J.-J. Rousseau, et je les prie de recevoir l'expression de ma très vive reconnaissance.
La période de croissance représente une longue phase de l'évolution du corps humain, de sa vie, le tiers environ. Elle répond au moment des transformations partielles et globales, profondes et superficielles, cachées et apparentes, du corps entier et de chacune de ses parties. La croissance entretient une ébullition continue de l'organisme qui met ainsi sous les yeux de l'observateur privilégié de cette phase biologique les plus intimes de ses phénomènes. La croissance est « la transformation continue que
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subit un corps d'enfant dans son ensemble et dans chacune de ses parties pour devenir adulte ». Le terme croissance est l'expression synthétique de toutes les manifestations du développement1. De quelles innombrables et précieuses notions se privent ceux qui limitent la croissance à l'augmentation de la taille et du poids avec ou sans l'addition du périmètre thoracique. Hélas ! les phénomènes biologiques simplifiés par notre hâte à les scruter, restent souvent en dehors de notre observation. C'est le cas ici. Le programme de l'observation de la croissance est tracé par la nature même des phénomènes, et le manuel opératoire, par les sièges systématiques que la constitution assigne aux phénomènes de croissance. Nul ne peut s'y soustraire, à moins de déclarer que l'objet de son étude est tel ou tel point particulier du développement et non pas la croissance. Encore faudrait-il établir que les éléments ainsi isolés de cette synthèse transformatrice conservent un sens, et sont susceptibles d'une interprétation juste et utilisable. Nous verrons plus loin comment l'eunuque peut se trouver d'après les trois mesures, taille, périmètre et poids, classé parmi les meilleures recrues ! cet exemple est à retenir et se passe de commentaires. Dans aucun cas l'observation de l'individu telle
1 Académie des Sciences, ma communication du 13 novembre 1911.
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
que je la propose, telle que je l'ai proposée dans mes divers rapports (1893-1905) pour la visite d'incorporation du soldat français, ne-laisserait place à semblable confusion. Ce n'est pas non plus la croissance, mais l'anthropologie avec ses vues générales et quelques-unes de ses vues spéciales que les auteurs se sont efforcés de donner pour assise à l'éducation. Si la croissance emprunte divers procédés à l'anthropologie, elle prend aussi différentes méthodes à la statistique, et elle est encore une étude anatomique, physiologique et clinique. C'est pour n'avoir pas tenu compte de cela, que les tentatives d'anthropologie éducative et pédagogique, malgré la valeur et le talent des auteurs, n'ont pas abouti et que rien de nouveau et de pratiquement utile n'a été apporté de ce côté tant à la pédagogie qu'à l'éducation. Au contraire, quel vaste champ d'observations utiles et fécondes s'étend devant l'éducateur qui se livre à l'investigation scientifique de la croissance. Quelles précisions les multiples aspects du développement lui suggèrent à l'égard de l'individualité de l'enfant ! Aperçu des données que peut fournir l'étude de la croissance. Son aboutissant est la détermination de l'individualité somatique de l'enfant. — Le maître, cela est certain, est en possession de la substance de son enseignement. Il est instruit des meilleures manières de le présenter; il connaît suffisamment le milieu
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dans lequel il est appelé à professer. Mais connaît-il chacune des petites plantes qu'il va cultiver ? sait-il de quelles sortes elles sont ? si elles appartiennent à des espèces différentes et quelles sont ces espèces? Sait-il surtout quelle culture convient à chacune d'elles, exposition, milieu, engrais, terrain, etc. Ce sont des préoccupations qui ont constamment la première place dans l'esprit du jardinier; le maître en a-t-il souci ? Les parents, avant le maître, y ont-ils songé ? Et cependant nous voyons l'élevage du bétail, l'élevage du cheval ne réussir qu'au prix d'une étude approfondie de la race et de la nature individuelle de chacun de ses spécimens. Ne savons-nous pas que le dresseur de chevaux, qu'il soit l'écuyer d'école d'équitation, l'éducateur du cheval savant, du cheval de cirque, qu'il ait le talent de Hachet Souplet ou la patience des propriétaires du Kluge Hans à Berlin puis à Elberfeld, voire l'empirique sagacité d'un dompteur comme Bidel ou Pezon, ne savons-nous pas que cet éducateur d'animaux commence toujours par étudier la personne de son élève, et n'adopte les procédés d'« enseignement » et d'« éducation » qu'il emploiera qu'après les avoir appropriés à son individualité ? L'éducateur d'enfants acquerra plus facilement et plus sûrement cette science de l'enfant, cette connaissance indispensable de chacun de ses pupilles s'il est mis à même de commencer par constituer une formule
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I
ANALYSE DE LA CROISSANCE
« individuelle », sorte de synthèse abrégée de l'individualité somatique. En étudiant les variations continuelles dont l'organisme est le siège pendant le développement de l'enfant, l'éducateur expérimenté parviendra à discerner ce qu'il y a de stable et de constant dans la personne de son élève. Le philosophe, M. P. Bovet, ne nous a-t-il pas dit: «....une question d'éducation est à la fois un problème de biologie, de psychologie et de sociologie1 ». D'une façon générale, l'étude de la croissance est celle du terrain mouvant de la pédagogie individuelle. Elle apporte au maître les lois suivant lesquelles se produisent les « changements », et lui révèle les rapports dans lesquels se trouvent entre eux, aux différents moments de l'évolution, le soma, le cerveau et le germen, ces trois facteurs de la personnalité. L'énumération suivante donne un aperçu des renseignements et informations qui ressortent pour l'éducateur de l'étude du développement de chacun de ses pupilles, et dont nous envisagerons seulement les principaux dans ces leçons : Renseignements sur l'état d'équilibre interorganique. Avertissement du déséquilibre que n'accompagne pas un trouble de la santé.
1 Conférence faite à l'Assemblée générale de la Société des Arts, le 14 mars 1912, sur la création à Genève d'une Ecole des Sciences de l'Education, par M. Pierre Bovet, professeur de philosophie à l'Université de Neuchâtel.
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Renseignements sur la cause d'un trouble psychique, que l'éducateur ne savait à quoi attribuer. Informations sur la phase de développement atteinte par chacun des principaux facteurs du terrain psychique. Indication du «moment éducatif» de chacun d'eux, c'est-à-dire de la période la plus libre pour l'organe, la plus favorable par conséquent à son éducation. Avertissements relatifs à la proximité des âges d'évolution. Détermination de l'âge pubertaire, c'est-à-dire de la distance qui sépare encore un enfant de l'éclosion de sa puberté. Indications sur les points que doit viser le soin de la préparation des âges d'évolution et sur le moment opportun de cette préparation. Renseignements sur la cause fonctionnelle d'une asymétrie, d'un trouble d'équilibre, d'une déviation. Documentation précise de l'éducateur en vue de l'appropriation somatique individuelle des procédés de l'éducation et de la pédagogie. Données permettant le contrôle des résultats d'un régime, d'une méthode éducative, pédagogique, d'un procédé de culture physique. Données sur la durée des périodes de repos nécessaires à la récupération de l'énergie (alternances.) Indication de 1' « étoffe » dont dispose l'enfant. Indication du point, organe, segment, fonction où doit porter la culture spéciale, intensive, qu'il s'agisse
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
de spécialiser le travail, ou de corriger une mauvaise direction, ou de remédier à une insuffisance. Signalement des effets de la transgression des phases de repos (alternances), par suite de croissance trop rapide ; par suite d'infection ou de traumatisme ; par suite de suractivité cérébrale. Avertissement d'avoir à allonger les périodes de repos dont dispose l'éducateur. Notion précise de la distance souvent éloignée à laquelle se manifestent les effets d'une cause constatée, car la plupart des « insuffisances » qui s'observent chez les jeunes gens des deux sexes entre 15 et 20 ans, ne sont que des effets à distance de la mauvaise préparation de la puberté, etc.... Gardons-nous de tomber dans l'erreur si fréquente des biologistes et des médecins, que stigmatise M. Bergson, ne traitons en aucun cas « le vivant comme l'inerte». Entendons ce cri du grand poète, le seul qui, depuis Jean-Jacques Rousseau, ait compris l'enfance. « On ne sait pas, on n'a pas l'air de savoir que l'enfance fait partie de la vie. » (Jean Aicard, de l'Académie française, L'âme d'un enfant). La croissance, précisément, nous préserve de cette faute; cause créatrice d'incessantes transformations, de changements continuels, elle ne laisse à aucun moment le biologiste, le médecin ou l'éducateur perdre la notion de mutation, le sentiment de la vie chez l'être qui fait l'objet de son observation.
�CHAPITRE II
MÉTHODE D'ÉTUDE DE LA CROISSANCE OU MÉTHODE AUXANOLOGIQUE
Méthodes à ne pas suivre. — Absence de valeur des mesures isolées. — La mensuration de la taille devient utile dès qu'elle est encadrée. — Rythme de l'allongement du corps. — Qu'estce que l'adolescence î — Le grand allongement post-fœtal du corps par les membres inférieurs a lieu entre la naissance et l'âge de 7 ans, et non pas aux environs de la puberté. —■ La méthode à suivre est celle que dictent la nature des phénomènes et l'objectif utilitaire des résultats de l'observation.
Méthodes à ne pas suivre. — La transformation continue qu'entraîne la croissance dans les corps d'enfants ne peut être étudiée comme le serait un état stable. L'observation a besoin d'en être souvent renouvelée de façon à constater les changements survenus. Cela implique déjà une périodicité de l'examen des enfants qui est loin d'avoir été comprise par tous les auteurs. Les multiples examens nécessaires ont été réduits à un seul, une fois fait. Les réductions ont été opérées sur les mesures, réductions telles que des mesures relativement peu
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
nombreuses prises par Quételet, il n'est parfois resté que la mensuration de la stature. Le fait de considérer la taille comme la seule mesure de longueur utile a des conséquences très graves, et que la simple lecture des résultats fournis par la mise en œuvre des mensurations en nombre suffisant fait parfaitement comprendre. La taille est en effet la somme des hauteurs des membres inférieurs, du tronc, du cou et du crâne. Chacune de ces parties a, fonctionnellement, un rôle différent de celui des autres ; chacun de ces « segments » participe à l'allongement total pour une part qui lui est propre et qui est différente de celle du segment situé au-dessus comme de celle du segment situé au-dessous. Nous verrons même qu'une loi régit ces différences. Cette croissance segmentaire a des corrélations qui sont plus ou moins changées dès que le dit segment croît moins ou croît davantage. Les rapports qui expriment un certain nombre de corrélations changent avec elles; les interprétations relatives aux conditions de la vie dans l'organisme de l'enfant observé sont profondément différentes et conduisent à des déductions tout autres en hygiène préventive et en éducation comme en pédagogie. Absence de valeur des mesures isolées.— Reconnaissons que toute mesure isolée ne vaut rien ; car, même globale, la croissance a encore à envisager toutes les dimensions du solide humain Pl. III; et fatalement
�MÉTHODE AUXANOLOGIQUE^
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erronées, en matière de développement'^ chï corps de l'homme, sont les interprétations d'une "mesure qui ne représente qu'une seule de ces dimensions. '- -J/-\ La mesure de la taille nous apprend qu'une personne est grande ou petite. Ce n'est pas assez. Le poids ne nous renseigne pas beaucoup plus, s'il n'a pour compléter son chiffre que celui de la taille. Car son évaluation est aussi bien majorée par la présence de la graisse, que par la densité du tissu musculaire ou celle du tissu osseux. On m'amène un jour deux enfants, un garçon de 14 ans et sa sœur âgée de onze ans. La mère était très inquiète de leur « amaigrissement », l'un avait perdu deux kilos et l'autre un kilo et demi en dix jours. C'était en effet considérable, car si les enfants de cet âge ne gagnent pas en poids chaque jour comme les bébés au sein, ils doivent cependant augmenter d'une quantité assez régulière et appréciable mensuellement. Mais ces dix jours avaient été employés à courir avec une colonie de vacances et l'effet réducteur se manifestait chez les deux enfants dans des proportions équivalentes. Je fis mettre ces jeunes amaigris au repos complet avec une alimentation de nature à flatter leurs goûts, deux promenades d'une courte durée chaque jour, sans course, sans jeu, et, ma prescription faite, j'annonçai à la mère que dix jours suffiraient à reprendre les kilos perdus. La fillette regagna son kilo et demi et quelques
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
centaines de grammes en plus. Le garçon n'atteignit pas tout à fait ses deux kilos perdus, mais il s'en fallut de très peu. Et bien vite on les rendit à leur activité habituelle. Rien de profond, rien d'organique n'avait été atteint chez ces deux enfants. Le changement de régime et d'habitude, la vie « haletante » que mènent ces petites troupes pour ne pas manquer un train, pour avoir le temps de visiter ceci ou cela, imposent une certaine suractivité à leur économie. A l'alimentation que le régime de voyage, les conversations avec les camarades ou la hâte réduisent souvent un peu trop, les petits excursionnistes se trouvent obligés d'ajouter leurs réserves, constituées justement par le tissu adipeux interstitiel. Il y a relativement peu de graisse interstitielle à cet âge, et vous voyez cependant quelles variations du poids sa seule diminution peut entraîner. Les oscillations du poids que l'on est hebdomadairement ou mensuellement appelé à constater chez de petits enfants bien portants et même chez des jeunes gens, sont le plus souvent attribuables à la graisse alternativement reprise et reconstituée par l'économie qui équilibre ainsi sa nutrition. Aussi faudrait-il pour interpréter de façon juste la pesée, connaître le rapport entre l'adiposité et la masse du corps à travers les variations du poids. C'est ce que paraît avoir cherché Mailing Hansen, qui pesait plusieurs fois par jour chacun des petits
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sourds-muets de son institut. Mais en raison des conditions spéciales de la vie de ces pauvres enfants' les résultats ne sauraient être applicables à la généralité. En sorte que, dans l'interprétation de la valeur du poids chez l'enfant au cours de sa croissance, il arrive que l'on prenne pour une valeur active ce qui n'est qu'un obstacle ou tout au plus une réserve. La mensuration de la taille devient utile dès qu'elle est encadrée. — Appuyé sur d'autres mesures en nombre suffisant, le poids devient une indicaition des plus importantes. Isolées, aussi bien la taille que le poids, ces deux mesures n'ont aucune signification utilement interprétable par l'éducateur. Peut-être la mesure isolée de la taille expose-t-elle à des erreurs d'interprétation plus notoires que la pesée, si l'on en juge d'après les contradictions offertes par les résultats des divers auteurs. De là ressort le peu de stabilité des jugements basés sur la mesure de la taille; à moins que cette mesure n'ait été relevée sur le même enfant à des époques déterminées, la suivante contrôlant ainsi la précédente, comme l'ont fait Buffon, Quételet, Carlier, Mailing Hansen. Ces auteurs ont, de la sorte, encadré cette mesure dans le processus de croissance individuel et lui ont fait ainsi exprimer une évolution réelle bien que trop compréhensive pour avoir un sens clair.
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Rythme de l'allongement du corps. — Au milieu de mensurations analytiques, la mesure de la taille acquiert la portée d'une évaluation synthétique, et il en faut connaître le rythme (Pl. IV). La courbe schématique ci-dessus montre qu'une taille de 50 centimètres à la naissance, double vers l'âge de 5 ans, époque à laquelle elle atteint 1 mètre, et triple quand l'enfant approche de ses 15 ans. Tandis qu'il a fallu 5 années seulement chez le petit enfant pour augmenter sa taille de cinquante centimètres à partir du moment de sa naissance, un égal allongement demande ensuite dix années, de l'âge de 5 ans à l'âge de 15 ans, pour se réaliser. Avant sa naissance, au contraire, neuf mois avaient suffi pour donner au corps du fœtus le premier demimètre. D'après le graphique de la Pl. IV, au delà de 15 ans, au lendemain de sa puberté par conséquent, l'enfant allonge d'une quantité relativement insignifiante, à savoir de quinze centimètres en cinq ans, soit trois centimètres par an, tandis que chaque année entre cinq ans et quinze ans avait apporté à la taille une augmentation moyenne de cinq centimètres. Bien autrement active avait été cette augmentation de la longueur de la taille à partir de la naissance jusqu'à l'âge de cinq ans, période [pendant laquelle chaque année avait ajouté dix centimètres à l'acquis antérieur. Avant la naissance, l'allongement intra-utérin est
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incomparablement plus rapide encore. Mensuellement l'embryo-fcetus allonge de plus de cinq centimètres; c'est-à-dire qu'un mois de la vie intra-utérine suffira à faire gagner à la taille autant que six mois de la vie extra-utérine. Qu'est-ce que l'adolescence?— A quelle période de la vie de l'enfant convient donc le terme d'adolescence ? Si nous entendions donner au mot «adolescence» son sens originel, à savoir période de croissance, d'« adolescere », croître, et que nous ne nous en rapportions qu'à l'allongement de la taille pour déterminer le moment de cette période, nous devrions logiquement désigner sous le vocable « adolescence » l'étendue tout entière de la vie de l'enfant sans en exclure la période de la naissance à cinq ans, et moins encore la phase embryo-fœtale ou intra-utérine. L'usage est, dans l'espèce, en contradiction flagrante avec la logique, et le mieux serait peut-être de supprimer un mot aussi complètement dévié de son sens réel. Mais il est admis que le terme adolescence s'applique à la dernière phase de l'enfance, à la phase péripubertaire, et qu'il consacre spécialement la dernière poussée un peu importante d'allongement du corps par les membres inférieurs. (Pl. III). J'ai employé dans ce sens le mot adolescent en décrivant « l'Adolescent type aux différents âges pubertaires ». Il répond à prépubère et pubère; peut-être pourraiton utiliser pour ses limites les limites mêmes de la
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puberté : l'enfant deviendrait adolescent quand apparaîtraient les premiers poils au pubis ; P \ et cesserait de l'être avec P5, en devenant «jeune homme» (v. Phases de la vie, p. 115). Quant à la taille, envisagée au point de vue de la méthode à employer dans l'étude de la croissance, eût-elle été suivie avec soin de semestre en semestre, ou même de mois en mois, qu'elle ne pourrait nous instruire sur les conditions de son propre allongement, qu'elle ne pourrait nous renseigner sur l'avantage ou le désavantage que son accroissement confère à l'organisme, parce qu'elle est dans l'impossibilité de nous faire savoir si les segments qui ont allongé sont des parties vitales ou des parties accessoires, si l'allongement a porté sur le buste ou sur le membre inférieur. Dès que les mensurations sont judicieusement multipliées, dès que l'accroissement de chacun des principaux segments peut ressortir de l'étude anthropométrique, on trouve des explications du rythme de l'accroissement de la taille. On reconnaît, ainsi que le montre le graphique de la Pl. III, que la contribution du tronc est bien supérieure à celle des membres pelviens pendant deux périodes : avant la naissance, puis après la puberté; tandis que les membres inférieurs ne prennent au cours de ces deux périodes qu'une part relativement faible à l'accroissement de la stature. Le grand allongement post-fceial du tronc a lieu entre la naissance et l'âge de 7 ans. — En revanche, entre
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la naissance et l'âge de 7 ans, l'accroissement des membres inférieurs présente la plus grande activité, elle double leur longueur entre la naissance et l'âge de quatre ans, et il lui suffit de trois autres années pour la tripler. Si, dans l'observation superficielle des enfants de notre entourage, nous ne remarquons en fait d'accroissement important par les «jambes», que celui qui précède la puberté, c'est que l'enfant offre alors une taille qui se rapproche de la nôtre et que notre propre taille nous sert de terme de comparaison pour apprécier les progrès de celle de l'enfant. En réalité, la grande poussée d'allongement par les membres inférieurs a lieu très exactement entre la naissance et l'âge de 7 ans, et cela d'une façon continue chez l'enfant qui présente une constitution régulière. De la naissance à 2 ans environ, l'accroissement saisit mieux l'entourage parce que l'enfant descend des bras de sa nourrice qui le portaient, sur ses deux jambes avec lesquelles il court maintenant. Mais de deux ans à huit ou dix ans, il n'y a pas de point de repère sauf pour celui ou celle qui confectionne les culottes, dont, au mépris des besoins de nature et des avis d'Herbert Spencer, on affuble le bébé dès qu'il quitte son berceau. La méthode à suivre est celle que dictent la nature des phénomènes et l'objectif utilitaire des résultats de l'observation. — On aperçoit déjà par cet exemple la
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
nature des enseignements fournis par la véritable observation anthropométrique de l'enfant. On comprend que la croissance est autre chose qu'un grandissement linéaire; on pressent que chacune des multiples parties dont se compose le corps s'accroît pour son compte, à côté de l'accroissement qu'elle réalise dans le sens le plus avantageux pour l'économie entière, et on conçoit l'intérêt qu'il y a, pour l'éducateur comme pour le médecin, à connaître les variations et les lois de ce développement partiel. On est prêt à entendre mieux l'acception réelle du terme « croissance », « transformation continue que subit un corps d'enfant dans son ensemble et dans chacune de ses parties pour devenir adulte », qui donne à son étude un cadre à la fois précis, vaste et, ce qui nous importe surtout en ce moment, trace nettement la méthode à suivre que nous pouvons formuler ainsi : Méthode individuelle périodique et polymétrique, si l'on peut exprimer par ce terme la multiplicité des mesures. Autrement dit : examen semestriel des mêmes enfants dès qu'ils sont à la portée de l'éducateur et aussi longtemps qu'il aura leur direction; examen anthropométrique par un nombre de mesures suffisantes de façon que chacune trouve dans les autres le complément et le point d'appui dont elle a besoin pour contribuer à exprimer la condition anatomique d'une fonction; examen physiologique et psychique; la partie clinique ne comportant que l'inscription
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des résultats de la visite opérée suivant la même méthode par le médecin. C'est à cette méthode combinée de l'éducateur et du médecin, méthode auxanologique, rigoureusement employée pendant de longues années que sont dus les résultats qui suivent, avec leur caractère utilitaire.
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��CHAPITRE III
PROPORTIONS MÉTRIQUES DU CORPS DE L'ENFANT DE LA NAISSANCE A L'AGE ADULTE
Les proportions du corps humain et les artistes de l'Egypte, de la Grèce, de Rome, du moyen âge; les contemporains. — Canon anthropométrique de l'enfant aux divers âges. — Influence de la croissance sur les variations des proportions du corps. — Proportions partielles. — Importance des corrélations fonctionnelles.
Les proportions du corps humain et les artistes de l'Egypte, de la Grèce, de Rome, du moyen âge; les contemporains. —Dans l'étude des proportions de l'adulte, les artistes de tous les temps ont pris pour commune mesure un segment du corps; la stature avait dixneuf fois la longueur du médius, dans le canon égyptien, qui fut probablement aussi le canon grec (Broca le pensait), bien que Polyclète, contemporain de Phidias, ne l'indique pas dans son traité de la symétrie, écrit quatre siècles et demi avant J.-C. Avec Vitruve, les Romains trouvaient huit têtes dans la hauteur du corps. Jean Cousin, puis les anatomistes depuis Andry et plus tard Gerdy jusqu'à Paul Richer, l'éminent professeur de l'Ecole des
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Beaux-Arts, grand artiste lui-même, ont suivi eur exemple. Cependant, avec le commencement du quinzième siècle apparaît le premier essai d'emploi d'une mesure commune prise en dehors du corps humain. L. B. Alberti, dans son ouvrage Délia Architeciura recommande cinquante-deux mesures qui concernent les trois dimensions du corps, sa hauteur, sa largeur et son épaisseur. Alberti a recours à une sorte de système décimal qui a pour base une longueur conventionnelle. « C'est en somme, dit Topinard, un essai d'anthropométrie rationnelle et une tentative très remarquable pour le temps. » Quarante ans plus tard, Léonard de Vinci veut qu'on étudie spécialement les proportions du corps de V enfant. Il semble bien que ce colossal artiste soit le premier qui ait compris que le corps de l'enfant n'était pas seulement une réduction de celui de l'homme; qu'il avait des proportions très différentes et présentait à ce titre une anatomie artistique spéciale. Albert Durer essaya de réaliser le conseil de son contemporain et il établit les proportions suivant les âges et le sexe, mais malheureusement en abandonnant la commune mesure proposée par Alberti. Albert Durer revint en effet à la mensuration du corps par la mesure de la hauteur de la tête et appliqua à l'enfant le canon romain, le canon de Vitruve
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Pour trouver l'application du mètre 1 à l'évaluation des proportions du corps humain adulte, il faut en arriver aux magistrales études anthropométriques de Manouvrier. Son élève Papillault a suivi sa méthode dans son importante étude de l'homme moyen à Paris et a donné, d'après le cadavre, une grande précision aux rapports entre elles des différentes parties du corps chez l'adulte des deux sexes. Canon anthropométrique de Venfant aux divers âges. — Quant à l'enfant, aux divers âges de son développement, j'ai pu établir les proportions de son corps, en rapportant à la taille chacune des dimensions de longueur et de largeur des différents segments (Pl. V), et représenter ces proportions en millièmes de la taille ramenée à mille millimètres, à cent centimètres, c'est-à-dire au mètre 2. Il est à espérer que les figures démonstratives qui ont été construites d'après les données millimétriques, contribueront à faire substituer le mètre aux mesures conventionnelles. La planche de Stratz, que l'on trouve reproduite dans divers ouvrages, par suite de l'emploi de la hauteur de la tête comme commune mesure, s'écarte en effet notablement de la réalité. jJ'ai indiqué à la page 25
1 Admis comme base de mesure en France dès le 7 avril 1795 (18 germinal. An III) et rendu légal le 2 novembre 1801. 2 Les Proportions du corps pendant la croissance, 6 fig. et 9 tableaux 1910, ouvrage couronné par l'Académie de Médecine. Prix Larrey, 1912. Paris, A. Maloine, éditeur.
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de mon étude des proportions quelques-unes des erreurs de Stratz et leur rectification au moyen de la mesure métrique. * *
Avec la Pl. V nous nous trouvons en présence de tous les développements partiels tels qu'ils s'effectuent dès la naissance jusqu'à l'âge adulte, et qui constituent vraiment la « croissance » relative. Sont exceptées, toutefois, les grosseurs (les circonférences) dont la représentation figurative ne se pourrait faire que par les procédés de la statuaire. Nous pouvons suivre l'ontogénie extra-utérine avec les variations que, par l'hérédité et le milieu, elle imprime aux dimensions squelettiques, aux dimensions musculaires, aux dimensions segmentaires, variations qui ne sont envisagées ici que dans leur rapport avec la taille. Jusqu'à présent, nous avons étudié les proportions de l'adolescent à partir de l'âge de 13 ans 1I2, qui, chez le moyen, précède de 2 ans l'âge de l'apparition des premiers signes de puberté. Nous avons vu que ces variations sont relativement peu considérables. La Pl. V, au contraire, prend l'enfant à sa naissance et montre des variations relatives d'une grande étendue. Elle est assez expressive par ellemême pour que quelques explications suffisent à son interprétation. Il en est de même de la Pl. I. On sait qu'entre la naissance et l'âge de 6 ans Va s'écoulent la première et la deuxième enfance, tandis
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que la troisième enfance s'étend de 6 ans 1ja à 15 ans âge moyen de la puberté. Cette juste division a été proposée par Marfan (Semaine médicale du 21 novembre 1896, n° 59) et mérite être conservée pour les raisons données par l'auteur auxquelles s'ajoutent encore divers motifs ontogéniques1. L'âge de 17 ans 1/2 clôt la période pubertaire proprement dite et ouvre la phase internubilo-pubertaire dont les limites et les caractères ont été tracés dans ma communication du 9 juillet 1909 à la Société d'Anthropologie de Paris (séance du Cinquantenaire). Enfin vient la demi-silhouette de l'adulte à 23 ans et demi. Tels sont les cinq âges figurés sur les planches I et V. Les mesures du nouveau-né s'obtiennent d'une façon rapide et simple au moyen de la toise que j'ai fait construire sous le nom d'« auxanomètre »2 et dont la moitié inférieure se transforme instantanément en toise couchée. La hauteur et la largeur de tous les segments du corps sont en effet pour la première fois étudiées métriquement dans leur rapport à la taille chez le nouveau-né et chez l'enfant de 6 ans 1/2. Les proportions sont ce qu'elles sont, sans qu'il intervienne dans leur détermination une préoccupation quelconque de
1 On doit cependant admettre une quatrième phase de l'enfance, la phase pubère qui s'étend aux deux années nécessaires à l'installation de la puberté, de 15 Va & 17 i/3 en moyenne. 2 Déposée chez Maloine fils, rue Casimir Delavigne, Paris.
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trouver, par exemple, un segment susceptible d'être utilisé à mesurer les autres. Les Pl. I [et V nous montrent que le menton du nouveau né ne descend pas jusqu'à l'extrémité inférieure du sternum, pas même jusqu'au mamelon de l'adulte, mais correspond seulement à la mi-hauteur du sternum de ce dernier. A plus forte raison, la hauteur proportionnelle de la tête diminuant avec l'âge, la correspondance menton-mamelon ne peut-elle exister plus tard, ainsi que le laisserait croire la figure due à Stratz, cité par Cruchet dans son remarquable article intitulé : «L'Enfant, de deux ans à la Puberté », de la Pratique des Maladies des Enfants, t. I, p. 382. Cette même figure présente par exemple la montée du grand trochanter comme admirablement régulière et atteignant son point culminant chez l'adulte. Or, ce point culminant relatif est en réalité atteint chez l'adolescent de 15 ans 1/2. De même, Stratz a cru devoir proportionner chacun des segments du membre inférieur à la taille et grandir d'une quantité proportionnelle la cuisse et la jambe au fur et à mesure du vieillissement de l'enfant. C'est tout autrement que les choses se passent : proportionnellement à lajtaille, la cuisse change très peu, tandis que le tibia double de longueur de la naissance à 15 ans 1/2. Au membre supérieur, on constate le même phénomène, l'avant-bras allonge proportionnellement de plus d'un tiers de sa longueur en passant de 0 à 15 ans 1/2, et pendant ce
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temps, l'allongement relatif du bras est insignifiant. Cela est fait pour surprendre ceux qui s'attendent à un accroissement de chaque segment de membre proportionnel à l'allongement de la stature. L'observation montre que, contrairement à cette conception théorique, un seul segment, le distal, procure au membre supérieur son allongement proportionnel, entre la naissance et la puberté. Le pubis donne lieu à une remarque importante : au lieu d'être sous-jacent à la ligne bi-trochantérienne, comme cela se présente pour tous les autres âges, le pubis est situé chez le nouveau-né au-dessus de la ligne bi-trochantérienne. Le bassin serait donc le siège de deux mouvements de basculement [successifs et en sens inverse. Le premier, ayant pour effet d'abaisser le pubis, se produirait dès la naissance. Puis, à partir de 6 ans 1/2, on assisterait] au basculement inverse avec relèvement du niveau du pubis. Ce fait, singulier à certains égards, ne pourra être considéré comme acquis qu'après contrôle par de nouvelles séries et aussi par les rapports anatomiques mieux capables que les rapports à la taille d'établir un fait de cet ordre. La hauteur du tronc entier du nouveau-né est proportionnellement bien supérieure à celle des âges suivants. Il en est de même, cela se comprend, de la plupart des segments du tronc. Nous lisons les différences les plus frappantes en comparant sur la Pl. V la première demi-silhouette à la seconde et à la troi-
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
sième : la hauteur du thorax du nouveau-né est démesurée; la position de son mamelon équidistante de la fourchette et du sommet sternal est tout autre que sur les deux demi-silhouettes suivantes; son cou est moins haut d'un quart qu'il ne sera à 6 ans 1j2 époque à laquelle il aura par rapport à la taille la même hauteur qu'à 23 ans ^ Au lieu de rencontrer le buste au-dessous du pubis comme chez le grand garçon et l'homme, le milieu du corps se trouve entre l'épine iliaque et le pubis de l'enfant de 6 ans. Chez l'enfant, à la naissance, le buste représente les 66 centièmes de la hauteur totale du corps. Le plan horizontal qui correspond au milieu du corps le coupe à égale distance de la crête iliaque à l'angle de la dixième côte. Mais le cou offre une largeur qu'il ne présentera plus à aucun âge, et qui va se réduire jusqu'à la puberté. II en est des autres porportions de largeur comme de celles du cou. Elles sont bien supérieures au moment de la naissance et vont en diminuant jusqu'à la puberté. Au delà de 15 ans nous savons comment elles se comportent. Mais les variations du crâne, en fonction de la taille aussi bien en hauteur qu'en largeur, sont particulièrement saisissantes et donnent à elles seules son principal relief à la Pl. V. Le crâne offre l'exemple rare dans l'organisme d'une grandeur se modifiant à travers les années d'une façon régulière. -Il
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s'agit dans l'espèce d'une « décroissance » relative. Cela signifie simplement que le cerveau de l'enfant est, dès la naissance, beaucoup plus près de ses dimensions adultes qu'aucun autre organe, et que son contenant a beaucoup moins à croître que la taille. La grande envergure n'offre qu'un faible intérêt anthropométrique. Elle est complexe, en effet, et chacun des éléments qui la constituent a été mesuré pour son compte. Cependant, la grande envergure n'est pas indifférente aux artistes qui ont parfois l'occasion de l'envisager dans son ensemble, les membres supérieurs étant étendus dans le plan des clavicules. Par ailleurs, ses rapports à la taille sont souvent invoqués à l'appui de thèses diverses. Voici donc les rapports à la taille de cette grandeur, qui dépasse la taille elle-même sauf chez le bébé, et chez 7 pour 100 des adolescents et des adultes. Il est à remarquer que sur ces 7 pour cent un seul est brachyskèle tandis que les six autres sont mésatiskèles.
Grande envergure exprimée en millièmes de la taille.
Enfant naissant — de 6 ans '/a Adolescent de 15 ans V2 •■■ — de 17 ans V2 ••• Adulte de 23 ans 92,4 101 103 103 106,1
Ces rapports sont établis d'après les moyennes stables de séries de sujets appartenant à des régions diverses et à des milieux différents.
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Par dimension relative — et c'est là un point important de notre étude où tout est analyse de rapports, expression anatomo-physiologique de très nombreuses corrélations—par dimension relative, s'entend la comparaison de chaque longueur partielle, évaluée anthropométriquement, à la longueur totale. S'il s'agit de la jambe, par exemple, la longueur totale à laquelle on la rapporte peut être la stature, ainsi que je l'ai fait dans l'étude des proportions, mais cette longueur totale peut aussi bien être la longueur du membre inférieur, sa hauteur au-dessus du sol, dont la jambe représente une partie. Au point de vue anatomique proprement dit, c'est différent : on compare un segment à un autre segment au-dessus ou au-dessous de lui, ou encore au segment homologue du membre thoracique, c'est-àdire à l'avant-bras, s'il s'agit de la jambe; mais on doit éviter de le rapporter à une longueur, que ce soit la taille ou le membre inférieur, à une longueur globale dont le segment étudié fait partie. Ainsi, on ne comparera pas la jambe à la taille, à moins de vues spéciales telles que celles qui m'ont guidé dans l'étude des «proportions », on ne comparera pas la jambe à la longueur totale du membre inférieur, parce que dans un cas comme dans l'autre la hauteur propre de la jambe représente une partie de la dimension à laquelle elle se trouverait rapportée et qu'ainsi une part du quotient représenterait le rapport de la jambe à la jambe ce qui est un non-sens.
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Pratiquement, on admet que la plus grande des deux dimensions, et ceci s'applique aux dimensions de largeur comme aux dimensions de longueur, est égale à 100, au mètre, en sorte que la fraction obtenue donne en centimètres ou en millimètres (en centièmes ou en millièmes de mètre) la dimension relative de la partie comparée. Si l'on procède à cette comparaison chez le même enfant, mesuré six fois, à six semestres consécutifs, et qu'on rapproche les divers résultats semestriels du même rapport, on constate le changement progressivement réalisé. Les proportions se sont modifiées, et chacune des parties ou segments du corps a pris des dimensions absolues et relatives différentes suivant l'importance plus grande ou moins grande de son rôle fonctionnel dans l'acheminement de l'organisme vers son état de perfection.
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Influence de la croissance sur les variations des proportions du corps. — La croissance a une influence considérable sur les proportions du corps qu'elle fait varier dans des limites souvent fort étendues. Voici les considérations générales auxquelles donnent lieu ces variations, telles que je les ai formulées dans une communication à l'Académie de Médecine (séance du 27 juin 1911). La croissance modifie d'une façon constante les
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rapports centésimaux à la stature de chacune des longueurs et des largeurs segmentaires du corps de l'homme à trois âges différents : naissance, 6 ans, 15 ans. Or, de mes recherches publiées jusqu'à ce jour, il résulte que l'évolution des variations de ces rapports est dominée par quelques lois d'un incontestable intérêt anatomique et physiologique. Les voici brièvement motivées, d'après ma communication sur le même sujet à la séance du 19 juin 1911 de l'Académie des Sciences. Nature et étendue des variations. En passant de l'enfant naissant à l'homme, chaque segment a sa manière propre de se comporter vis-à-vis de la taille, Pl. I et V; le crâne et le tronc perdent l'un et l'autre en longueur et en largeur, le premier plus encore que le second : « crâne, dix centièmes dans les deux sens ; tronc neuf centièmes en long et quatre centièmes en large ». Le cou perd trois centièmes en diamètre, mais gagne deux centièmes en hauteur. Le membre supérieur gagne six centièmes. Le membre inférieur gagne dix-sept centièmes mais seulement jusqu'à la puberté. Au delà, il perd un centième. Alternances des variations. Il s'ensuit que si l'accroissement proportionnel est supérieur à celui de la stature pour un segment du corps, il lui est inférieur pour le segment situé immédiatement au-dessous ou au-dessus. C'est là un nouvel aspect de la loi des
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alternances que j'ai formulée en 1902 d'après l'observation de la croissance des os, dans mes Recherches sur la croissance des diverses parties du corps. Changement de sens des variations. Tel segment qui progresse relativement plus que la stature jusqu'à la puberté, retarde sur elle au delà de l'âge pubère; c'est le cas du membre pelvien. Tel autre segment qui perd sur la stature avant la puberté, gagne sur elle quand la puberté est franchie. C'est ainsi que se comportent les rapports à la . taille de la largeur du cou, de la hauteur du thorax, de la hauteur de l'abdomen inférieur ou iliaque, de la hauteur du segment ischio-pubien, de la largeur du bassin, de la longueur du bras (segment huméral) de la hauteur du tronc dans son ensemble. Pl. VI et VII. La puberté a donc une influence décisive sur le sens des variations, sur leur orientation. Elle possède en outre, sur les accroissements proportionnels, une action majorative déjà notée à propos des accroissements absolus. Phases de l'évolution des variations. L'évolution des variations présentées par les proportions de longueur et de largeur du corps se répartit d'elle-même entre trois phases, offrant une activité de croissance différente; la première phase s'arrête à 6 ans, époque à laquelle sont parcourus les six dixièmes, et, pour quelques proportions les neuf dixièmes de l'augmentation ou de la diminution de l'accroissement propor-
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tionnel; de telle sorte que la silhouette, à cet âge, indique déjà ce qu'elle sera chez l'adulte. La seconde phase s'étend de 6 ans à la puberté; la troisième se termine à l'âge adulte, à la nubilité. La plus active pour Vélargissement proportionnel du corps, la dernière, est en même temps la moins active pour son allongement proportionnel, Pl. I, V, VI et VII. L'inverse a lieu pendant la première phase ; la seconde phase, la phase moyenne, n'est qu'une suite ralentie de la première. Cela constitue autant d'applications de la loi des alternances. Conclusions. 1° Il existe trois phases dans l'évolution des variations présentées par les proportions de longueur et de largeur du corps. La première de la naissance à 6 ans. La deuxième de 6 à 15 ans. La troisième de 15 ans à l'âge adulte. 2° La « loi des alternances » régit les accroissements proportionnels des segments du corps, comme elle régit leurs accroissements absolus. 3° Les variations des proportions de longueur et de largeur du corps dans les deux sexes sont profondément modifiées par la puberté qui les soumet à ses lois d'orientation et de majoration. 4° Les proportions de largeur, en général, présentent des variations propres qui sont en corrélation avec celles des proportions de longueur du tronc. Proportions partielles. A côté des rapports à la taille que nous venons d'analyser, l'éducateur ne peut
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se désintéresser des rapports intersegmentaires, qui sont d'ailleurs les rapports anatomiques proprement dits, parce que ce sont ces rapports qui constituent la partie essentielle de la formule individuelle de croissance. La première place, parmi ces rapports intersegmentaires, revient au rapport -|- de Manouvrier. B représente le buste, c'est à-dire toute la partie du corps qui domine le plan du siège du sujet assis. En retranchant cette hauteur de celle de la taille debout, on obtient S qui répond à une longueur réduite du membre inférieur. En classant les séries d'enfants d'après ce rapport, on voit se grouper d'un côté les « courtes jambes », de l'autre les «jambes longues », et dans l'intervalle, les jambes moyennes. Pl. VIII. Aux «jambes courtes'» s'associe un long buste pour constituer le brachyskèle. Le brachyskèle enfant de 13 ans Va1 qui est surtout caractérisé par le rapport -|dont le quotient oscille chez lui autour de 87, offre de nombreuses corrélations anatomiques et physiologiques de ce rapport. Quand les jambes (jambes dans le sens de : membres inférieurs) sont longues, elles sont associées à un buste court, (nécessairement, puisque d'après la
1 Le D1 Poutrin, préparateur d'anthropologie au Muséum d'Histoire Naturelle de Paris, a trouvé une brachyskélie beaucoup plus accentuée que celle de l'enfant de 13 V2 chez une peuplade de Pygmées du Congo belge : « Les Négrilles du centre africain. » L'anthropologie, tome xxn, n°3 4-5, 1911.
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
constitution du rapport, c'est par comparaison avec le buste que les membres inférieurs sont dits longs ou courts), et la macroskélie est constituée. Elle se traduit par le rapport -§- = 96 (de 94 à 98 et au delà). Chez les macroskèles, les corrélations du rapport ^-sont très différentes [de ce qu'elles sont chez les brachyskèles, et même chez les moyens ou mésatiskèles dont le rapport oscille autour de 90. Pl. VIII. A partir de la puberté, surtout, le quotient -|s'abaisse au fur et à mesure que l'enfant avance vers l'état adulte, témoignant des corrélations fonctionnelles de ce rapport. C'est chez l'enfant spécialement que l'éducateur a des raisons de s'intéresser à ce rapport qui prend une part importante à la formule individuelle. Importance des corrélations fonctionnelles. — Plus loin, quand nous étudierons la constitution de la formule individuelle de croissance, nous utiliserons encore les rapports intersegmentaires, mais d'une façon un peu différente, par suite de notre préoccupation dominante de la fonction : nous comparerons entre elles des capacités. La recherche des corrélations fonctionnelles nous conduira quelquefois à comparer une grosseur ou une longueur à un volume, et il en ressortira d'importantes informations pour la direction éducative ou pédagogique. Les mesures que nous avons relevées sur la fiche individuelle nous fournissent bien d'autres facteurs
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de rapports que nous aurons toujours intérêt à calculer en vue des renseignements directs et immédiats qu'ils peuvent nous procurer, en vue de la comparaison de leur quotient avec celui du même rapport chez d'autres enfants, ou avec lui-même chez le même enfant à quelques semestres de distance. Tels sont : le rapport de la longueur du pied à la hauteur du membre inférieur ; le rapport de la longueur du membre inférieur à la hauteur du tronc (distance de la fourchette sternale au pubis ou diamètre vertical du tronc); le rapport de la hauteur du tronc à la longueur du cou ou à celle de tout autre segment du corps, crâne, pied ou main, ou membre supérieur; le rapport de la longueur du membre supérieur à la longueur du membre inférieur, les rapports de la largeur à la hauteur de quelques segments, tels que le pied, la main, le tronc, le crâne. L'éducateur qui exerce son activité dans de multiples directions, aura intérêt à ne se préoccuper de ces divers rapports qu'autant qu'il y sera invité par les corrélations fonctionnelles individuelles, laissant au médecin le soin d'apprécier les écarts du développement qu'il aurait cru devoir lui signaler.
��CHAPITRE IV
INFLUENCES QUI AGISSENT SUR LA CROISSANCE
Influences qui agissent sur la taille. — Influence de l'alimentation, du sexe, de la race, de l'hérédité, des saisons, de la gestation, des exercices. — Rapports de la maladie avec la croissance et réciproquement. — Influence de la fonction de reproduction.
Influences qui agissent sur la taille. -— Les études faites jusqu'à ce jour des influences qui agissent sur la croissance, n'ont porté que sur la taille seule, ou sur la taille et le poids. Nous avons vu combien la taille était loin de représenter la « croissance » du corps, d'exprimer ce que l'analyse scientifique d'une part, l'application éducatrice d'autre part, peuvent et doivent entendre par « croissance ». Si certaines influences agissent sur la taille et l'allongent, sont-elles à rechercher par l'éducateur ? L'éducateur, pour trancher cette question, commencera par se rendre compte de sa valeur organique, biologique de la taille, de la valeur individuelle par conséquent, puis de sa valeur sociale, économique. Il recherchera le rendement en travail utile des peu-
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pies suivant la taille et il aura tôt fait de reconnaître à travers l'histoire que les races de petite et de moyenne stature fournissent un rendement souvent supérieur, au moins égal à celui des races de haute taille. Cela pourra paraître en contradiction avec certains faits de l'histoire moderne et contemporaine, mais cette impression ne résistera pas à une analyse plus serrée des conditions et du mécanisme de rendement par laquelle le travail personnel se différencie du travail commandé. Ce ne sont plus les esclaves que nous voyons au labeur, mais les gens d'autres nationalités, comme cela s'observe sur les paquebots marchands anglais par exemple, tandis que vous ne verrez que des Japonais sur les paquebots japonais. La fortune anglosaxonne provient en partie de l'Inde et du Cap où les ouvriers sont des Nègres, des Hindous, des Chinois ! Si les bras sont ceux des hommes de race petite ou moyenne, peut-être les hommes de haute taille qui commandent, qui dirigent, sont-ils plus richement doués au point de vue de la quantité cérébrale ? La réponse nous est donnée par ces lignes 1 de L. Manouvrier dont les belles études sur le cerveau sont connues et appréciées dans les milieux scientifiques du monde entier : « La supériorité qualitative (du cerveau) est une condition de supériorité intel1 Dictionnaire de Physiologie de Charles Richet, 3e fascicule du tome n, pages 072, 68S, 689.
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lectuelle ; la supériorité quantitative en est une autre, la supériorité morphologique en est encore une autre. Et c'est parce qu'il y a des conditions anatomiques diverses en rapport avec la supériorité intellectuelle qu'aucune de ces conditions ne saurait être, isolément, une base suffisante pour évaluer la supériorité intellectuelle », et plus loin : «La moyenne de ces 62 Parisiens, tous de très-haute taille, est égale à 1365 grammes l. On ne pourrait donc expliquer par une supériorité de taille même très grande, et d'ailleurs non démontrée, qu'une partie de la supériorité cérébrale quantitative de la série des hommes distingués. » Ce n'est pas, pouvons-nous conclure, parce que la race est de haute taille qu'elle possède nécessairement un cerveau plus volumineux, et le posséderait-elle que cela ne serait pas une garantie suffisante de supériorité intellectuelle. En définitive, l'éducateur n'a point à rechercher la supériorité intellectuelle pour ses pupilles dans la supériorité de la taille. Mais il suffirait qu'il pût escompter la taille comme facteur de santé et de force pour qu'il fût autorisé à « cultiver l'allongement du corps ». Or chacun sait que la vigueur de l'organisme est ordinairement manifestée par l'importance des autres dimensions du corps, largeur, grosseur, épaisseur, mais non par la hauteur, à moins que celle-ci ne soit accompagnée des autres.
' Poids très voisin du poids moyen du cerveau adulte eu général (V. Vierordt. Boyd, Manouvrier).
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Les dimensions qui correspondent à un degré élevé de force organique sont l'apanage des montagnards, des ouvriers agricoles, des portefaix, et ces hommes ne se distinguent généralement pas par la hauteur de leur taille. A quelles influences, d'ailleurs, est dû l'allongement de la taille d'un jeune homme ou d'une jeune fille au delà des limites marquées par l'hérédité ? En d'autres termes, quelles sont les conditions qui font grandir un enfant plus que père et mère ? Ce que nous observons tous les jours ne nous laisse guère de doute à ce sujet, et, d'autre part, les statistiques le montrent. Ce n'est point à la campagne que les descendants gagnent en stature sur les ascendants. C'est en ville; la vie en appartements, la vie au collège, favorisent la supériorité staturale de l'enfant sur ses parents. L'allongement exagéré est si bien l'effet de la claustration, de l'insuffisance d'air, d'activité et de lumière, qu'il se montre constamment chez les enfants qui sortent du lit après une longue maladie. L'allongement de la taille est dans tous ces cas le résultat de l'accroissement en longueur des os longs du membre inférieur. Le buste n'y prend qu'une part à peine appréciable ainsi que me l'ont démontré les mensurations chez les convalescents. D'après notre analyse de l'accroissement de la taille et de l'accroissement de ses éléments constitu-
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tifs, nous savons qu'au delà de la puberté l'allongement des membres inférieurs devient normalement très faible et que déjà, à partir de l'âge de 8 ans, les membres inférieurs grandissent de moins en moins chaque année. Aussi un garçon ou une fille de 13 à 16 ans qui fait un accroissement notable uniquement par ses membres inférieurs est déjà, de ce chef, suspect à l'éducateur averti. S'il était permis de raisonner biologiquement ainsi, on pourrait dire que des deux sources d'accroissement auxquelles puise l'os long à dater de la puberté, l'une, périostique, est l'expression de la nutrition, l'autre, cartilagineuse, est l'expression de la dénutrition. Cela a du moins l'avantage de tracer nettement à l'éducateur le choix qu'il lui appartient de faire, et de préciser la direction dans laquelle il doit orienter son action. C'en est assez pour enlever aux parents l'ambition de voir leurs enfants devenir plus grands qu'euxmêmes. Ce que la « race » ne fait pas, il faut éviter de le provoquer, du moins en ce qui concerne la stature. D'autant mieux que l'allongement de la taille, sous les influences qui précèdent, se fait toujours au détriment des dimensions avantageuses pour le corps. Par suite de l'état maladif de l'enfant soumis à ces influences, les phases d'alternance (je reviendrai plus loin sur le rôle biologique de l'alternance) sont transgressées. Tandis que, dans l'évolution régulière de
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la croissance, une phase « de grossissement » succède à une phase d'« allongement », il n'en est plus ainsi chez le pauvre jeune prisonnier des appartements urbains et des établissements d'instruction, et l'une des phases se prolonge indéfiniment : la moins bonne, c'est fatal. La stature, plus haute que ne le comporte la phylogénie, se réalise donc, sauf exceptions, au détriment des dimensions du corps les plus avantageuses pour sa force et les plus utiles pour sa préservation morbide. Concevez-vous maintenant à quelles erreurs d'interprétation nous nous exposerions de propos délibéré si nous jugions de la croissance par la taille, si nous voulions apprécier d'après leurs effets sur la taille les influences qui sont susceptibles d'agir sur la croissance! Nous savons maintenant que l'étude des influences des divers facteurs sur la taille nous renseigne bien peu en ce qui concerne l'action de ces facteurs sur la croissance, malgré le correctif apporté par la pesée que relèvent divers auteurs. Logiquement nous considérerons comme de fort utiles documents les études faites dans ce sens, mais au mot « croissance » nous substituerons mentalement le mot « stature » ; nous nous rappellerons que nous n'avons pas le droit de conclure de l'une à l'autre. Cela établi, voici le résumé des notions acquises relativement aux diverses influences sur la taille. Influence de la nutrition, qu'il convient d'appeler ici alimentation, car la nutrition est la résultante d'une foule de facteurs organiques d'ordre physique, chi-
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mique, biologique, qui paraît dépendre surtout de l'hérédité et de l'alimentation placentaire, et dont nous ne sommes à même de constater que les effets. L'alimentation, qui n'en représente qu'un élément, l'élément externe, est, au contraire, entre nos mains, un moyen d'action indéniable, et nous devons en observer l'influence avec le plus grand soin. D'après les auteurs, il semble que, toutes choses égales d'ailleurs, et spécialement les conditions dépendant de la race et de l'hérédité familiale, la taille devienne plus haute sous l'influence d'une alimentation substantielle. L'étude de Carlier : « Des rapports de la taille avec le bien-être » est une des meilleures que nous possédions avec celles de Villermé (1829) et celle de Manouvrier (1888). Mais ces études n'envisagent pas seulement l'influence alimentaire, elles visent toutes les conditions ambiantes. Il faudrait aussi savoir si la stature des descendants ainsi favorisés a dépassé celle des ascendants. Influence du sexe. Assurément la taille moyenne est moindre dans le sexe féminin; quant à la façon dont se comporte l'allongement de la stature à travers les âges successifs, les auteurs ne sont pas d'accord sur ce point; Variot et Chaumet (1906) ne souscrivent pas aux conclusions de Schmidt, lequel désapprouve la manière de voir de Quételet. Tout cela est surtout affaire des méthodes d'observation, Quételet seul ayant observé avec suite les mêmes enfants d'âge en âge.
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Influence de la race et de l'hérédité. Ces deux facteurs ne peuvent guère être dissociés ainsi que le remarque H. de Varigny K Les tableaux cités par cet auteur sont le meilleur document dans l'espèce, et il faut s'en tenir aux tableaux, car partout la confusion règne entre « allongement de la taille et croissance », d'où la difficulté de faire cadrer les documents sur l'homme avec ceux qu'ont recueilli sur les animaux les éleveurs, qui ne semblent pas tomber dans la même erreur.
La Taille selon les Races.
(D'APRÈS H. DE VARIGNY)
Tailles hautes, 1 m. 70 et au-dessus. Patagons 1 m. 85; Comanches 1 m. 80; Polynésiens 1 m. 76; Iroquois 1 m. 73; Scandinaves 1 m. 71; Ecossais 1 m. 71 ; Zoulous 1 m. 70; Esquimaux 1 m. 70. Au-dessus de la moyenne, 1 m. 65 à 1 m. 69. Nubiens, Anglais, Allemands 1 m. 69; Belges et Arabes 1 m. 68; Français 1 m. 65. Au-dessous de la moyenne, 1 m. 60 à 1 m. 64. Australiens, Chinois, Bavarois, Esthoniens, 1 m. 64; Juifs 1 m. 63; Japonais 1 m. 60. Petites, moins de 1 m. 60. Malais, Annamites, 1 m. 59 ; Ostiaks, 1 m. 56 ; Lapons 1 m. 53; Siamois 1 m. 53; Boshimans 1 m. 44.
1 H. de Varigny. Art. Croissance du Dictionnaire de Physiologie de Ch. Richet. — P. Alcan, édit., 2e fasc. du t. IV.
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M. H. de Varigny n'indique pas les sources auxquelles il a puisé les éléments de ces tableaux. Les Polynésiens, les Arabes, les Esquimaux sont des dénominations évidemment trop compréhensives. Parmi les Arabes j'ai personnellement constaté des groupes ethniques fort différents, et d'autre part, la taille moyenne des Esquimaux que j'ai pu mesurer était de 1 m. 47 et n'atteignait même pas 1 m. 50 chez ceux de ces jeunes hommes des rivages de la baie d'Hudson, qui conservaient leurs bottes de peau (ils étaient âgés d'une trentaine d'années). Souvenons-nous que Broca attribuait l'influence prédominante, en matière de stature, à la race. Influence du climat. M. de Varigny fait observer avec raison que des faits recueillis on ne peut tirer aucune conclusion, parce qu'il n'a point été tenu compte de la différence des races, parce que la méthode employée n'était pas bonne. Le fait est que la théorie- de l'influence réductrice du froid sur les proportions des organismes vivants ne se vérifie guère pour l'homme, qui compte les plus hauts de ses représentants dans des pays glacés tels que la Patagonie et la Scandinavie ou l'Ecosse, et offre des races de pygmées en Malaisie (von Luschan), au Congo (Poutrin), etc. Sous l'Equateur vivent des hommes de haute taille et près des pôles se trouvent les Lapons et certains groupes d'Esquimaux fort petits (1 m. 47). D'après cela le climat n'exercerait pas d'action appré-
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ciable sur la taille adulte; sa hauteur ou sa petitesse resterait indépendante de la latitude. Comme on s'en rend compte, cela n'a aucun rapport avec la façon dont, sous les diverses latitudes, se développent les différentes parties du corps à dater de la naissance, cela n'a aucune relation avec la modalité de la croissance, avec son rythme. Influence des saisons. Les patientes recherches de Mailing Hansen, qui a suivi jour par jour la taille et le poids des sourds-muets de son institution de Copenhague et a même répété la mensuration et la pesée plusieurs fois par jour, fournissent des données très intéressantes et dont la portée serait plus grande encore si ses sujets n'étaient pas des infirmes, astreints à la vie de collège, et s'il ne s'était pas borné à la mesure de la taille et à la pesée. Quoi qu'il en soit, Mailing Hansen a reconnu que quand le poids augmente, la taille ne paraît pas allonger, et vice versa : « Pendant l'automne et le commencement de l'hiver, l'enfant accumule du poids; mais la taille reste stationnaire. Au commencement de l'été, le poids demeure presque sans changement, mais l'enfant pousse en hauteur, comme les arbres. » etc. \ D'après Combe (de Lausanne) la saison exercerait déjà son influence avant la naissance; les garçons nés de septembre à février seraient plus courts que les garçons nés de mars à août ; les filles seraient plus courtes quand elles naissent de décembre à mai.
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H. de Varigny, loc. cit.
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Les cadets de Dafîner ont toujours montré un accroissement estival supérieur à l'accroissement hivernal (octobre à avril). Les recherches de Carlier 1, qui ont précédé toutes celles-là et semblent les avoir inspirées comme elles ont inspiré les miennes, avaient admirablement précisé l'influence des saisons relativement au poids, au périmètre thoracique et à la taille que l'auteur résume dans le tableau que voici : Augmentation moyenne totale en été et en hiver du périmètre (circonférence thoracique sous-pectorale), du poids et de la taille. (De 13 ans x/a à 15 ans x/2)
Périmètre / été
S ^jT
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Différence : 4 cm. 2
Poids
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Cependant, comme l'avait déjà remarqué Bufîon, entre la naissance et 5 ans, les saisons sont sans influence sur l'accroissement de la taille. Au delà de 5 ans, l'influence devient très manifeste. Influence de la gestation. Il n'y a point antagonisme, ainsi que le pensait Herbert Spencer, entre ces deux processus : la croissance et la reproduction, et
') Dr G. Carlier, médecin-major de l'armée, Extrait des Mémoires de la Société à"Anthropologie de Paris, 2e série, t. rv, 82 pages. « Recherches anthropométriques sur la croissance. »
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chaque médecin a rencontré de jeunes mères qui « grandissaient » entre la naissance et le sevrage de leur premier-né et même au delà. La nubilité toutefois, nous le verrons, n'est réellement établie qu'avec l'achèvement de l'accroissement des différentes parties du corps, et par conséquent de la taille. L'influence de la castration trouvera place dans l'étude de l'influence de la fonction de reproduction. Rapports de la maladie avec la croissance et réciproquement. — Il nous reste à prendre une idée rapide de l'influence de la maladie sur le grandissement de la taille, et de la croissance sur la maladie ou, plus justement, de l'âge sur la maladie. Nous avons déjà vu plus haut que d'une façon générale, la maladie allonge la taille particulièrement pendant la période de convalescence. De « réserve préalable », il ne saurait être question dans ces cas pour expliquer la source à laquelle puise l'effort organique d'accroissement; pas plus du reste que de « recueillement », car l'organisme vient de subir une épreuve particulièrement épuisante en faisant les frais qu'entraîne nécessairement une infection. Quant aux phases de l'accroissement auxquelles l'organisme devient plus vulnérable, il n'y en a aucune qui ne soit le fait d'une faute en élevage ou en éducation, peut-être dans les deux, à moins que l'un et l'autre n'aient été précédés par l'action d'une hérédité néfaste.
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L'alimentation placentaire a sa répercussion jusqu'au temps de la puberté. L'alimentation du nourrisson fait un bon ou un mauvais appareil digestif, qui devient de ce chef une porte fermée ou ouverte aux diverses infections auxquelles est exposée l'enfance. Or, ainsi que l'a démontré Marfan, la plupart des infections du jeune âge pénètrent dans l'organisme par la voie digestive. J'ai pu me rendre compte que c'est encore la porte digestive qui donne accès au plus grand nombre d'infections, chez l'enfant, jusqu'à la fin de la phase pubertaire. Si bien que la réceptivité morbide d'un enfant, pendant le cours de sa croissance, est en majeure partie l'œuvre de sa mère qui a été une bonne ou une mauvaise nourrice placentaire, une bonne ou une mauvaise nourrice au sein, ou qui a remplacé la mamelle par le biberon, créant d'emblée cette « dyspepsie latente » que signale Marfan, et encourant la responsabilité des infections ultérieures. Ainsi tout se ramène, en matière de rapports entre la croissance et la maladie, aux conditions individuelles. Influence des exercices. Carlier reconnaît, comme les auteurs qui l'ont précédé et suivi, du reste, que la taille ne paraît pas influencée par les exercices physiques. Toutefois, la vie de plein air en permanence, la station debout continue, les longues marches quotidiennes, le travail pénible, ne favorisent pas chez l'enfant le développement en hauteur, mais en lar5
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geur, en épaisseur, en grosseur, c'est-à-dire en force. En ville, cela s'observe sur les jeunes manœuvres qui servent les maçons, par exemple. Les animaux que l'on prive d'exercice, en les tenant enfermés à l'abri de la lumière, ainsi que j'en ai répété l'expérience sur des animaux non soumis au régime d'engraissement, ne tardent pas à allonger et dépassent dans un temps relativement court la taille des témoins de même âge et de même race. Pour les lapins, pour les poulets, rien n'est plus facile à vérifier. Pendant huit ans, j'ai poursuivi des recherches méthodiques concernant l'influence des exercices gymnastiques sur la croissance des diverses dimensions de l'enfant; je ne m'en suis pas tenu à sa taille, à son périmètre et à son poids, j'ai pris d'autres mesures; mais voici les conclusions auxquelles j'ai été conduit en ce qui concerne ces trois mesures : Chez les adolescents de 14 ans 1/2 à 18 ans, la gymnastique aux appareils (barre fixe). 1° ne gêne pas la croissance en hauteur; 2° procure à la cage thoracique plus d'ampleur qu'elle n'en prendrait spontanément; 3° accroît la densité des tissus, le poids du corps, etc. La portée de ces conclusions est due à la méthode suivie, au nombre d'écoliers observés, deux cents, à la continuité de l'observation sur les mêmes enfants de semestre en semestre, etc., toutes conditions habituelles
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à la méthode auxanologique telle que je l'ai conçue et toujours appliquée depuis 1891-93. Le groupement des pupilles en gymnastes, non gymnastes, malingres gymnastes et malingres non gymnastes, a permis d'étudier les diverses catégories d'écoliers en fonction des exercices gymnastiques, et de réserver toujours un nombre d'enfants témoins égal au nombre d'enfants observés pour permettre des comparaisons valables. L'influence des exercices était recherchée dans ses effets sur la croissance. Il convenait donc de faire le départ bien net entre le développement dû à l'évolution spontanée de croissance, et le développement dû à l'exercice K Pour cela, il était nécessaire que l'étude de la croissance précédât celle du modificateur, agent de l'éducation physique. C'est ce qui a été fait. Enfin, j'ai tenu compte des « effets éloignés », des résultats à distance des exercices sur la croissance, en continuant à observer les élèves au delà de l'époque de l'entraînement gymnastique. Ces conditions avantageuses d'observation se sont trouvées réalisées alors pour la première fois. Elles n'ont pas été répétées depuis. Aussi, je crois devoir y insister pour vous faire remarquer la complexité de l'expérimentation quand elle a pour objet la croissance, pour sujets des enfants, c'est-à-dire des organismes en travail de continuelle transformation,
1 Méthode indispensable pour arriver à un classement des exercices d'après leurs effets.
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autant que pour vous faire souligner des résultats qui sont différents par certains côtés des résultats mentionnés par les auteurs précédents et suivants (mon mémoire a été publié en 1901 par la Société d'Anthropologie de Paris). Ces recherches ont eu en même temps pour but d'établir une méthode de contrôle [des effets de l'éducation physique au moyen de l'anthropométrie. A ce titre, elles représentent une application éducative de la méthode auxanologique, et seront exposées avec leurs graphiques de courbe et leurs tableaux dans la partie de cet ouvrage traitant plus spécialement des « applications éducatives et pédagogiques », des résultats de mes recherches sur la Croissance des diverses parties du corps. L'influence de la consanguinité sur la croissance est mal connue chez l'homme et d'ailleurs difficile à étudier, les termes de comparaison faisant défaut. Chez les animaux, l'observation prend la précision d'une expérimentation. On constate que la consanguinité ne représente qu'une accumulation d'hérédité de même sens, autant que permettent de s'en rendre compte les notions actuellement acquises (v. lois de Mendel). L'influence de la fonction de reproduction est considérable. Elle est pour l'éducateur la plus importante à connaître. Elle sera traitée aux chapitres V, VI, VII et VIII. C'est la Puberté.
�CHAPITRE V
LA PUBERTÉ (INFLUENCE DE L'ÉLÉMENT REPRODUCTEUR SUR LA CROISSANCE.)
Détermination de l'éclosion pubertaire. — Quelques causes d'erreur. — Saison la plus favorable à l'éclosion de la puberté. — La presque totalité des phénomènes pubertaires échappe à qui ne répète pas semestriellement son observation sur le même enfant. — Qu'est-ce que la puberté ? Définition de la puberté.
Si nous voulons étudier l'influence de la fonction de reproduction sur la croissance, nous devons l'aborder par celle de ses manifestations qui est la plus saisissable. Nous verrons ensuite s'il nous est possible de nous étendre en deçà et au delà, aux âges qui précèdent et aux âges qui suivent, et de nous rendre compte de l'action de l'élément constant de l'évolution reproductrice, du germen, non plus sur une dimension du corps, mais sur toutes les dimensions de l'organisme de l'enfant, envisagé dans sa totalité et dans chacune de ses parties, ainsi que dans les rapports proportionnels de ces parties entre elles. C'est en un mot l'action du germen sur la croissance que nous allons nous attacher à déterminer, abandon-
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nant les chemins battus et la simple constatation des coïncidences. L'importance de cette étude pour l'éducateur est encore accrue par ce fait que la croissance met à découvert des phases obscures de l'évolution du germen. Et réciproquement le germen nous fait comprendre certaines parties du mécanisme de la croissance par le mode d'influence qu'il exerce sur elle.
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La puberté s'annonce dans les deux sexes, ainsi que son nom l'indique (pubes, poil) par la pousse des poils sur la peau qui recouvre la partie antérieure des os du bassin appelée pubis. Les poils se montrent d'abord sur ce point, puis, un peu plus tard au creux des aisselles, quand déjà ceux du pubis sont assez fournis. Chez la femme, l'apparition du flux menstruel précède de très peu celle des poils axillaires d'après le r D Marthe Francillon, et précise l'époque de l'éclosion pubertaire. Les règles augmentent peu à peu d'abondance et atteignent leur plénitude, chez les fillettes bien portantes, en même temps que s'achève la pousse des poils axillaires et pubiens. Chez l'homme le phénomène essentiel échappant à l'investigation, les signes secondaires prennent une importance plus grande, et il devient indispensable de les hiérarchiser pour en obtenir des renseignements précis.
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Détermination de l'éclosion puberiaire chez les garçons. Notons par P puissance 1 (P x) l'apparition au pubis des premiers poils, autres que les poils follets, d'ailleurs peu visibles, et qui tombent aux endroits envahis par les poils définitifs. L'enfant a en moyenne 14 ans VaA la mensuration semestrielle suivante, qui répond à l'âge de 15 ans, les poils sont devenus plus nombreux et la voix a pris des raucités qu'elle n'avait pas. Vous notez P2 et mue de la voix, été ou hiver 191.... Le semestre suivant, l'enfant atteint ses 15 ans les poils sont devenus plus nombreux encore au pubis, plus longs, et forment une toison légère, mais suffisante pour dissimuler la peau de la région. Vous inscrivez P3. Mais, en même temps l'attention de l'observateur étant à chaque examen méthodique dirigée sur toute l'étendue cutanée, découvre dans l'une des deux aisselles ou dans les deux, un léger duvet de couleur analogue ou un peu plus claire que celle du duvet pubien du pubis. Vous marquez A h A ce moment, 15 ans 1/2, vous vous trouvez donc avoir sur l'apparition de la puberté les renseignements suivants : P 3 A \ mue de la voix, 15 ans La couleur du scrotum est-elle changée ? différents auteurs mentionnent une pigmentation scrotale. Si la couleur du scrotum est modifiée, elle l'est bien peu. Il s'agit fréquemment d'une apparence due au froncement de la peau par un dartos plus fort et plus impressionnable, l'enfant étant dépourvu de
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vêtements. Aux sillons d'ombre qui en résultent, s'ajoute la teinte sombre que donne aux téguments les quelques poils, plus ou moins foncés, disséminés à sa surface. Il s'en faut que cela ait lieu chez tous. Si ce signe était constant, je proposerais de noter le renforcement du dartos (muscle peaucier du scrotum), muscle plat dont la contraction produit le froncement cutané par le même mécanisme qu'au front, par exemple. Le volume des organes génitaux ne se modifie qu'exceptionnellement à cette époque. Leur augmentation n'a été constatée dans l'ensemble de mes deux séries de première et de seconde ligne qu'aux environs de l'âge de 17 ans. Par conséquent cette modification ne vient pas en temps utile pour seconder dans sa recherche l'observateur qui entend s'en tenir scrupuleusement à la notation des constatations certaines. Les médecins eussent précisé tout cela depuis longtemps déjà, s'ils avaient été appelés à observer périodiquement les mêmes enfants à l'état de nudité. Mais aussi bien dans les lycées, collèges ou écoles que dans les familles, le médecin n'est convoqué qu'au chevet de l'enfant malade, et, d'autre part, à la consultation de la maison d'éducation, comme à celle de l'hôpital, il n'a d'occasion d'observer dans son ensemble le corps nu [de l'adolescent que si celui-ci est atteint d'une affection qui oblige à le découvrir
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complètement, ce qui est l'exception. D'ailleurs, son observation ne vaudrait que si elle était répétée aux semestres suivants. Le groupement de ces trois signes P 3 A1 mue de la voix paraît suffisant pour établir l'époque à laquelle s'assied la puberté. Il est à remarquer que la mue de la voix a coïncidé en général avec P 2, et a pu être notée à la mensuration correspondant à l'âge moyen de 15 ans. Elle précède donc de six mois environ le moment où l'on peut écrire P 3 A1. Pour obtenir toute la précision désirable et donner à chacun des signes l'importance qu'il mérite, il faut connaître la chronologie de ces phénomènes, l'âge moyen de l'apparition de chacun d'eux. Pour la mue de la voix, l'âge moyen est de 14 ans et 8 mois, tandis que P atteint la puissance 3 et A la puissance 1, à l'âge de 15 ans et 6 mois. Nous verrons que la mue de la voix est souvent d'une observation difficile, et que dans l'immense majorité des cas il y a lieu de considérer l'éclosion pubertaire comme répondant à P'A1, c'est-à-dire, pour le moyen, à l'âge de 15 ans et 6 mois. Je rappelle en raison de la singularité du fait et des corrélations fonctionnelles ou pathologie pouvez constater, un fait que j'ai déjà oïe^iojc 1902, à savoir l'apparition des poils plus tardive dans l'aisselle gauche que dans la droite /qj^ récir*ocniement. Cela ne se rencontre que chei^^elquesM^^
a
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Chez tous, au contraire, j'ai observé le retard de la pousse axillaire sur la pousse pubienne, retard d'un an, en moyenne, comme l'indique nettement la différence des puissances de P et de A dans P3 A1. On conçoit que cette hiérarchisation chronologique des faits de croissance ne puisse être observée qu'à la condition de suivre les mêmes enfants de semestre en semestre. Quelques causes d'erreur. — Il arrive que les poils follets en imposent pour un commencement de pousse pubienne; le fait est assez rare, mais il peut se produire. En voici un exemple : le n° 13 de ma série de première ligne (100 enfants de 13 à 18 ans) entre à l'école préparatoire à 13 ans et 4 mois, présentant sur le front et les tempes, sur le dos, à la face postérieure des bras, à la partie antérieure des jambes, des poils follets abondants, couchés, et de couleur brune. En avril 1897, je constate sur la région pubienne des poils fins, assez fournis. Je note PEn octobre de la même année, la raréfaction était très sensible et obligeait à abaisser la puissance de P-à Au mois d'avril suivant, avril 1998, le pubis a retrouvé son fin duvet de 1897 et mérite de nouveau P x/2. Quand arrive la mensuration d'octobre 1898, la région pubienne est totalement glabre et donne lieu à la notation P °. Même état en avril 1899. Enfin, en octobre 1899, des poils non plus bruns, mais franchement noirs, plus forts et plus abondants
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couvrent en partie le pubis, et équivalent à P1. Ensuite on voit sur la fiche individuelle se succéder de semestre en semestre : P 2 A 1; P 4 A 3; P 5 A 6; il s'agit d'un sujet mesuré 10 fois, la grande majorité de ses camarades de la même école n'ayant été mesurés que 9 fois, c'est-à-dire à 9 semestres consécutifs. En ce qui concerne la mue de la voix, je n'ai que quelques remarques à ajouter. Il est clair qu'il ne suffit pas de noter une fois en passant, en traversant une agglomération en médecin ou en explorateur, que la voix d'un garçon ou d'une fillette est dissonante, rauque ou grave pour conclure à la mue laryngée chez M ou chez elle ! La mue est, quand elle se produit, un phénomène toujours le même survenant au cours de l'adolescence avec les mêmes caractères, avec le même cortège de signes. Mais elle peut fort bien ne pas avoir lieu ou passer inaperçue. L'état de la voix pendant la mue, à part quelques cas remarquables, n'est qu'une modification de l'état antérieur; la connaissance de cet état antérieur, de la sonorité et du timbre habituels de la voix de l'enfant, permettra d'apprécier chez lui les changements, au fur et à mesure qu'ils surviennent. Là encore, l'indispensable condition d'une bonne observation est de suivre les mêmes enfants à travers les années de l'adolescence. Il est des enfants, pour qui l'observateur éprouve quelque difficulté à fixer une date à ce phénomène, en apparence si frappant, de la mue de la voix. Chez
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tel adolescent, la modification se fait de façon tout à fait insensible à l'oreille la mieux exercée. Cela paraît venir de ce que la voix est modifiée à la fois dans toute l'étendue de son échelle comme on l'observe fort souvent chez la jeune fille. De là, l'absence de sons discordants et de raucité; le ton devient plus grave par une progression lente et douce, en sorte que le changement peut passer inaperçu de l'observateur le plus attentif. J'ai rencontré dans les écoles des enfants à voix grosse dès leur arrivée, alors qu'ils ne présentaient encore aucun signe de puberté. Qu'il s'agisse d'une mue prématurée ou d'une conformation individuelle spéciale, il n'en résulte pas moins qu'il est à peu près impossible pour cette catégorie d'enfants, de déterminer l'époque à laquelle se montre réellement ce signe de puberté. Chez les n0B 10 et 17 de la série de première ligne (100 enfants de 13 à 18 ans), la mue de la voix a été insensible; elle s'est réalisée sans que j'aie réussi à lui fixer une date. Les autres attributs de la puberté s'étaient montrés entre 15 et 16 ans comme pour le plus grand nombre. La voix « grosse » donne lieu aux mêmes résultats pour les n08 6, 25 et 39 de cette même série. Sur 100 garçons, 70 mues sont constatables ; 5 ne peuvent être constatées; et chez 25, il n'y a pas de mue. Les autres signes secondaires surviennent à des
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époques très variables de l'évolution pubère, en sorte qu'ils ne peuvent être systématiquement utilisés quand il s'agit de déterminer l'époque d'apparition de la puberté.
Saison la plus favorable à Véclosion puberlaire. La saison chaude est plus favorable que la saison froide à l'éclosion pubertaire chez l'adolescent. Sur 100 enfants, il s'en trouve 12 pour lesquels l'apparition de la puberté n'a pas pu être déterminée, soit parce qu'elle était déjà un fait accompli au moment de l'admission à l'école, soit parce qu'elle ne s'est pas manifestée avant la dernière mensuration.
SAISONS D'APPARITION DE LA PUBERTÉ
Nombre d'observations Saison chaude Saison froide Indéterminée
100 53 35 12
La presque totalité des phénomènes pubertaires échappe à qui ne répèle pas semestriellement son observation sur le même enfant. — Il ne suffit donc pas d'examiner l'enfant une seule fois par an, si l'on veut saisir la saison d'apparition de la puberté. L'observation semestrielle est indispensable, aussi bien pour la détermination des signes pilaires que
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pour la détermination du cortège pubertaire. A défaut de l'examen périodique du même enfant, les phénomènes de tous ordres échapperaient aussi, et on ne saurait rien de ce qui a immédiatement précédé et immédiatement suivi l'éclosion pubertaire. L'année, eu égard à ses températures, n'étant pas divisible en moins de deux périodes, la saison chaude et la saison froide, et la mensuration semestrielle avril-octobre, par exemple, en tenant compte, il s'ensuit que les modifications signalées en octobre, sont des changements réalisés pendant la chaleur, changements par rapport aux résultats des mensurations et notations d'avril précédent. Un observateur annuel n'aurait pas revu ses sujets d'octobre en octobre ; les changements, notés par lui, n'en seraient que par comparaison avec les résultats de l'année précédente; les phases de l'évolution effectuées au cours de la saison froide resteraient ignorées. Pour l'observateur annuel, le terme prépubère désigne l'enfant pendant Vannée d'avant, tandis que pour l'observateur semestriel, le même terme s'applique à l'état qui a immédiatement précédé celui auquel s'applique la mensuration actuelle. La différence est considérable. Non seulement à cause des divergences que cela engendre, mais surtout dans l'intérêt de la réalité. Reconnaissons cependant que le qualificatif prédubère peut, avec autant de raison être attribué à
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toute la période de croissance qui s'étend entre la naissance et la puberté. Qu'est-ce que la puberté? Définition de la puberté. — Et maintenant que sont bien déterminées les conditions de son apparition, demandons-nous ce que c'est que la puberté. L'étude comparative des observations semestrielles de mes deux séries péripubertaires (230 enfants de 13 à 18 ans, les mêmes suivis de 6 en 6 mois) constitue la base sur laquelle s'appuient les vues qui vont être développées touchant les phénomènes de la puberté et les phénomènes corrélatifs qui intéressent la direction éducative de l'enfant. Les déductions de cette étude comparative peuvent être fort nombreuses dès que la puberté est envisagée dans ses origines, dans son mécanisme, dans ses effets, comme elle l'est ici. Mais il est essentiel que chacune des déductions procède exactement des faits observés, que chaque induction s'appuie sur ces faits de toute la largeur de sa base. Jusqu'ici, on considérait surtout la puberté comme une phase plus ou moins difficile à traverser, et audelà de laquelle l'enfant, devenu jeune homme, se trouvait en état de procréer. La « physiologie » la qualifiait de « période caractérisée par des modifications sexuelles profondes » (Gley). Les études spéciales récentes la désignent comme la « période post-embryonnaire spécialement consa-
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
crée à l'établissement de la fonction génitale représentant l'homologue humain de la maturité sexuelle des animaux (La Puberté (1906) par le Dr Marthe Francillon). Le Dr Cruchet dans son article Puberté de la « Pratique des Maladies des Enfants » pousse plus loin que la plupart des auteurs l'analyse de la puberté. « En résumé, écrit-il en 1909, nous désignerons sous le nom de « Puberté » toute la période de la croissance qui s'étend de 12 à 15 ans chez la fille et de 14 à 18 chez le garçon, et qui comprend la série des modifications d'ordre physique ou psychique qui ont pour effet de transformer l'organisme de l'enfant en un organisme nouveau, celui de l'adolescent. » Je ne crois pas que nous devions nous contenter des coïncidences que, somme toute, ces divers essais de définition se bornent à constater. Cela ne peut nous suffire à nous médecins, à nous éducateurs. Il nous faut essayer d'aller plus loin, d'utiliser les dernières acquisitions de la science pour remonter aux causes. Si nous réussissions dans cette voie, nous apporterions certainement quelque clarté dans la connaissance de la nature et du rôle de la puberté; dans la connaissance des rapports du germen et du soma. Je vous propose donc de passer tout de suite à la synthèse finale et de définir la puberté d'après sa cause, d'après son caractère et d'après son action :
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Définition de la puberté.
La puberté est cette phase de la croissance où le germen mûr provoque une nouvelle élaboration embryonnaire du soma afin de le mûrir à son tour, et de parfaire ainsi la fonction de reproduction.
Cette définition, si elle est d'accord avec la réalité, doit nous permettre de comprendre les phénomènes pubertaires, non seulement en général, mais encore chez chaque individu en particulier; elle doit aussi nous mettre sur la voie de l'explication de plusieurs d'entre eux. Comprise, et en partie expliquée, la puberté cessant d'être une énigme pour l'éducateur, il dépend de lui d'en faire un point d'appui et d'y trouver un peu de lumière, aux heures difficiles de la direction éducatrice individuelle, ainsi que l'indispensable base physiologique d'une « puberté psychologique » adéquate à la réalité. En attendant, nous allons nous attacher à scruter de notre mieux la nature profonde de ce phénomène et nous ne nous désintéresserons d'aucun des dé tails où va nous entraîner son analyse.
��CHAPITRE VI
LA PUBERTÉ
(suite l)
Analyse de la puberté au moyen des phénomènes de croissance qu'elle détermine. —■ Croissance majorée, croissance réduite ou arrêtée, croissance totale ou apparition d'organes, disparition d'organes, involutions. — Ponction embryogénique de la puberté.
Analyse de la puberté au moyen des phénomènes de croissance qu'elle détermine. — Quand approche l'épo que pubère, la croissance modifie son rythme dans les divers segments. Pl. I, II, III, IV, V, IX, X et XVI. L'activité de l'accroissement est plus grande pour tel tissu, moindre pour tel autre, nulle ou réversiver ailleurs. Certains organes apparaissent de toutes . pièces. Croissance majorée. L'enfant, en devenant pubère, perd beaucoup des éléments qui donnent l'élasticité à ses mouvements; les fibres élastiques deviennent fibreuses, et ce sont des éléments fibreux dont la multiplication grossit les ligaments et les tendons, épaissit les aponévroses. Le tissu conjonctif dont sont constitués les élé"
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ments fibreux forme encore de nombreux autres organes, et jusqu'à des cellules à fonction sécrétoire. Il constitue les travées, les cloisons, les réseaux de soutien de nos viscères. Il fait les méninges (duremère et pie-mère), il fait les séreuses, celles des articulations comme celles des grandes cavités, l'arachnoïde qui revêt le cerveau, comme la plèvre revêt le poumon et le péritoine les intestins. Le tissu conjonctif sous ses divers aspects est le siège d'une augmentation d'étendue et d'épaisseur, d'une hypertrophie physiologique appréciable. Les os longs avaient surtout allongé depuis la naissance, le cartilage de conjugaison jouissant de l'activité supérieure qui caractérise la croissance cartilagineuse pendant cette période. Désormais, ils vont surtout grossir1; ils devront cet accroissement en grosseur à l'activité ostéogène du périoste qui, en sa qualité de tissu d'origine conjonctive, a bénéficié de l'hypertrophie conjonctive générale, et a reçu en abondance des éléments formateurs dont il était médiocrement pourvu jusque là. Les muscles des membres, du tronc, du cou, de la face et du crâne, augmentent dans le semestre de l'apparition de la puberté davantage qu'ils n'avaient augmenté dans le semestre précédent. Le muscle strié du cœur prend, par à coups successifs, plus d'épaisseur, et l'organe entier plus de volume. L'auscultation fréquente, périodique, révèle
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Ce processus est tardif pour le tibia et le péroné (Pl. X,
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chez beaucoup d'enfants les alternances de cet accroissement, qui est en corrélation, du reste, avec l'augmentation de la pression sanguine. Le diaphragme gagne en force par l'hypertrophie de son double élément musculaire et conjonctif, ainsi qu'en témoigne l'ampliation accrue des mouvements respiratoires abdominaux. Les muscles lisses des parois des vaisseaux se fortifient notablement, ainsi que ceux des parois du tube digestif, de l'intestin tout particulièrement. Les organes génitaux externes ne montrent que très peu de changements, au début de la puberté. Les auteurs qui décrivent le notable développement de ces organes et le complètent par une série d'attributs qui en font d'emblée des organes adultes, n'ont pas été à même, bien certainement, de déterminer la période de la puberté à laquelle ils observaient. Cette détermination est, en effet, nous le savons, tout à fait impossible lorsque les enfants, les mêmes, ne sont pas examinés de six en six mois. Pour qui, au contraire, procède ainsi, la puberté se montre beaucoup moins empressée à transformer les organes génitaux externes ; elle y met une année, souvent plus et tout au moins six mois. Les testicules, à défaut de grossissement, prennent tout de suite un peu plus de fermeté. Il est probable que prostate, glandes de Cooper et vésicules séminales s'accroîtront au fur et à mesure de l'obligation que leur en imposera l'activité de la fonction
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de reproduction. Mais, justement par suite des corrélations fonctionnelles qui les relient, il est logique de n'attendre cette hypertrophie des glandes sexuelles qu'au moment où les organes génitaux eux-mêmes témoignent d'une suffisante maturité fonctionnelle. Croissance réduite ou arrêtée. La peau est dans ce cas, sa couche épidermique se renouvelle en épaisseur, mais n'augmente en étendue que faiblement et lentement. En observant le même enfant non pubère semestriellement, on remarque, sur des points déterminés autour de l'articulation du genou, par exemple, que le tégument est relâché, facile à pincer entre deux doigts, et à soulever dans une certaine limite. A l'examen suivant, alors que l'augmentation du poids correspond à un accroissement normal, sans adjonction de tissu adipeux, on voit, au même niveau la peau tendue, plus ou moins difficile à pincer, mais bien loin en tous cas, du relâchement noté au semestre précédent. C'est un effet de l'alternance de l'accroissement de la peau. Quand vient, chez ce sujet, le moment de l'éclosion de la puberté, il arrive que la tension de la peau, et la chose est plus manifeste au-dessus des genoux qu'ailleurs, se soit encore accrue. C'est que, sans doute, le membre inférieur s'est allongé anormalement et brusquement; cela peut aller jusqu'à la rupture des éléments élastiques (Troisier et Ménétrier) de la peau, rupture qui se fait suivant une ou plusieurs lignes transversales sus-rotuliennes, et laisse
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après elle une ou plusieurs bandes blanches appelées « vergetures de croissance ». Même réduction du développement pour le tissu nerveux, dont l'élément noble approche, à l'heure pubère, du terme de son accroissement, tandis que l'élément conjonctif, qui l'entoure et le pénètre, bénéficie plus ou moins de l'hypertrophie conjonctive générale. Le cerveau, d'après les tableaux de Vierordt et de Boyd, atteint son plus haut poids moyen entre 15 et 16 ans : Vierordt (Daten und Tabellen), trouve à 21 ans (âge adulte moyen de ceux qui ont fait leur puberté à l'âge moyen de 15 ans Va) que Ie poids moyen du cerveau ne dépasse pas 1412 grammes, tandis qu'il atteint 1490 grammes à 15 ans dans le sexe masculin. Dans le sexe féminin, le même auteur trouve le maximum 1345 à 14 ans et seulement 1228 à 20 ans. La statistique de Boyd (1861) citée par Manouvrier dans son article : « Morphologie générale du cerveau » du Dictionnaire de physiologie de Charles Richet, donne : de 20 à 30 ans, 1357 grammes, et de 14 à 20 ans, 1374 grammes chez l'homme. Pour la femme adulte, 1238 gr., tandis que la jeune fille de 15 à 20 ans atteint 1244 grammes (poids cérébral). De ces deux statistiques il résulte évidemment que le maximum du poids cérébral est atteint au moment de la puberté. Les tables de Vierordt sont encore plus
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catégoriques que celles de Boyd, parce qu'elles précisent l'âge et montrent mieux l'abaissement du poids du cerveau au delà de la puberté. La réduction post-pubertaire de l'accroissement du tissu nerveux intéresse les nerfs périphériques comme elle intéresse les centres. Croissance totale. Apparition d'organes. Les poils du pubis et de l'aisselle naissent de toutes pièces. Leur émergence, à la surface de la peau de ces deux régions limitées, et cela dans les deux sexes, a permis de l'utiliser comme signe d'approche, puis d'éclosion de la puberté. Les premiers poils qui errent à la surface du corps sont des poils follets, poils dépourvus de moelle, et munis de grosses glandes sébacées. A un moment donné, ces poils tombent, et la pousse des poils définitifs commence, poils à moelle, poils de la même sorte que ceux qui se montreront plus tard au visage. Clairsemés d'abord, ils méritent la notation P 1 puis successivement les puissances 2 et 8 de P, au pubis, où ils se voient d'abord. Nous savons que c'est : à ce moment que se montrent les poils du creux axillaire, A \ tandis que la mue de la voix, autre phénomène de croissance, s'était réalisée quand P avait la puissance 2. Nous avons vu encore que les poils n'apparaissent pas toujours en même temps dans les deux aisselles, inégalité qu'on notera toujours en raison de ses corrélations possibles avec l'état du poumon correspondant à l'aisselle retardataire.
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Il m'est arrivé de rencontrer quelques cas de tuberculose pulmonaire chez des jeunes gens qui avaient présenté ce phénomène, le poumon tuberculisé le premier répondant à la pousse tardive. Observez soigneusement, car il faut réunir beaucoup de faits de ce genre avant d'affirmer en pareille matière. Un autre exemple de croissance totale est donné par le corps thyroïde, où s'organise, autour des vésicules, un véritable réseau de vaisseaux lymphatiques qui se substituent aux vaisseaux sanguins dans leur rôle de canaux d'excrétion de la substance colloïde. Ce fait, dont l'interprétation physiologique reste assez obscure, se traduit par une activité nouvelle de la fonction thyroïdienne et par divers phénomènes organiques qui paraissent s'y rattacher. Cela suffit pour que l'éducateur retienne que la glande thyroïde entre dans une phase nouvelle de son rôle organique, à dater de l'éclosion de la puberté, et qu'il fera bien de suivre, en vue de les signaler au médecin le cas échéant, ses variations de volume. Disparition d'organes. Inuolutions. Autre chose est de considérér des phénomènes de cet ordre comme des coïncidences avec ceux qui précèdent et avec la puberté elle-même, autre chose est de les rattacher à une cause commune et de montrer que l'objectif est bien toujours, quoique indirectement, la convergence de toutes les ressources organiques vers la réalisation de la fonction de reproduction.
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L'évolution du thymus en témoigne de façon bien intéressante. L'observation sur les animaux m'a démontré en effet que le volume du thymus et celui du testicule sont inversement proportionnels pendant la phase « immature », et il en est de même chez l'homme avant la puberté, ainsi que j'ai pu le constater chez des enfants dont le thymus possédait un lobe cervical appréciable au toucher. Cela donne un sens à la régression thymique, et explique dans une certaine mesure le rôle de ce corps lympho-épithélial, son rapport avec l'activité chondroplasique, avec la richesse en myéloplaxes de la moelle osseuse; et on s'explique un peu que le thymus rétrocède au moment où s'effectue l'éclosion fonctionnelle du testicule où s'accusent le caractère et l'influence des cellules interstitielles, au moment où se produit dans la glande thyroïde une transformation incontestablement favorable au rôle qu'elle semble appelée à jouer désormais. Le thymus est vascularisé avant le 3me mois (Prenant). Il entre en fonctions dès cette époque. On avait fixé à l'âge de deux ans le commencement de sa régression. Cela est individuel. Mais, en général, son volume diminue et la dégénérescence graisseuse de certains de ses éléments s'effectue au fur et à mesure qu'augmentent le volume et la consistance du testicule, pour s'achever vers l'époque à laquelle le germen termine son évolution. Le groupe d'organes lymphoïdes appelé amygda-
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les, «follicules clos», subit une pareille régression quoique plus lente, et ne paraissant pas dépendre au même degré du développement testiculaire, mais peut-être plutôt de celui des paraganglions autant que me permettent de le croire certains faits d'observation. Dans ces amygdales, répandues à toutes les hauteurs du tube digestif, mais qui se montrent plus volumineuses au niveau de la portion supérieure du pharynx, s'ébauche l'étouffement par le tissu conjonctif interfolliculaire, qui devient de plus en plus fibreux, des follicules clos qu'elles renferment, et où commence, dès lors, la dégénérescence graisseuse. Fonction embryogénique de la puberté. Par ces phénomènes de croissance totale, de croissance majorée, la puberté fait montre d'un pouvoir « embryogénique ». En dehors de la puberté, il est un phénomène d'apparition d'organes, celui de la pousse des dents, qui semblerait témoigner que le pouvoir embryogénique, au cours de l'ontogénie post-fœtale, n'est pas le propre de la puberté. Ce serait toutefois une fausse interprétation du développement dentaire, qui est un phénomène continu depuis le 2me mois de la vie intra-utérine, jusqu'à l'âge adulte, mais dont nous ne jugeons qu'à l'heure où est franchie la muqueuse des gencives. Chose bien remarquable, l'évolution dentaire offre trois phases comme l'évolution des variations pré-
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sentées par les proportions de longueur et de largeur du corps, et les trois phases de ces deux processus se confondent absolument. En d'autres termes, les phases de l'évolution dentaire s'ajoutent aux phases de l'évolution des proportions pour caractériser les périodes, les âges d'évolution, tels que nous les avons délimités (v. page 48). La première phase : de la naissance à 6 ans et lre dentition ; La deuxième phase : de 6 ou 7 ans à 15 ans et 2me dentition ; La troisième phase de 15 ans à l'âge adulte et fin de la dentition; c'est-à-dire les 4 deuxièmes molaires et les 4 troisièmes quand ces dernières qui sont dites « dents de sagesse », ne demeurent pas emprisonnées dans leurs alvéoles. L'évolution dentaire est donc bien un reflet de l'évolution générale du soma (Profr Baumel) dont elle partage le processus de croissance, conformément aux lois posées par Magitot (Dict. encyclopédique des Sciences médicales, lre série, tome XXVII). La période pubertaire répond à sa dernière phase, comme pour le soma, et c'est à cela que se limite son action. Mais il est une autre catégorie de phénomènes qui sont réellement un effet et une preuve du caractère embryogénique de l'influence pubertaire. Je veux parler de l'accroissement inégal, qui résulte de la nature différente des tissus qui entrent dans la constitution d'un organe et de l'activité de croissance
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différente dont ils sont le siège. En d'autres termes, dans un même organe, le jeu des croissances majorées, des croissances réduites et des croissances arrêtées, crée des inégalités du genre de celles qui ont été observées aux premières heures de la vie. Chez l'embryon, ces irrégularités de l'accroissement avaient pour but de construire des organes. Aujourd'hui que les organes sont formés, le but de l'accroissement inégal ne peut être que d'achever leur perfectionnement, de rendre leurs fonctions plus aisées et mieux en harmonie avec les nouveaux besoins de l'être humain désormais pubère. Dans tout organisme normal, l'accroissement inégal est réglé à la puberté par la loi des alternances. Quand l'équilibre organique est troublé, l'accroissement inégal peut échapper à la loi des alternances et déterminer l'état pathologique.
��CHAPITRE VII
LA PUBERTÉ
(suite
2)
Influence de l'alirnentatation par le placenta : puberté précoce, puberté tardive. — Quelques conditions somatiques de la puberté psychologique (un exemple). —Séparation des pubères et des non pubères.
Influence de l'alimentation par le placenta. — Le placenta transmet à l'enfant des éléments de nutrition sans doute modifiés par le travail spécial que subit dans cet organe le sang maternel, mais non pas doté de ce qui lui manque. Que la mère, anémique, pâle et débile, citadine nerveusement entretenue dans le cycle des occupations de la ville, privée d'ailleurs de toutes les conditions d'espace, d'air, de lumière et d'activité physique qui font vivre puissamment jusqu'aux ongles et aux cheveux, que la mère, en un mot, sans être positivement malade, soit le contraire d'une femme vigoureuse, alors, la nutrition placentaire de l'enfant aura toutes chances d'être mauvaise. Il en est de même du reste, dans le cas où une
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femme bien charpentée et de belle santé habituelle, commet imprudences sur imprudences à partir de la conception; dans le cas où, pendant le cours de la grossesse, les plaisirs et les sports se partagent sa vie : voyage de noces, courses en montagne, skis, autos, motos, traversées mouvementées, etc.... Une maladie infectieuse de la mère pendant l'évolution embryo-fœtale a le plus souvent les mêmes effets; lesquels d'ailleurs peuvent fort bien être provoqués par une simple chute au cours de la grossesse. La nutrition mauvaise par le placenta peut avoir maints effets immédiats et médiats, et se trouver singulièrement renforcée par la nature de l'alimentation après la naissance. Puberté précoce; puberté tardive. —Mais il est un effet à distance sur lequel on peut à peu près compter. C'est le retard de l'apparition de la puberté. Il n'y a rien là qui doive surprendre I Ne savons-nous pas que cette période embryo-fœtale est celle de la constitution de la lignée séminale et de la lignée somatique, que de leur nutrition à ce moment dépend l'allure de leur évolution, et que, à partir de la constitution du placenta, le germen se trouve sous la dépendance nutritive du soma. Cela suffit pour comprendre qu'une mauvaise nutrition placentaire puisse déterminer une puberté tardive, et que la précocité pubertaire soit le résultat d'une bonne alimentation intra-utérine.
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On trouve rarement deux frères jumeaux qui fassent leur puberté au même âge. Ce fait n'est point passé inaperçu du médecin qui s'est trouvé à même de voir naître et de suivre, jusqu'au delà de leur formation, les deux produits mâles d'une grossesse gémellaire. Je ne mets pas à part les jumeaux dits : «identiques », car cette identité ne résiste pas à l'observation physiologique et clinique complétée par l'examen anthropométrique par lequel sont déterminées les conditions anatomiques. Car les différences que l'on a tendance à considérer comme réservées à des jumeaux de sexe différent, en matière de qualités physiques extra-génitales, ainsi qu'en matière de proportions des divers segments du corps, existent tout aussi bien, à quelques très rares exceptions près, chez les jumeaux de même sexe dits identiques. Les cas de frères jumeaux, devenant pubères à des âges différents et ayant été élevés sous le même toit, sont assez nombreux pour atténuer notablement l'influence attribuée à la race, à l'hérédité, au climat sur l'avance ou le retard de l'heure pubère. Garn. Adr. fait sa puberté à 14 ans; Garn. Eug., son frère jumeau, fait la sienne à 17 ans. Parmi les jeunes gens des écoles que j'ai suivis comme eux de l'âge de 13 ans jusqu'à l'âge de 18 ans, j'en pourrais citer d'autres exemples et j'en ai noté également dans les familles. Les cas de frères non jumeaux, mais du même père et de la même mère, qui ont grandi côte à côte et
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ont reçu la même alimentation pendant la première année de leur existence, témoignent dans le même sens. Or, des deux jumeaux, celui qui se formera le dernier, est précisément celui qui, à sa sortie de l'utérus, était le « moins nourri ». Cette nutrition utérine défectueuse retentit, nous le savons, sur la puberté par une double voie. Le germen a été médiocrement nourri à la période même de la constitution de la lignée séminale, et c'est le point capital. En outre, la lignée somatique, au moment de sa constitution, a souffert, elle aussi, de cette nutrition défectueuse dont ne cesseront pas de se ressentir les apports nutritifs du soma aux cellules de Sertoli. Cette influence indirecte s'ajoutera, pour la lignée séminale, à l'influence qui s'exerce directement sur elle, et la conséquence nécessaire est le retard de sa maturation. Telles sont les diverses raisons physiologiques qui conduisent à attribuer à l'alimentation placentaire l'influence prépondérante sur l'âge d'apparition de la puberté. Des influences, d'ordre pathologique, tant extra qu'intra-utérines, s'exercent parfois aussi, et se montrent capables, à divers moments, de renforcer ou d'atténuer cette cause primordiale : telle est l'influence d'une tumeur du testicule qui peut provoquer dès l'âge de 9 ans 1/2 la puberté avec ses attributs physiques et moraux, puberté qui disparaît
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avec la tumeur et ne laisse aucune trace quatre mois après l'ablation de cette dernière avec le testicule atteint. Tous les poils pubiens et axillaires sont tombés et la voix elle-même est redevenue voix d'enfant (cas du Dr Sacchi, rapporté par Marro). Ce fait montre bien que le germen est « cause » de la détermination pubertaire. Il montre encore le caractère embryonnaire des phénomènes pubertaires provoqués par le germen. Parmi les troubles dus à la présence de la tumeur et à son développement, figurait nécessairement une notable suractivité nutritive. Il se peut que ce soit le bénéfice de cette suractivité locale qui ait procuré au germen le pouvoir précoce dont il a fait preuve. Un examen microscopique eût sans doute fait reconnaître la présence de spermatozoïdes dans les conduits de ce testicule néoplasié. La puberté est donc bien affaire purement germinale, et la maturité du germen lui-même, affaire de nutrition. Les observations du Dr Gandy prouvent, de leur côté que, pour le maintien des attributs dont la puberté a doté le soma, il est nécessaire que le germen subsiste. Dans le cas du Dr Sacchi, la suppression du germen accidentellement mûr du testicule néoplasié a entraîné la disparition de tous les signes du pouvoir reproducteur prématurément apparus, mais n'a point influencé l'évolution naturelle du
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garçon vers sa puberté normale, parce qu'il restait, avec l'autre testicule, un germen sain. Tandis que la suppression totale du germen, à un moment quelconque de la période virile expose à un retour en arrière, à une réversion, c'est-à-dire à la perte des caractères sexuels secondaires qui avaient formé cortège à la puberté. La présence ou l'absence de ces caractères déterminent des états profondément différents. Ces cas pathologiques le démontrent d'une façon saisissante, en raison des âges auxquels les changements surviennent, et parce qu'ils apparaissent sans transition. Mais, sous réserve des transitions, il n'en va pas autrement pour l'enfant sain et la différence est complète entre un enfant qui n'a pas fait sa puberté et un enfant pubère, fille ou garçon. Quelques conditions somaliques de la puberté psychologique (un exemple). — Il y a quelques années se présentaient à ma consultation du mardi, deux frères accompagnés par leurs parents. Tous deux avaient 17 ans, ils étaient jumeaux. La famille était perplexe. La carrière diplomatique s'ouvrait exceptionnellement large pour l'un comme pour l'autre, mais un seul des deux montrait pour elle ce qu'on est convenu d'appeler des aptitudes. D'ailleurs, les différences entre les deux frères étaient multiples et profondes, et cela n'échappait pas au père et à la mère qui en prenaient beaucoup d'inquiétude.
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De ces deux garçons de 17 ans, l'un se comportait comme un homme, l'autre comme un gamin, et cela en toutes choses. A 12 ans, dit le père, mon fils Georges avait presque perdu déjà les habitudes d'enfantillage qui surprennent chez Jacques à 17 ans ! Nous l'avons fait examiner sérieusement, on nous a certifié que sa constitution était bonne, et que son état mental n'avait rien d'anormal. Ses professeurs lui reconnaissent une réelle intelligence, une mémoire facile, mais ils se plaignent de son extrême légèreté. Les vêtements des deux jeunes gens retirés, ce qui n'avait pas été fait aux visites précédentes, me dirent les parents, il fut évident pour le père comme pour moi que Georges était pubère et que Jacques ne l'était pas. Chez Georges, la puberté s'était faite aux environs de l'âge de 12 ans. Il y avait cinq ans de cela. Georges était maintenant un adulte, tandis que Jacques, de même âge et de même taille, n'était encore qu'un enfant. Georges était nubile, Jacques n'était pas encore pubère. J'étais en présence de deux individus de même âge, et pourtant l'un était un homme, et l'autre n'était pas même un jeune homme. Ils avaient une stature égale et leur poids était très voisin ainsi que la circonférence de leur thorax. Quelle combinaison de ces trois mesures était capable de renseigner sur la valeur physique de ces jeunes gens ? Ils faisaient face d'une façon très inégale à un effort un peu prolongé ; non seule-
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ment l'adulte offrait une résistance bien supérieure, mais il pouvait, après un bref repos, reprendre le travail interrompu, ce que ne pouvait faire son frère jumeau, qui avait besoin de prolonger la période de repos pour retrouver ses jambes, ses bras, son énergie. Les trois mesures, taille, périmètre et poids ne nous avaient rien appris sur ces jeunes gens, pas plus sur leur valeur physique que sur les causes des différences profondes qui régnaient entre eux. La puberté à elle seule nous en avait déjà fait connaître davantage et nous avait fourni des renseignements sur les divergences de leurs deux individualités. L'examen anthropométrique, physiologique et clinique nous montra que les proportions chez Jacques étaient encore des « proportions prépubères », c'est-àdire qu'elles répondaient aux rapports intersegmentaires que l'on rencontre chez les enfants qui touchent à la période pubère. Je pensai que la puberté se ferait normalement, malgré son retard, en raison des conditions régulières de l'état général, ainsi que des évolutions partielles, du côté des testicules, du côté des dents, etc. Le crâne était proportionnellement petit, même pour un macroskèle comme Jacques; les membres étaient trop longs, relativement au buste, rapport qui est à sa place, il est vrai, à la veille de la puberté. Je ne pus rien dire des menaces de l'accroissement inégal, parce que je n'avais pas suivi ce jeune garçon depuis l'âge de 8 ou 10 ans de semestre en semestre,
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et que les appréciations, dans cet ordre d'idées, ne sont que le résultat de la comparaison entre elles des dimensions d'un même segment aux semestres successifs. Les muscles étaient moyens, et la respiration avait conservé l'ampleur de celle de l'enfance; elle était plus transversale que verticale, tandis que chez le frère jumeau elle était plus verticale que transversale, ce qui est un caractère de l'adulte. Je pouvais, en toute conscience, rassurer les parents et leur faire prévoir une transformation à brève échéance, transformation germinale avec ses conséquences somatiques et cérébrales, sans toutefois en préciser la portée au point de vue des ressources organiques et de l'énergie, parce que je n'avais pas suivi l'enfant depuis un certain nombre de semestres. Avant l'échéance pubertaire, il fallait se bien garder de prendre une décision relative à son avenir, et ne point désespérer. Et en effet, la puberté ne tarda pas à se faire et à changer l'enfant en homme, à tous les points de vue. L'orientation des idées de ce grand garçon, incontestablement intelligent, avait été fortement influencée par les contacts que son âge et sa taille lui avaient imposés avec ses camarades pubères. Il avait vécu de leur vie, il avait voulu faire comme eux, lui qui n'avait pas atteint la même phase d'évolution et ne possédait pas encore les attributs génitaux, physi-
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ques et mentaux dont ses camarades et jusqu'à son frère jumeau étaient déjà dotés. L'harmonisation objective, l'effort d'action s'étaient trouvés fatalement en contradiction avec les ressources, avec les possibilités de ce non pubère. Séparation des PUBÈRES et des NON PUBÈRES. — De pareilles circonstances il naît un malaise qui a pour effet appréciable l'instabilité. Vous concevez le danger auquel est exposé un enfant qui est placé dans un milieu d'enfants possédant des attributs qu'il ne possède pas lui-même ! Quels efforts vains cela provoque chez lui; quel égarement s'ensuit dans le domaine mental; quelles tendances cela développe à chercher hors de lui ou dans la rêverie ce qu'il ne peut réaliser avec les moyens qu'il a à sa disposition, et ce vers quoi, cependant, il est poussé parles exemples qui l'entourent et par le besoin de se hausser jusqu'à ceux qui affectent, à son égard, des allures de supériorité qu'il a hâte d'imiter pour ne plus en souffrir. Cet exemple, que je souligne en passant, vous indique déjà par où la puberté psychologique est plus complexe ou peut-être plus simple qu'on ne l'a décrite, et laisse entrevoir à votre sagacité avertie les conditions qu'exige l'observation pour bien voir et bien comprendre. Pédagogiquement, il est en tous cas une conclusion qui s'impose, c'est la séparation des pubères et des non pubères. La culture intellectuelle s'y trouve aussi intéressée que la culture morale.
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Au delà de l'école maternelle, continuez à réunir, si vous le voulez, filles et garçons. Mais, par une étroite collaboration avec le médecin et éclairés vous-mêmes par les signes secondaires, guettez attentivement l'apparition de la puberté. Dès qu'elle se montre chez un écolier ou une écolière, faites passer dans la catégorie des pubères cet organisme modifié; ne tenez pas compte de l'âge. Ne voyez pas non plus d'obstacle dans la multiplication des cours. L'autorité administrative avertie prendra les mesures nécessaires pour rendre votre tâche possible dans l'intérêt des petites individualités qu'elle vous confie. Mais, me direz-vous, les frères pubères et non pubères vivent ensemble sous le toit paternel ! A ce compte, le même toit abritant en permanence filles et garçons dans le milieu familial, à quoi bon vos écoles distinctes pour chaque sexe ? C'est qu'il règne au foyer un sentiment spécial qui y naît et en sort rarement, c'est le sentiment de la protection due au petit par le grand, au jeune par l'aîné, au faible par le fort, à la fille par le garçon. En dehors de la famille, n'y comptez pas, tout en vous appliquant de tout votre pouvoir à le développer ou à l'entretenir, et n'hésitez pas à opérer la sélection pubertaire. Ses effets sont incalculables. Les fac-similé familiaux de Bedales, d'Abbotsholmes, en Angleterre, où le professeur, sa femme et ses enfants groupent autour d'eux dans une habitation isolée une vingtaine d'écoliers, s'élève de cent
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coudées au-dessus des meilleurs internats. E. Demolins l'a bien compris quand il a fondé l'Ecole Nouvelle, quoiqu'il n'ait pu que se rapprocher de cet idéal. Mais il reste un abîme entre la mentalité qui préside aux relations fraternelles et celle qui préside aux relations des écoliers entre eux, même au sein de ces écoles familiales. D'où la nécessité, là comme ailleurs, de la sélection pubertaire.
�CHAPITRE VIII
LA PUBERTÉ
(suite
3)
Durée de la période de puberté; signes de début, signes de terminaison. — Période internubilo-pubertaire ou de jeunesse (jeune homme, jeune fille). — Distance de la puberté à la nubilité ou état adulte. — Quelques considérations éducatives touchant ces périodes. — Synthèse des rapports de l'élément reproducteur et de la croissance : phases de la vie en fonction de la reproduction. — Influence sur la croissance de la suppression traumatique du germen (eunuque).
On ne s'imagine pas dans le monde, et souvent même parmi nous, éducateurs ou médecins, quel passé révèle un retard de la « formation », et quel lendemain il prépare. Il en résulte une ignorance complète des devoirs qu'il impose, telles que la préparation de la puberté, la préparation de la phase post-pubertaire, l'utilisation des moments éducatifs des divers organes pour les cultures générale ou spéciale, physique ou intellectuelle. Où donc l'éducateur peut-il s'instruire de la place exacte qu'occupe la puberté dans une évolution d'enfant ? Où donc peut-il trouver des notions relatives à sa durée, à la distance qui la sépare de l'âge adulte ?
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Ce sont là cependant des renseignements qui sont loin d'être indifférents à la direction éducative, car ils concernent les conditions mêmes de l'influence de la puberté. Mais la croissance n'avait point encore été étudiée à ce point de vue, bien qu'on ne puisse attendre que d'elle des informations précises sur ces importantes questions. Or l'âge de la prise de possession de l'organisme par la puberté varie avec chaque individu. — Le motif principal, nous l'avons appris, est la qualité de la nutrition placentaire. Durée de la période de puberté ; signes de début, signes de terminaison. — Quant au temps que met la puberté à s'installer, il est le même chez tous les enfants réguliers à peu de chose près, soit deux années. Au moment de l'apparition, on a noté pour la croissance pilaire du pubis et de l'aisselle P 3 A 1. En suivant les mêmes enfants, on note ultérieurement P4 A1, puis P 4 A 2, enfin P 5 A 3, ou A 4, ou A s.... A cette dernière notation, P 5 A 3 (ou A 3 ou A 4) l'installation de la puberté est chose accomplie. Deux années se sont passées depuis l'apparition, et si l'enfant avait alors 15 ans ]/2, il en a 17 1/2 à l'heure actuelle. Pendant ces deux années, la croissance a progressé d'une manière un peu spéciale sous l'influence de la nouvelle impulsion que le soma vient de recevoir du germen. Le taux de l'accroissement en longueur
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s'est un peu abaissé, et l'enfant a commencé à s'étoffer, à augmenter ses dimensions de largeur et de grosseur; ses muscles se sont épaissis, le segment troncal de son buste, le tronc, où sont groupés les organes viscéraux transformateurs et distributeurs, a gagné de l'ampleur et sa capacité, qui est proportionnellement réduite depuis sa naissance, a commencé à reprendre plus de place dans l'organisme. Désormais, le tronc ne cessera plus de gagner en étendue jusqu'à la fin de la croissance (v. lois de croissance p. 126 et 135). Période internubilo-pubertaire ou de jeunesse. — Dislance de la puberté à la nubiliié. Au lendemain de la clôture de la phase pubertaire l'accroissement subit un ralentissement très notable, et d'autant plus sensible qu'il suit de près les majorations qui caractérisent la puberté, la première année de son évolution, surtout. Pl. I, II, IV, V, XV et XVI. Il y a réduction du taux des accroissements, mais l'organisme continue cependant à croître dans tous les sens : toutes les dimensions pourraient figurer dans un tableau destiné à faire ressortir les augmentations de la période internubilo-pubertaire; mais elles apparaîtraient aussi avec les réductions fort inégales qui ont atteint leur accroissement, faisant pressentir les changements qui en résultent dans les proportions du corps. Quelques mesures répondant aux principales dimensions du corps sont à rapprocher des mêmes mesures relevées chez l'adulte, et font bien saisir la
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
différence entre l'état de l'enfant à la fin de sa puberté et son état adulte. Les voici groupées en un court tableau :
Enfant moyen îl la fin de sa Adulte puberté (P5AB) moyen Différence
Poids (du corps nu) 56 Largeur (diam. thorac. transvers.) ... 258 Epaisseur (diam, thorac. antéro-post.)... 191 Grosseur (circonf. de la cuisse niaxima) 481 Longueur (taille, vertex debout) 1636
64 269 199 506 1659
8 kilos 11 millim. 8 — 25 — 23 —
A une époque de la vie où le tissu adipeux, la graisse, ne tient encore qu'une place négligeable, chez la grande majorité, ces 8 kilos à acquérir représentent une importante amplification des tissus; l'allongement de la stature ne devant pas dépasser 23 millimètres, c'est surtout l'euryplastie, c'est-à-dire la largeur, l'épaisseur, la grosseur qui gagneront. La grosseur augmentera de 25 millimètres. L'enfant moyen grossira donc davantage qu'il ne grandira pendant cette période et cela, sans participation appréciable du tissu adipeux. Embrassant la période entière de l'enfance, on voit que l'enfant moyen, entre 13 ans 1/2 et Y âge adulte, accroît son poids de 27 kilos, sa largeur de 51 millimètres, son épaisseur de 40, sa grosseur de 96 et la longueur de son membre supérieur total de 115, tandis que sâ stature allonge de 207 millimètres. Si l'on rapporte à cette crue globale, considérée dans chaque catégorie comme égale à 100, chacun
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des accroissements annuels de cette même période, on se rendra compte de la part proportionnelle d'accroissement qui reste à réaliser au delà de 17 ans 1/2. Ce tableau qui est intéressant, mais offre une certaine complexité, peut être ramené aux fractions approximatives suivantes, ce qui rend sa lecture plus facile. Etant admis que, de 13 ans 1/2 à l'âge adulte, la croissance de l'enfant avait à gagner, dans chacun des sens envisagés, un certain nombre de millimètres, et que, dans chacun de ces sens, nous évaluons à 100 ce gain total, combien de centièmes le jeune homme de 17 ans a-t-il à acquérir pour être adulte ? Le garçon pubère de 17 ans, pour devenir un adulte doit gagner : — poids — largeur . . . — épaisseur . . — grosseur. . . — taille (longueur) — longueur du membre supérieur
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/10o ou
V3
environ
23
/100 ou 1/4
—
De la fin de la puberté à l'âge adulte, le poids a davantage à acquérir qu'il ne l'a fait au cours de l'année la plus active entre 13 et 18 ans. Il en est tout autrement de la taille, dont la part proportionnelle d'accroissement à fournir est inférieure à celle de l'une quelconque des années prépubertaires et pubertaires. Quant aux autres dimensions, elles n'ont à fournir que le grandissement proportionnel
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
d'une bonne année moyenne, et elles ont trois ans pour cela. En effet, en tenant compte de la réduction progressive du taux d'accroissement, on arrive à évaluer à trois ans le temps nécessaire à l'achèvement du développement du jeune homme moyen, soit cinq ans à partir de l'éclosion de la puberté. Ainsi le garçon pubère (15 ans deviendrait adulte à 21 ans (20 ans 1j2). Cela est admissible, car, au régiment, il est exceptionnel d'observer des accroissements importants, réserve faite des engagés volontaires de 18 à 19 ans. J'en ai acquis la certitude en mesurant un grand nombre de soldats à leur arrivée au corps et à la veille de leur libération. A son tour, le soma a achevé son développement. Le voici en état de prêter un concours parfait au germen, en vue de la reproduction : c'est la nubilité accomplie, physiologiquement parlant. Mais vous êtes des éducateurs, et il vous appartient de distinguer la nubilité biologique et la nubilité sociale : « la nubilité (biologique), ainsi entendue, n'est que l'aptitude au mariage envisagée du seul point de vue biologique. Au point de vue sociologique et moral, le mariage implique des conditions et une maturité qui rendent la question de nubilité beaucoup plus complexe (Manouvrier). » Ainsi donc, la puberté met deux ans à s'installer. Le perfectionnement du soma, ou période internubilo-pubertaire, dure trois ans; c'est donc cinq ans
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à partir du moment de l'apparition de la puberté, de P 8 A \ qu'il faut au jeune garçon pour faire une homme nubile, un adulte, un reproducteur aussi parfait que le lui permet son conditionnement individuel. Quand vous savez que la notation P 3 A 1 est inscrite sur la fiche individuelle de votre fils, ditesvous, parents, que dans cinq ans il sera nubile. A-t-il 15 ans 1j2, quand est noté P3 A1, dès 20 ans V2 il sera nubile, s'il atteint P 3 A 1 à 17 ans seulement, il ne réalisera sa nubilité qu'à 22 ans. Lorsque, au contraire, la puberté éclôt dès l'âge de 12 ans, votre fils fera un adulte à 17 ans. Et si vous voulez bien vous souvenir qu'il y a là autre chose qu'une question de développement physique, autre chose qu'une croissance purement somatique, vous reconnaîtrez que cette notion a droit à toute votre diligente attention. Sur ces cinq années, étendues de l'éclosion de la puberté à la réalisation de la nubilité, les trois dernières, surtout, répondent à la phase à laquelle convient plus qu'à toute autre le nom de jeunesse. Le garçon pubère est devenu un jeune homme. Dans le sexe féminin, d'après les auteurs et mes observations, on peut estimer à cinq années également la distance qui sépare la puberté de la nubilité, et considérer que la fillette est une « jeune fille » deux ans après l'éclosion pubertaire. Cinq ans après l'apparition des premières menstrues, la jeune fille est nubile; elle est une femme.
8
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
Quelques considérations éducatives touchant ces périodes.-— Les jeunes gens sont moralement et cérébralement, au lendemain de la puberté, ce que les fait la lutte dont ils sont le théâtre. Chez l'animal, le plus souvent, la période internubilo-pubertaire n'existe pas. Quand l'animal est « mature » il est tout à la fois pubère et nubile. Il y a cependant des exceptions. La phase de jeunesse doit être le triomphe de l'éducation; elle peut en être la faillite. Il faut que la préparation éducative ait été telle que, chez le jeune homme, tout tende à perfectionner ses ressources individuelles dans le sens précis de la place qu'il veut occuper dans la société, pendant que song soma achève lui-même le perfectionnement qu'exige [une fonction reproductrice vraiment utile à la race. La « jeunesse » juge l'éducation de Y enfant. La jeunesse est le carrefour où se rencontrent le tempérament, l'éducation et la vie. Il dépend en grande partie de l'éducation qu'elle soit heurtée et pénible, ou faite d'harmonie et d'aisance. Synthèse des rapports de l'élément reproducteur et de la croissance. — La phase pubertaire est, ainsi que nous venons de le voir, un moment du développement humain où le pouvoir germinal oriente toutes les forces de l'organisme vers la fonction de reproduction. Elle avait imprimé une première impulsion générale dès l'œuf.] Douze ou quinze ans plus tard, elle donne une
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PHASES DE LA VIE EN FONCTION DE L'ÉLÉMENT REPRODUCTEUR
I
le germen issu de la reproduction. Période constitutive des éléments de la lignée séminale La lignée séminale achève sa constitution et végète i(naissance). Vie agénitale, sommeil du germen. La lignée séminale achève son évolution réveil du germen : PUBERTÉ Période internubilo-pubertaire. Le germen mûr attend la maturité du soma. Maturation du facteur somatique de la reproduction. Nubilité. Plénitude de la fonction de reproduction Extinction de la lignée séminale ... Vie agerminale
s
PHASE EMBRYO-FŒTALE
ENFANCE
1
JEUNESSE
PHASE ADULTE
'
VIEILLESSE
Continuité de la vie du germen par la descendance. Le terme adolescence est admis pour désigner la dernière phase de l'enfance, la phase péri-pubertaire.
1
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
seconde impulsion plus spéciale. Le soma est constitué, et l'objectif est rapproché, mais l'impulsion est analogue. En réalité, l'évolution de la fonction reproductrice tient sous sa dépendance la vie entière du soma. Elle lui impose ses phases naturelles par le cadre qu'elle leur donne. Voilà en un tableau, p. 115, les rapports des phases de la vie avec la fonction de reproduction, où l'on voit qu'à chacune des périodes de l'évolution du germen correspond une période si fortement caractérisée de la vie qu'il est impossible de se la représenter autrement délimitée. La croissance nous a fait connaître les effets de l'impulsion pubertaire imprimée au soma par le germen. Elle nous a montré ce que le soma avait à parcourir pour réaliser les conditions les meilleures dont il soit capable dans son rôle de facteur de la fonction de reproduction. Influence sur la croissance de la suppression traumatique du germen (eunuque). — Nous aurions intérêt à savoir ce qui se passe, comment le soma se comporte quand le germen disparaît avant l'âge pubertaire, et que, conséquemment la puberté ne se fait pas. Nous le voyons chez l'eunuque, et en particulier chez ces Skoptzy, cochers, dont parle M. Pittard, dans ses importantes études sur les Modifications anthropométriques apportées par la castration (Bulletin de la Société des Sciences deBucarest, nos3-4; 1903) «....D'au-
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très vont à Jassy ou à Bucarest exercer la profession de cochers.... on les reconnaît très facilement à leur face bouffie, glabre, à leur voix de femme.... «.... Lorsqu'ils sont assis sur le siège de leurs voitures, on ne peut que difficilement se figurer leur haute taille. C'est que celle-ci est faite principalement de l'allongement exagéré des jambes. « A plusieurs reprises, continue le Dr Pittard, nous avons reçu l'hospitalité de ces Skoptzy, soit en 1901, soit en 1902, hospitalité d'ailleurs limitée à quelques repas pris pendant que nous les examinions. « Nous avions été frappés par la haute taille de la plupart d'entre eux, par leur figure glabre, poupine, leur voix de femme, la douceur de leur peau, qui en même temps présente un aspect de fraîcheur, de jeunesse, de souplesse. Presque tous portaient de longs cheveux foncés, plats, tombant en mèches sur leur visage. Pour nous faire honneur, ils les avaient enduits de pommade ou d'huile. Leurs mains étaient fines, allongées, souples comme des mains de femmes » (loc. cit. page 182, 183). Voilà donc des adultes qui présentent très exagérées les proportions d'un enfant à la veille de la puberté : assis, ils ont l'aspect d'enfants par la faible hauteur de la partie de leur corps qui s'élève au-dessus du siège autant que par leur visage dont Pittard souligne l'apparence « poupine ». Debout, ce sont des adultes, du moins par la taille. Depuis l'enfance, le soma ne paraît s'être modifié que par Talion-
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
gement des membres; l'aspect du visage, la longueur absolue du tronc, l'état de la peau n'ont pas changé. M. Pittard souligne l'infériorité du volume du crâne chez ces hommes, Petits Russiens d'origine, comparé au volume du crâne de leurs congénères non émasculés. L'action du germen, son influence sur la croissance nous est donc démontrée par les modifications qu'elle subit en son absence. Si, avec de nombreux auteurs modernes, on attribue à l'hypophyse l'allongement osseux, l'hyperactivité de cette glande à sécrétion interne, ne se manifestant chez l'eunuque qu'en suite de la castration, représentera elle-même un effet de la suppression du germen. Du reste, on ne pourra déterminer avec précision les résultats de la suppression prépubère du germen que chez des sujets émasculés avant l'âge de 12 ans, et mieux avant l'âge de 6 ans, terme de la première période d'évolution post-fœtale, puis suivis, de semestre en semestre avec toutes les ressources de la méthode auxanologique. Les observations et l'expérimentation sur les animaux dont je me préoccupe depuis longtemps, d'après les conseils qu'avait bien voulu me donner en 1896 le professeur Milne-Edwards, m'ont fourni des résultats intéressants, mais qui ne sont applicables à l'espèce humaine qu'avec beaucoup de réserve.
�CHAPITRE IX
DES LOIS DE CROISSANCE
Les lois et la méthode. — Constitution des lois de croissance. — (Loi des alternances. — Lois pubertaires. — Lois des proportions. — Principe de l'accroissement inégal pubertaire.) — Bésunié et formules des lois de croissance.
Les lois et la méthode en matière de croissance. — Bufîon avait formulé une loi générale de la croissance en longueur que toutes les observations ont confirmée depuis : «.... Il y a quelque chose jd'assez remarquable dans l'accroissement du corps humain, écrit-il : le fœtus dans le sein de sa mère croît toujours de plus en plus jusqu'au moment de la naissance; l'enfant, au contraire, croît toujours de moins en moins jusqu'à l'âge de la puberté. » La loi de Bufîon est une des rares qui, ne visant que la taille, s'applique au développement du corps entier. Cela est dû à sa généralité même. D'autres auteurs ont traité de l'allongement très notable qui précède la puberté; mais ils ne fixent pas le moment de l'apparition de la puberté !
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
Les différences sexuelles de l'accroissement de la taille ont donné lieu à des divergences d'opinion telles qu'il n'est pas encore permis de formuler de règle générale quant au rythme de l'allongement. Cela est peu regrettable, la taille étant visée isolément. C'était du reste à prévoir, et il en sera ainsi tant que la méthode simultanée, expéditive, sera substituée à la méthode scientifique, tant que l'observateur ne prendra pas le temps et la peine de suivre les mêmes enfants et de relever sur chacun d'eux toutes les mesures et toutes les notations utiles patiemment répétées à chaque semestre. Rappelons-nous que, faute d'employer cette méthode et en prenant la stature pour critérium de la croissance, la mesure de la taille serait-elle accompagnée de celle de la circonférence thoracique et du ' poids, on est infailliblement conduit à cette conclusion au moins étrange que parmi les plus beaux spécimens dont puissent s'enorgueillir l'humanité, Yeunuque occupe une place d'honneur. Les eunuques de 1 m. 80 ne sont pas rares, leur embonpoint habituel leur assure de gros chiffres pour la circonférence du thorax et pour le poids. Si bien que sur un tableau où seraient consignés la taille, le périmètre et le poids en vue d'une appréciation de la valeur physique, et quelles que soient d'ailleurs les combinaisons imaginées au moyen de ces trois expressions numériques, beaucoup de ces
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« infirmes » apparaîtraient comme d'excellentes recrues.
*
*
Mais, et cela est grave, à quels phénomènes la méthode de l'examen unique, simultané des divers âges, et réduit à quelques mesures, à quels phénomènes du développement de l'être nous eût-elle fait assister ? Quel rythme nous eût-elle permis de saisir, quelles règles générales nous eût-elle conduits à formuler ? Il appartenait à la méthode périodique et polymétrique, à celle que nous avons appelée auxanologique, pour grouper autour de son objet, la croissance, ses ressources physiologiques, cliniques et anthropométriques, il était réservé à la méthode auxanologique de faire ces observations, de dégager les rythmes de l'accroissement, d'en rechercher l'explication et d'en induire quelques règles générales. Il appartenait à cette méthode de faire le départ entre la croissance vraie et ce qui a été trop longtemps considéré comme son expression, de déterminer un certain nombre des variations et de constater quelques-unes de leurs causes. Constitution des lois de croissance. — Gardez-vous d'en déduire que les rythmes de croissance sont tous semestriels. Cependant, le semestre, Bufîon l'avait
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prévu quand il dirigea les mensurations de M. Gueneau de Montbeillard, répond à un certain nombre de rythmes, et en fait apercevoir d'autres. Et maintenant, cherchons à nous rendre compte comment les faits conduisent à une loi de croissance en prenant pour exemple la « loi des alternances ». Loi des alternances. — Les mesures multiples, qui sont évidemment laborieuses, procurent du moins de larges compensations scientifiques. Elles permettent, pour chaque semestre, la reconstitution des segments avec leurs dimensions absolues. En calculant les rapports des uns aux autres, on peut établir leurs dimensions relatives, et savoir sur quels segments du buste ou des membres a porté avec le plus d'activité le processus de croissance, au cours du semestre à la fin duquel l'enfant est mesuré. Et ceci s'applique aux grossissements et aux élargissements comme aux allongements. La croissance segmentaire répond à l'accroissement d'un groupe d'os restreint, et, pour les segments de membres, à celui d'un os long isolé, comme à la cuisse et au bras, ou de deux os longs jumelés comme à la jambe et à l'avant-bras. L'allongement de l'un de ces segments représente, par suite, l'allongement de l'os long correspondant, du fémur ou du tibia-péroné, de l'humérus ou du radius-cubitus. Au voisinage de la cheville ou du poignet, les muscles sont réduits à leurs tendons, le plus souvent engagés dans les sillons des os. A ce niveau, la grosseur
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mesurée est une grosseur osseuse, relativement à la grosseur musculaire que représente la circonférence maxima du segment. Je comparais, en 1897, les changements survenus dans les segments de membres des enfants de l'Ecole des Andelys, mesurés pendant sept semestres à ceux dont avaient été le siège les segments homologues chez les élèves de l'Ecole de St-Hyppolyte-du-Fort, cherchant à me rendre compte de l'influence du climat très différent dans ces deux localités. Je crus d'abord devoir considérer comme erronés les premiers résultats des calculs qui montraient le grossissement à un autre semestre que l'allongement, ou du moins, faisaient correspondre les minimas de l'allongement aux maximas du grossissement. Bientôt la précision que ce fait prenait du côté des os de la jambe et de l'avant-bras, à travers la comparaison des résultats de même ordre dans les deux écoles, me montra qu'il n'y avait là ni erreur ni exception, et que le grossissement ne s'effectuait avec activité que lorsque l'activité de l'allongement s'était atténuée. Je notai avec soin cette remarque sans y attacher dans le moment d'importance générale. Et ce fut seulement en 1900, à l'heure de la mise en œuvre de la partie de mes recherches destinée à la constitution de mon ouvrage sur la croissance des diverses parties du corps chez l'enfant moyen, que la répétition individuelle des mêmes rapports et le frappant rap-
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prochement des accroissements semestriels en longueur et en grosseur d'un même segment de l'enfant moyen imposa, avec la valeur d'un principe, le fait de l'allongement et du grossissement non pas simultanés, mais alternatifs. ^ L'adolescent moyen mettait aussi en relief le rythme contrarié de l'allongement de deux os longs consécutifs : quand le fémur allongeait, le tibia grossissait, et quand le fémur grossissait, le tibia allongeait. Il ne s'agissait pas de suppression de l'allongement quand se réalisait le grossissement, mais d'une réduction du taux de l'allongement et vice versa. Le rythme de ces accroissements osseux était, en outre, semestriel. 100 enfants suivis de semestre en semestre de 13 à 18 ans, apportaient leurs mesures pour la constitution du moyen. Derrière eux, 130 autres, suivis de même, formaient la réserve, le contrôle à l'occasion. Rien dans les faits relevés ne pouvait être taxé de fortuit, et j'étais, sans en pouvoir douter, en présence d'une règle générale. La suite de la mise en œuvre de mes recherches me démontra la portée biologique de cette loi \ de laquelle relevaient direc1 V. au sujet de « la loi des alternances » les pages 107, 108, 111, 119, 120, 122, 123, 127, 128, 134, 175 et 176 de mes Recherches anthropométriques sur la croissance des diverses parties du corps, 224 pag. Paris, Maloine. édit. 1902-1903.
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tement ou indirectement l'immense majorité des phénomènes de croissance ressortant de l'observation chiffrée ou notée. Cela aboutissait de soi à diverses formules : Allongement de deux os longs consécutifs. Les périodes d'activité et de repos qui se succèdent semestriellement dans l'accroissemnt en longueur d'un os long, sont contrariées pour les deux os longs consécutifs d'un même membre. Allongement et grossissement d'un os long. Les repos et l'allongement sont utilisés par le grossissement et réciproquement. L'os long grossit et allonge alternativement et non simultanément. Il est acquis que la croissance osseuse est soumise à des alternances. Les alternances avec leurs irrégularités sont, pour le développement du corps, une des caractéristiques de la progression biologique, qu'elles différencient de la progression arithmétique de Quételet. Les alternances ne dépendent pas des saisons. La première loi démontre, en effet, que la périodicité semestrielle n'implique pas d'influence saisonnière. A plus forte raison, les saisons n'influent-elles pas sur les alternances qui échappent à cette périodicité. Les alternances subissent une influence prépondérante de la part de la puberté. Le semestre représente la durée moyenne de l'alternance d'un grand nombre d'accroissements. La
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puberté est le centre autour duquel évoluent les grandes alternances. Lois puberiaires.—Nous avons vu que l'élément rereproducteur, le germen, avait sur les effets de la croissance une influence considérable et qui n'a d'égal que celle que ce germen exerce sur la lignée somatique dès l'ovule. Actuellement, il s'agit de l'influence du germen sur les causes secondes de la croissance. Un certain nombre de lois pubertaires relèvent de la loi plus générale des alternances. Buste et membre inférieur. — La taille doit la plus grande part de son développement avant la puberté, au membre inférieur, après la puberté, au buste. Pl. X, A. Ce fait trouve son explication et sa cause dans les phénomènes de croissance majorée et de croissance réduite que nous avons étudiés avec soin. Nous avons vu, en effet, que la puberté favorisait l'activité auxanologique des tissus d'ordre conjonctif, et réduisait, au contraire, la croissance des tissus de cartilage. Les organes cartilagineux offrent conséquemment une activité d'accroissement beaucoup moindre et pour quelques-uns presque nulle à partir de la période pubère; le cartilage de conjugaison subit comme les autres cette influence pubertaire, et l'allongement des os longs qui procède de lui s'en ressent aussitôt. Par contre, les organes qui croissent par le tissu
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conjonctif augmentent leurs dimensions. C'est le cas du grossissement des os longs qui est assuré par le périoste. Nous pouvons généraliser ces remarques et dire : L'activité périostique ostéogène, dominée par l'activité ostéogène du cartilage avant la puberté, l'emporte sur elle après la puberté. D'où dérive ce corollaire: Allongement et grossissement osseux : Le processus osseux d'allongement prime avant la puberté; le processus osseux de grossissement prime pendant et après elle. Comment alors ne pas prévoir les rapports pubertaires d'accroissement de la taille et du poids qui résultent logiquement de ce qui précède. Les principaux accroissements péripuberlaires de la taille se produisent pendant les trois semestres qui précédent la puberté; les principaux accroissements péripuberlaires du poids ont lieu pendant les trois semestres qui suivent. Pl. X, B. Parmi les tissus dont le taux de croissance est majoré par l'intervention de la puberté, figure le tissu musculaire. Le contraste avec l'accroissement en longueur du tissu osseux est nettement marqué; et comme l'allongement est la plus aisément appréciable des manifestations de l'accroissement osseux, on peut exprimer ce fait dans les termes dont je me suis servi en 1902 : la croissance est surtout osseuse avant la puberté et surtout musculaire après elle. Pl. X, C.
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Une des croissances totales que provoque le germen au moment de l'achèvement de l'évolution de sa lignée, porte sur les poils. L'apparition de ces organes, destinés à remplacer le duvet, précède un peu Téclosion de la puberté elle-même. Ils se multiplient pendant le cours de son installation et jusqu'à ce que la phase pubertaire soit achevée ou, du moins, à ce moment, les poils du pubis et de l'aisselle sont devenus aussi touffus qu'ils doivent l'être, et, si la toison continue à s'épaissir, c'est en dehors de ces deux régions. L'observation par la méthode auxanologique a permis d'établir des relations entre la pousse des poils et l'évolution pubertaire; elle a permis encore de les formuler avec précision : Pousse des poils et puberté : Le début de la pousse des poils pubiens P 1 précède de trois semestres, en moyenne, l'éclosion de la puberté P3 A1. Dans les deux sexes, le début de la pousse des poils axillaires répond à peu près exactement à l'éclosion pubertaire. Or, A 1 qui l'exprime, correspond à P 3, en sorte que c'est un des effets mêmes de la puberté, à savoir une croissance totale, qui la dénonce à l'observateur. Il ne s'agit pas d'une coïncidence, mais d'une relation de cause à effet, ce qui explique la constance du rapport entre le phénomène lui-même et sa manifestation extérieure. La fin de la pousse des poils, au pubis et à l'aisselle,
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c'est-à-dire le moment où la toison, observée semestriellement, a atteint son plus haut degré de densité, est noté P 5 A 5 et cela correspond à la fin de l'installation de la puberté. Fin de la Puberté, sa durée. P 5 A B qui marque la fin de la phase pubertaire, survient 4 semestres (2 ans environ) après P 3 A1. La comparaison qui conduit à noter les puissances successives de P et de A, est faite entre l'état au semestre actuel et l'état au semestre précédent de la toison pubienne ou axillaire chez le même enfant, ce qui en fait une valeur relative, mais exclusivement individuelle. La densité des poils répondant à P 5 A 6 chez un enfant, peut ne représenter que la valeur P * A chez un autre. Par conséquent, dès qu'on aperçoit des poils au pubis, on peut considérer que l'éclosion pubertaire aura lieu dans trois semestres, 2 ans au plus. A partir du moment où a été noté chez un garçon P 3 A 1, il faut compter deux années environ avant qu'il ait franchi la période pubertaire et atteint la notation A 5. Et il devra s'écouler trois années pour que la période internubilo-pubertaire aboutisse à la nubilité, et réalise les conditions qui constituent l'état adulte. P D'où cette loi : Place de la Puberté dans l'évolution de croissance. Douze à dix-sept ans séparent la puberté de la naissance. Deux ans suffisent à la puberté pour son
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installation, au delà de laquelle trois ans sont nécessaires pour atteindre la nubilité. En conséquence, la puberté dans ses rapports avec l'évolution de croissance, n'offre de variable que l'époque de son apparition. Lorsque la puberté éclôt, l'enfant se trouve à 5 ans de sa nubilité, condition de son état adulte. Une fille qui fait sa puberté à 17 ans, n'est nubile, n'est « bonne à marier » qu'à 22 ans. Tandis qu'une autre, sa sœur peut-être, chez qui l'apparition pubère a eu lieu à l'âge de 12 ans, a déjà effectué sa nubilité quand sonnent ses 17 ans. Celle-ci est déjà une femme à l'âge où l'autre n'est encore qu'une enfant. Il en est de même pour le sexe masculin ainsi que nous l'a montré le cas de deux frères jumeaux. L'écart est considérable entre 12 et 17 ans, et ces différences, surtout chez deux sœurs, ne s'expliqueraient pas, à moins que ne soit admise la cause que j'ai signalée dans une note à l'Académie des Sciences du 13 novembre 1911, et dont il a été question plus haut, je veux parler de la qualité de l'alimentation placentaire. Nous avons vu que le mieux nourri, placentairement, de deux jumeaux se «forme » le premier. Il semble bien que l'on soit autorisé à croire que : La puberté est précoce ou tardive suivant la qualité de l'alimentation par le placenta.
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L'affaissement qui s'opère dans le taux de l'accroissement de la taille à partir du semestre qui précède immédiatement la puberté, et qui d'ailleurs ne fera désormais que s'accentuer, a été interprété par les auteurs comme un recueillement de l'organisme à la veille du grand effort qu'il va fournir. Nous sommes en mesure, maintenant, d'interpréter physiologiquement et anatomiquement ce fait, et de le considérer comme un cas de la loi des alternances, cas susceptible d'être prévu par qui est informé de l'influence germinale sur l'accroissement des divers tissus, par qui sait que les cartilages de conjugaison, comme les autres, perdent à ce moment la majeure partie de leur activité de croissance, et que, par conséquent, les os longs ou bien cessent de croître en longueur, ou bien réduisent considérablement leur accroissement dans ce sens. La réduction de l'allongement de la stature n'a pas d'autre cause à cette époque. Peut-être le terme de « recueillement » ne convientil pas à un organisme dont la plus importante partie, le tronc ainsi du reste que le cou, n'a aucune tendance à réduire son accroissement, et tout au contraire commence à grossir très-activement. Il s'agit là d'une alternance dans les accroissements comme on en observe lorsqu'on suit un enfant de semestre en semestre, certains accroissements de longueur faisant place à d'autres de même sens, ou à des élargissements, ou encore à des grossissements.
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
Quoi qu'il en soit, l'organisme reste trop actif pour qu'il puisse être question de recueillement. Cela montre, une fois de plus combien peu la stature représente la croissance d'un organisme humain, et à quelles erreurs d'interprétation elle peut conduire. De tout cela nous conclurons : La phase qui précède immédiatement la puberté ne diffère pas des autres phases de la croissance chez les enfants équilibrés, et à ce moment comme aux autres, l'organisme ne prend que des repos partiels, conformément à la loi des alternances. Changements de coloration pubertaires. Cheveux. La puberté rend plus foncée la coloration des cheveux chez 28 enfants sur 100. Peau. La puberté fait apparaître un pigment brun sur la peau des parties périgénitales du corps chez 30 enfants sur 100. Yeux. 63 enfants sur 100 modifient la couleur de leurs yeux (coloration du pigment de l'iris) au moment de la puberté chez 18 enfants sur 100 elle devient plus foncée, chez 45 enfants sur 100.. elle devient plus claire.
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Lois des proportions. — Il en a été question déjà au chapitre III et nous aurons à utiliser l'étude des proportions lors de la constitution de la « formule in-
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dividuelle ». Nous retrouvons ici l'influence dominatrice des alternances et celle de la puberté. // existe trois phases dans l'évolution des variations présentées par les proportions de longueur et de largeur du corps. La première de la naissance à six ans ; la deuxième de six à quinze ans ; la troisième de quinze ans à l'âge adulte. Pl. I et V. Si l'accroissement proportionnel est supérieur à celui de la stature pour un segment du corps, il lui est inférieur pour le segment situé immédiatement au-dessous ou au-dessus. C'est là un nouvel aspect de la loi des alternances qui peut être exprimé d'une façon plus générale : La « loi des alternances » régit les accroissements proportionnels des segments du corps, comme elle régit leurs accroissements absolus. Les variations des proportions de longueur et de largeur du corps sont profondément modifiées par la puberté qui les soumet à ses lois d'orientation et de majoration. Tel segment qui progresse relativement plus que la stature jusqu'à la puberté, retarde sur elle au delà de l'âge pubère : c'est le cas du membre pelvien. Tel autre segment qui perd sur la stature avant la puberté, gagne sur elle quand la puberté est franchie. Ainsi donc : La puberté a une influence décisive sur le sens des variations des proportions de longueur et de largeur. Les proportions de largeur, en général, présentent les variations propres qui sont en corrélation avec celles des proportions de longueur du tronc.
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
La réduction des proportions à la taille des réservoirs viscéraux atteint sa limite extrême à l'époque de la puberté.
Principe de l'accroissement inégal. — Parmi les lois pubertaires, il en est une qui dérive directement du pouvoir embryogénique dont fait preuve la puberté ; je veux parler du principe de l'accroissement inégal, de son rôle physiologique et de son rôle pathologique éventuel. Les effets de l'accroissement inégal sont soumis à la loi des alternances et demeurent physiologiques. Dès qu'une cause fait échapper Vaccroissement inégal à la loi des alternances, ses effets sont exposés à devenir pathologiques. A côté du traumatisme, de l'infection, de l'intoxication; de la production néoplasique, etc., la mauvaise alimentation préfœtale, fœtale et post-fœtale conserve une influence prépondérante. Avant de nous éloigner de cette importante question des lois de croissance qui devront être présentes à votre esprit au cours de votre observation de l'enfant et de votre direction éducatrice, je crois devoir vous en donner un résumé avec des formules concises.
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RÉSUMÉ ï.
LOIS RELATIVES AUX ALTERNANCES DES ACCROISSEMENTS.
1. L'os long grossit et allonge alternativement et non simultanément. Les repos de l'allongement sont utilisés par le grossissement (1 et 31), Pl. X, D. 2. Les périodes d'activité et de repos qui se succèdent semestriellement dans l'accroissement en longueur d'un os long sont contrariées pour les deux os longs consécutifs d'un même membre (1 et 3), Pl. X, C et D. 3. Le semestre représente la durée moyenne de l'alternance d'un grand nombre d'accroissements (ainsi un os long grossit pendant six mois davantage qu'il n'allonge ; puis il allonge pendant les six mois suivants davantage qu'il ne grossit). Les grandes alternances évoluent autour de la puberté (3). 4. La taille doit la plus grande part de son développement, avant la puberté au membre inférieur, après la puberté au buste (1 et 3), Pl. X, A. 5. Les principaux accroissements péripubertaires de la taille se produisent pendant les deux semestres qui précèdent l'éclosion de la puberté. Les principaux
1 Les chiffres entre parenthèses renvoient aux publications annotées p. 140.
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
accroissements péribubertaires du poids ont lieu pendant le semestre même de l'éclosion de la puberté et pendant les deux semestres qui la suivent (1 et 3), Pl. X, B. 6. La croissance est surtout osseuse avant la puberté et surtout musculaire après elle (1 et 3), Pl. X, C. II. Lois
RELATIVES A LA PUBERTÉ.
Le germen est l'axe continu de vie autour duquel gravitent, partiellement alternantes, l'organisation et la désorganisation. 1. La puberté est la clé de la croissance. 2. Le début de la pousse des poils pubiens P1 précède de trois semestres 'en moyenne l'éclosion de la puberté P3 A1. 3. Dans le sexe*masculin, le début de la pousse des poils axillaires répond à l'éclosion pubertaire (1). Dans le sexe féminin, elle apparaîtrait avec un léger retard sur la première menstruation d'après le Dr Marthe Francillon. 4. Ps A5 qui marquent la fin de la phase pubertaire, surviennent quatre semestres environ après P3 A1 (1 et 2). 5. Douze à dix-sept ans séparent la puberté de la naissance. C'est la période prépubertaire de la croissance. Deux années suffisent pour son installation et constituent la période pubertaire. Au delà, trois
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années sont nécessaires pour atteindre la nubilité, trois années qui représentent la durée de la période postpubertaire de la croissance, ou période internubilopubertaire (11). 6. La puberté est précoce ou tardive selon la valeur de l'alimentation placentaire (9 et 11). 7. La puberté est la période de maturation des organes de reproduction ; elle répond à la maturité de l'encéphale, mais marque seulement le début de la dernière étape du soma vers sa maturité (9), Pl. IX. 8. La puberté détermine normalement des inégalités de l'accroissement qui ont pour objet l'appropriation définitive du soma à la fonction de reproduction, mais qui entraînent souvent des troubles temporaires, non pathologiques. (Tels sont la « mue de la voix », les « vergetures de croissance », tels sont un grand nombre d'autres troubles qui déterminent chez l'écolier des gênes diverses à répercussion psychique (9 et 10). 9. La durée des effets de l'accroissement inégal pubertaire dépend de celle de l'alternance des accroissements auxquels ils se rattachent. Si elle se prolonge, c'est que l'action d'une cause éventuelle la soustrait à la loi des alternances, et dans ce cas, les troubles prennent un caractère pathologique (9 et 10). 10. La puberté a sur le pigment une action inverse suivant qu'il s'agit du pigment de la peau et des cheveux qu'elle fonce ou du pigment de l'iris qu'elle éclaircit (1).
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ANALYSE DE LA CROISSANCE
III. Lois
RELATIVES AUX PROPORTIONS
PENDANT LA CROISSANCE.
Pl. I, V, VI, VII, VIII et XVI. 1. De l'enfant naissant à l'homme, chaque segment a sa manière propre de se comporter vis-à-vis de la taille (4). 2. Si l'accroissement proportionnel est supérieur à celui de la stature pour un segment du corps, il lui est inférieur pour le segment situé immédiatement au-dessous ou au-dessus (4 et 8). 3. Tel segment qui progresse relativement plus que la stature jusqu'à la puberté, retarde sur elle au delà de l'âge pubère et réciproquement (4 et 8). 4. Les proportions de largeur en général présentent des variations propres qui sont en corrélation avec celles des proportions de longueur du tronc (7 et 8). 5. Il existe trois phases dans l'évolution des variations présentées par les proportions de longueur et de largeur au cours de l'ontogénie post-fœtale : la première phase s'étend de la naissance à 6 ans, la deuxième de 6 à 15 ans, et la troisième de 15 ans à l'âge adulte (8). 6. Des proportions déterminées pour chaque catégorie de constitution organique répondent à la période pubertaire et le plus souvent à l'éclosion même de la puberté (11). 7. Les proportions permettent en conséquence de
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connaître d'une manière approchée l'espace de temps qui, à un moment donné, sépare un enfant de sa puberté, c'est-à-dire son âge pubertaire, son âge d'évolution (11). 8. A 6 ans, en moyenne, neuf années environ avant la puberté, les proportions sont telles pendant un semestre ou deux que la silhouette de l'enfant indique celle de l'homme futur (4 et 8) Pl. I et surtout II et XVI.
IV.
LOIS RELATIVES AUX ASYMÉTRIES.
1. Il règne entre les organes binaires une asymétrie corrélative de l'hyperfonction : chez le droitier, le membre supérieur droit est plus long et plus gros, l'épaule droite plus basse, etc caractères qui passent à gauche chez le gaucher (5). 2. L'évolution des asymétries normales des organes binaires et du tronc progressent à travers l'âge en sens inverse de la croissance, mais dans le sens même de la fonction (5). 3. Chez le droitier, la supériorité de longueur et de grosseur qui est à droite pour le membre supérieur, siège souvent à gauche pour le membre inférieur, ce qui détermine une suractivité fonctionnelle croisée. Chez le gaucher, le croisement est inverse (5). 4. Les pavillons des oreilles offrent une notable et constante asymétrie sans corrélation fonctionnelle apparente et que la croissance tend à effacer (5 et 6).
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ANALUSE DE LA CROISSANCE
PUBLICATIONS OU SONT ANALYSÉS LES FAITS QUI ONT CONDUIT AUX LOIS.
*) Recherches anthropométriques sur la croissance des diverses parties du corps. 2 ) De la puberté à la nubilité. Société d'Anthropologie, 7 juillet 1909. *) Alternances des accroissements (semestriels) au cours du développement du corps humain (dans le sexe masculin). Société de Biologie, séance du 25 juin 1910. ') Les proportions du corps pendant la croissance. Société d'Anthropologie de Paris, 1910. *) Asymétries normales des organes binaires chez l'homme. Académie des Sciences 1900 et 1910. ' A propos d'asymétrie auriculaire. Société d'Anthropologie de Paris, 1910. * Variations des proportions de longueur et de largeur du corps dans le sexe masculin au cours de l'ontogénie post-fœtale. Académie des Sciences, 1911. 8 ) Variations des proportions. — Leurs lois évolutives. Académie de Médecine, 1911. ') Essai d'explication du rôle de la puberté chez l'homme. Société d'Anthropologie de Paris, 1911. ,0 ) L'accroissement inégal à l'époque de la puberté. Académie des Sciences, 1912. u ) De quelques rapports de l'évolution de croissance avec la puberté. XIVme Congrès d'Anthropologie (Genève 1912).
�DEUXIÈME PARTIE
APPLICATIONS ÉDUCATIVES ET PÉDAGOGIQUES
�« ....L'anatomie et la physiologie humaine, ont besoin de l'histoire du développement de l'homme après comme avant sa naissance. La psychologie n'y est pas moins intéressée. La médecine, l'hygiène et aussi la morale, l'éducation physique et intellectuelle, tout cela doit en bénéficier par là même.... » L. MANOUVRIER, (Préface des « Recherches sur la Croissance des diverses parties du Corps » de Paul Godin, p. 11).
�DEUXIÈME PARTIE
APPLICATIONS ÉDUCATIVES ET PÉDAGOGIQUES
CHAPITRE PREMIER
L'ACCROISSEMENT INÉGAL CHEZ L'ÉCOLIER, LES TROUBLES ORGANIQUES QU'IL PROVOQUE ET DONT LE MAITRE ET L'ÉDUCATEUR ONT A TENIR COMPTE.
En quoi consiste l'accroissement inégal. — Intérêt éducatif des troubles qu'il détermine. — Exemples de troubles pubertaires dus à l'accroissement inégal. — Conséquences pédagogiques de ces troubles.
En quoi consiste l'accroissement inégal. — Nous venons de nous rendre compte de ce que nous devions entendre par accroissement inégal : dans un même organe, le jeu des croissances majorées et réduites crée des inégalités du genre de celles qui ont été observées aux premières heures de la vie. Chez l'embryon, ces irrégularités de l'accroissement avaient pour but de construire les organes. Chez l'enfant qui fait sa puberté, les organes sont formés; aussi le but de l'accroissement inégal n'est-il plus que d'achever leur perfectionnement, de rendre
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APPLICATIONS ÉDUCATIVES
leurs fonctions plus aisées, et mieux en harmonie avec les nouveaux besoins ou du moins l'orientation assez différente des besoins de l'être bientôt capable de procréer. Il est normal, chez l'enfant, que la progression des effets de l'accroissement inégal ait la durée d'un semestre environ, durée limitée qui ne laisse que dans des cas relativement rares, au trouble ébauché par la croissance non parallèle, le temps de prendre l'importance d'un état pathologique. Cela tient à ce que les effets de l'accroissement inégal n'échappent pas à la « loi des alternances ». Cependant, il est des cas où les conséquences d'une mauvaise alimentation placentaire, celle qui fait la puberté tardive, suffisent à soustraire temporairement l'accroissement inégal à la loi des alternances, et à prolonger au delà d'un semestre la progression de ses effets. L'équilibre fonctionnel est dès lors menacé. L'état physiologique se maintient encore si la constitution anatomique n'est pas atteinte au point de la trop gêner et si l'appropriation fonctionnelle peut se réaliser. Pourtant les limites de l'état physiologique se trouvent éventuellement dépassées par la persistance de l'inégalité de l'accroissement; à partir du moment où l'appropriation fonctionnelle ne parvient plus à se faire sans dam jpour l'organisme, l'état pathologique est bien près d'être constitué.
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Cet état procède encore de l'état pathologique par ce fait qu'il implique un amoindrissement de l'activité humaine, une réduction de la résistance, par ce fait que, s'il s'établit d'une façon définitive, il gêne ou arrête la croissance équilibrée, avec la belle ordonnance de ses proportions et, en dernière analyse, «détermine une diminution des chances de bonheur de l'individu et de sa valeur sociale. Toutefois, les limites de la physiologie ne sont habituellement outrepassées qu'autant qu'intervient une cause externe, telle qu'un traumatisme, une infection, un néoplasme, qui font franchir sans rémission plusieurs phases successives d'alternance. Intérêt éducatif des troubles dus à l'accroissement inégal pubertaire. — On conçoit que nombreux soient les cas où tout en restant sur la limite à laquelle se produit la déviation physiologique, sans qu'il y ait encore désorganisation morbide, dexyéritables troubles soient néanmoins constitués. Ce sont ces états mal définis, qui n'attirent l'attention de la famille par aucune apparence franchement maladive, dont aucun symptôme inquiétant ne provoque l'appel du médecin, ce sont justement ces états mixtes qui intéressent l'éducateur, et qui doivent être dépistés par lui; car entre eux et le psychisme de l'écolier règne une liaison étroite dont l'oubli défigure la psychologie pubertaire et est gros de regrettables conséquences éducatives et pédagogiques. 10
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Tel est, en raccourci, le mécanisme pathogénique de la puberté qui repose comme on le voit sur le trépied physiologique : nutrition embryo-fœtale, accroissement inégal et loi des alternances. Les facteurs, qui peuvent éventuellement intervenir, sont avant tout les traumas, les infections, et les intoxications, ces dernières à origine ordinairement digestive et procédant de la mauvaise alimentation du premier âge, c'est-à-dire de tout ce qui n'est pas V allaitement par la mère, seule alimentation appropriée aux besoins de l'enfant et au maintien de ses organes dans un état de fonctionnement normal. Troubles pubertaires du côté du larynx et du tégument. Au larynx, en vertu des majorations conjonctives et musculaires déterminées par la puberté, les ligaments et les muscles thyro-arythénoïdiens allongent soudain, et plus que ne le comporte l'espacement entre leurs points extrêmes d'insertion. Jusque là les cartilages ont grandi. A ce moment, ils cessent de grandir; ou bien ils réduisent considérablement le taux de leur accroissement, en sorte que l'espacement arythéno-thyroïdien n'est pas proportionnel à la longueur des éléments conjonctivomusculaires des cordes vocales. Au bout d'une phase d'alternance qui peut s'étendre à plusieurs semestres, les cartilages retrouvent leur activité de croissance, l'écartement arythéno-thyroïdien s'harmonise avec la longueur des cordes. La voix, d'abord aiguë puis chevrotante, prend de
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la fermeté en même temps qu'elle réalise sa tonalité et son timbre définitifs. L'émasculation maintient la voix aiguë (eunuques) parce qu'elle supprime le germen, et par suite la puberté avec toutes ses conséquences, avec ses majorations portant sur l'accroissement du tissu conjonctif et du tissu musculaire, avec ses amoindrissements atteignant entre autres le tissu cartilagineux. Si bien que, la puberté supprimée, tout ce qui croît par le cartilage continue à grandir. Les cordes, au contraire, restent stationnaires, et, à travers l'âge, demeurent des cordes d'enfants. Elle sont trop courtes pour l'espace très agrandi qui règne entre leurs insertions extrêmes. Du côté de la peau, la croissance, on le sait, est réduite ou arrêtée quand la puberté approche. La peau est, en effet, d'origine ectodermique, et la puberté réduit ou arrête de même la croissance des divers autres dérivés de l'ectoderme. Qu'une infection survienne et détermine un allongement exorbitant des os longs du membre inférieur, comme cela se voit au dernier stade des maladies graves, la peau ne peut pas suivre cet accroissement. L'infection agit comme l'émasculation, en exagérant l'activité du cartilage, en inhibant les accroissements conjonctif et musculaire, et en faisant transgresser à cette croissance déréglée les phases de l'alternance physiologique. La peau est étirée à un tel point que ses éléments
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APPLICATIONS ÉDUCATIVES
élastiques (Troisier et Ménétrier) finissent par se rompre suivant une ou plusieurs lignes transversales sus-rotuliennes, et laissent subsister par la suite une ou plusieurs barres blanches, appelées « vergetures de croissance », analogues à celles qui strient le tégument de l'abdomen de femmes qui ont eu des grossesses répétées. Troubles pubertaires du côté des membres. — Nous sommes appelés à observer pendant la période d'installation de la puberté des hernies musculaires par rupture aponévrotique, des myopathies par rupture des fibres musculaires. L'étirement qui détermine ces ruptures est le fait de l'accroissement inégal. Un allongement soudain des os longs peut correspondre chez l'enfant, plus ou moins maltraité pendant sa vie intra-utérine, à un repos de l'accroissement des muscles et du tissu conjonctif. Cela se produit souvent quelques semestres avant l'apparition de la puberté. De là, dans les segments des membres, dans les «jambes », dans les « cuisses » un étirement des muscles, des filets nerveux, des vaisseaux, des aponévroses, du périoste, avec des accidents variés ou seulement des sensations douloureuses. Elles peuvent être très vives, les douleurs ressenties par l'enfant; elles sont ordinairement profondes, sourdes, sans localisation bien précise. L'instabilité de l'enfant en est l'effet naturel. Elle ne tarde pas à se répercuter sur l'état psychique dont le maître ne peut pas interpréter le trouble s'il n'est
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pas au courant de ces conditions spéciales du développement.
De l'interprétation juste ou fausse de cette instabilité peuvent résulter les conséquences les plus graves pour le présent et pour l'avenir de l'enfant. J'ai vu des écoliers devenir mauvais sujets par suite des punitions encourues pendant cette période pour des motifs nés de leurs gênes douloureuses; ils souffraient, et leurs souffrances étaient méconnues. Ils ne pouvaient, malgré les efforts de leur jeune volonté, dominer le besoin de déplacement des membres douloureux. L'agitation, évidemment déplorable en classe, était attribuée à des causes d'un autre ordre, aussi bien pour les bons élèves, « en train de se gâter», disait-on, que pour les mauvais. De tout ce qu'il y avait de pénible et de confus pour l'enfant dans son malaise et dans son effarement du faux jugement humain, se dégageait cette impression : « la punition infligée est injuste ». « Si je remue tout le temps, s'écriait l'un d'eux, un bon, suffoqué par l'indignation, monsieur, je vous jure que ce n'est pas de ma faute 1 » « C'est une dissipation intolérable, répondait le maître, impatienté par l'influence néfaste de ce turbulent sur les 35 autres élèves de la classe, » et la punition était maintenue. Sans doute il était turbulent, cet écolier, mais à qui appartenait-il de reconnaître la cause de son agitation ? Il ne peut être question de transporter dans
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le domaine scolaire l'irresponsabilité qui inhibe la sélection sociale en étouffant l'action de la discipline et celle de la justice. Il s'agit uniquement de distinguer les états physiques de l'enfant, et de reconnaître avec précision les cas passibles d'une correction et ceux qui méritent un traitement. L'éducateur et le médecin doivent par leur collaboration donner satisfaction à cet indéfectible « droit de l'enfant », en s'éclairant réciproquement sur les états de croissance. Cela vous donne une idée de l'importance des suites éducatives et pédagogiques d'une information erronée relativement aux conditions que présente un organisme en travail de croissance. Au buste, aux membres, si l'allongement squelettique a été devancé par celui du tissu musculaire et par celui du tissu conj onctif, il se produit un relâchement, une sorte de flottement. Une partie du travail de contraction des muscles est rendu inefficace, et l'effort nécessaire à l'acte passe du simple au double pour un rendement égal, d'où fatigue rapide et ses suites. Notons en passant que la connaissance de ces divers états importe au psychologue autant qu'à l'éducateur, et pour des raisons de même ordre, à savoir l'interprétation de l'individualité. Le jugement court tous les risques d'être faussé si l'existence de l'un de ces états n'a pas été dépisté chez l'écolier avant de le soumettre à l'expérimentation psychologique.
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Troubles pubertaires du côté des vaisseaux des viscères, du rachis, des articulations. — La circulation veineuse est prête aux stases par suite du relâchement des parois des vaisseaux de retour que ne soutiennent plus suffisamment, du reste, les muscles et les aponévroses des membres. Si l'écolier est assis sur le plat de sa cuisse, ainsi que l'y obligent les sièges élevés et l'équilibre de son buste, c'est à ce moment que se prépare la provision de varices qui s'épanouiront un peu plus tard, sans que les causes prochaines, au moment où on les constatera, permettent de les expliquer. Les replis séreux, suspenseurs des viscères, perdent leur tension normale, et ce qui vient d'être dit des varices est vrai des ptôses viscérales. C'est souvent à la puberté qu'elles s'installent ou du moins qu'elles se constituent anatomiquement. On voit le rachis, entre deux faisceaux conjonctivo-musculaires relâchés, se prêter aux influences accidentelles, scolaires ou autres, et s'infléchir en se tordant plus ou moins par suite de l'inégalité de l'allongement des ligaments vertébraux, ou dans le sens de la sollicitation fonctionnelle droitière ou gauchère, en constituant une scoliose essentielle. (Académie des Sciences, notes sur les « Asymétries normales des organes binaires chez l'homme » du 19 février 1900 et du 3 octobre 1910.) Les articulations, de leur côté, prennent par suite du relâchement des ligaments articulaires, une laxité
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singulièrement favorable aux traumatismes intraarticulaires avec frottement, froissement, contusion des surfaces cartilagineuses ou synoviales, et par conséquent aux arthralgies, aux arthrites, indépendamment de toute prédisposition spéciale, aux subluxations, aux déformations temporaires douloureuses des segments multiarticulaires tels que le carpe (carpalgie) et le tarse (tarsalgie). Troubles pubertaires par gigantisme segmentaire du rachis. — L'accroissement inégal peut intéresser deux tissus, dont l'un sert de gaine à l'autre. Prenons pour exemple les effets de l'accroissement inégal sur la colonne vertébrale et sur l'axe nerveux médullaire qu'elle contient1. Normalement, la majoration pubertaire allonge le rachis. Ce fait a déjà été mentionné à propos des alternances pubertaires en ces termes : « La taille doit la plus grande part de son développement avant la puberté au membre inférieur, après la puberté au buste » (au rachis, par conséquent, augmenté de la hauteur du crâne). Au même moment les tissus nerveux, centres, nerfs qui en émanent, filets du grand sympathique lui-même, éprouvent une réduction dans leur accroissement. En sorte que la moelle spinale, qui n'a cependant besoin
1
Lire » Longueur relative de la moelle et du rachis » chap.
XVI de l'Etude sur les rapports anthropométriques en général, et
sur les principlaes proportions du corps, du prof. L. Manouvrier, in Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, t. n, 3 e série, 3 e fascicule.
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que d'un accroissement assez faible, en raison de ses rapports spéciaux avec la colonne vertébrale, ne parvient pas à le réaliser. Pour peu que l'allongement du rachis se fasse avec une certaine soudaineté et atteigne des proportions importantes, il en pourra résulter divers accidents. Ces accidents prennent un caractère précis quand le grandissement porte exclusivement sur un seul segment du rachis. Le siège de prédilection de ce « gigantisme local », de cette exagération de longueur segmentaire, est le rachis cervical de l'enfant. L'étirement que subit le segment cervical de la moelle épinière, devenu trop court par le fait, se transmet au cerveau et il s'ensuit des manifestations névrosiques qui peuvent se limiter à la chorée de Sydenham, quand l'étirement est modéré, quand il retentit jusqu'à la couche optique et non au delà, et que la disjonction d'accroissement entre la moelle et le rachis est de courte durée (phase d'alternance). Mais ces manifestations peuvent aller beaucoup plus loin, jusqu'à l'épilepsie, ainsi que me l'ont démontré l'observation et l'expérimentation, si les effets de l'étirement sont ressentis par les cellules cérébrales de l'écorce et que plusieurs phases d'alternances soient transgressées. Les phénomènes de cet ordre apparaissent chez des enfants qui offrent divers accidents (traumatismes, infections, taenia (deux observations personnelles, etc..) de nature à favoriser, plus ou moins
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longtemps avant la période pubertaire, l'accroissement inégal auquel ils se trouvent déjà prédisposés par la mauvaise qualité de leur alimentation placentaire. Mouvements choréiformes d'origine pubertaire. — « Des disjonctions de moindre importance se produisent sous l'influence de causes moins accentuées ». Cela est assez fréquent, et j'appelle tout particulièrement l'attention de l'éducateur sur « les mouvements choréiformes », qui se rencontrent chez 6 à 9 écoliers pour 100 normaux, et dont sont le siège la plupart des muscles de l'économie, mais surtout les muscles longs des membres inférieurs et aussi ceux des membres supérieurs. En raison des circonstances décelées par l'observation semestrielle des mêmes enfants, je crois devoir rattacher les mouvements choréiformes à l'accroissement inégal. Chez chacun des enfants atteints de mouvements choréiformes, l'observation périodique a montré de l'accroissement inégal avec transgression d'alternances; ainsi du reste que chez les écoliers atteints de tics. Mais dans ces deux groupes, les manifestations de l'accroissement inégal étaient différentes : crâniennes dans le dernier cas, elles étaient rachidiennes dans l'autre. Dans les deux, l'accroissement inégal multipliait ses effets à travers l'organisme et les prolongeait souvent pendant plusieurs semestres consécutifs. Ne confondons pas les tics qui se localisent, contractent isolément tel ou tel groupe de muscles, et
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déterminent quelques secousses toujours les mêmes avec les mouvements choréiformes qui, eux, ne se localisent pas, apparaissent simultanément sur plusieurs points de l'organisme et ne revêtent ni l'aspect ni la périodicité du tic. Rien n'est plus facile, du reste, pour l'éducateur, que ce diagnostic; car il n'est malheureusement pas de classe où ne se trouvent un ou plusieurs enfants atteints de « tics » (ou de tiquose, avec lesquels il peut établir une comparaison. Les mouvements choréiformes déterminent de l'agitation, un peu comme les douleurs de croissance, mais de l'agitation sur place, en quelque sorte, et qui n'est pas ici provoquée par la souffrance; elle est l'effet direct des contractions, des secousses musculaires, si réduites qu'elles soient. Si l'enfant n'a pas été déshabillé, si le médecin ou l'éducateur n'a pas pu voir de ses yeux les contractions fibrillaires des muscles, il ne sait pas et ne peut pas savoir de quelle cause relève l'instabilité physique et consécutivement la légèreté de l'enfant qui se trouve alors exposé aux reproches et peut-être aux punitions évidemment injustes, puisqu'il n'est pas plus maître de ces petits mouvements inutiles et souvent intempestifs qu'il ne le serait des grands mouvements de la chorée de Sydenham. Je le répète, ces « mouvements choréiformes » sont beaucoup plus fréquents chez l'écolier qu'on ne se le figure. Or douze années d'enseignement et trente
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années de pratique médicale ne m'auraient rien fait connaître d'eux et de leurs conséquences, si l'examen de l'enfant nu ne m'avait mis sous les yeux le frémissement vibratoire des faisceaux musculaires. Us s'observent parfois dès l'âge de onze ou douze ans, mais c'est surtout au voisinage de l'apparition de la puberté que les « mouvements choréiformes » se manifestent. Je ne les ai jamais vus dégénérer en chorée; et d'autre part, ils durent plus longtemps que les manifestations choréiques franches. Ils sont involontaires, indolores, inconscients, ne peuvent être ni arrêtés ni même limités par le sujet. Au point de vue pédagogique, je dois faire appel à la bienveillance du maître, et lui demander de couper, aussi souvent que le lui permettront son enseignement et le bon ordre dans sa classe, les heures scolaires d'immobilité pour tout enfant atteint de mouvements choréiformes. Il est bien entendu que dès le début, son cas sera soumis au médecin qui, sans soustraire l'enfant à une discipline dont il a plus besoin que qui que ce soit, aura à l'orienter dans le sens voulu par l'hygiène spéciale. Ces diverses circonstances de la vie pubertaire de l'enfant créeraient, si l'on ne s'appliquait à les connaître parfaitement, une foule de quasi irresponsabilités qui rendraient terriblement délicate la mission de l'éducateur. Il y en a d'autres encore qu'il faut aussi très bien connaître, car elles représentent
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autant de devoirs précis pour la direction éducative. Tics contagieux d'origine pubertaire. — Tel est le cas des tics. Un jour de 1911, je traversais une petite ville du Jura français quand je vis défiler une école de filles. Les élèves étaient nombreuses, beaucoup de moyennes et quelques grandes. Tout en marchant, elles babillaient, et elles accompagnaient leur bavardage d'une mimique intense, exagérée, et singulièrement saccadée. Elles grimaçaient ou faisaient des Oui et des Non de toute la tête. Les conversations, faites d'ailleurs sur un ton élevé, n'avaient aucun rapport avec les signes énergiques de dénégation ou d'affirmation. Et la théorie des, jeunes filles continuait à se dérouler, montrant des têtes nouvelles secouées par ces mouvements inutiles, toujours les mêmes. Il n'y avait pas de doute possible, cette école était victime d'une épidémie de tics. J'éprouvais du regret de ne pouvoir me mettre à la recherche du point de départ de l'épidémie, quand passa à son tour la maîtresse, ayant à son bras une élève de 13 à 14 ans. Toutes deux, sans se regarder, faisaient de leurs deux têtes des mouvements plus étendus, plus saccadés qu'ils ne l'étaient dans tout le reste du jeune troupeau. Elle était là, l'origine de la contagion. C'était la maîtresse elle-même. J'en eus confirmation. Et de fait, sa plus chère élève surpassait toutes ses camarades et s'en montrait atteinte au même
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degré que la maîtresse dont elle copiait fidèlement les secousses. Sans doute, les pouvoirs publics ont cent fois raison de tenir compte avant tout de la valeur intellectuelle et morale des maîtres qu'ils donnent à la jeunesse. Mais on voit par cet exemple, qui en évoque tant d'autres, combien est grave la responsabilité qui leur incombe lorsqu'ils ne protègent pas les enfants que les familles leur confient, contre une contagion évitable, suivant le mot si expressif de Brouardel. Rien n'est aisé, pour un maître qui observe, comme de saisir la porte d'entrée dans sa classe des tics en cours et de préciser celui ou celle des élèves qui a importé les mouvements favoris. L'élève importateur lui-même, on peut souvent s'en assurer, les aura pris à un camarade de la maison qu'il habite, de la cour ou du jardin où il joue habituellement. J'ai connu une fillette dont le tic ne s'observait chez personne autour d'elle. Un peu plus tard, j'aperçus dans la rue une autre enfant présentant le même tic, et j'appris que ces jeunes filles se croisaient deux fois par jour en se rendant à leurs cours respectifs. Dans une réunion où les jeunes filles conservent leurs immenses couvre-chefs, rien n'est comique comme l'agitation en tous sens de cette champignonnière aux teintes bariolées où se distinguent des autres les chapeaux secoués par les tics de la petite chose humaine qu'ils recouvrent; et la pensée de
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l'infirmité arrête dans la gorge le rire qu'allait provoquer la drôlerie du coup d'œil. Le tic peut être passager, mais il subsiste quelquefois chez le jeune homme ou chez la jeune fille; il peut même persister toute la vie. Je connais un brillant officier général qui a gardé aux paupières le tic de son enfance et de jeunes grand'mères qui secouent encore leurs têtes comme à 15 ans ! Mes observations dans des milieux variés me conduiraient à considérer la généralisation du tic, chez l'écolier, comme un effet de la contagion à laquelle est exposé l'enfant en travail de puberté, par suite de l'accroissement inégal qui agrandit la gaîne crânienne au moment où se réduit le taux de la croissance nerveuse (croissances réduites pubertaires) et qui crée ainsi des causes mécaniques d'excitation cérébrale. Certains enfants qui n'avaient pas contracté le tic régnant, avouaient leur regret de ne pouvoir pas « faire comme les autres » ! Le tic à l'école devient une mode. Il s'en faut que tous les tics soient contagieux, mais je ne parle que des tics contagieux, parce que leurs relations avec la puberté sont des plus étroites, puisqu'ils se rattachent à l'accroissement inégal. Les maîtres ont toutes facilités pour établir la contagion et son origine, ce qui n'est pas toujours à la portée du médecin non appelé à vivre de la vie de l'enfant. Quant aux cas originels, aux cas qui sont le point de départ de la contagion, ils relèvent de la patholo-
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gie nerveuse de l'adulte qui est en dehors de notre cadre. Onanisme d'origine pubertaire. — Lorsque l'onanisme devient une menace pour la santé, il relève ordinairement de causes pathologiques; mais il est des cas où il dérive d'effets manifestes de l'accroissement inégal parapubertaire. C'est à ce titre seulement qu'il en est question ici. Comme pour la céphalée de croissance et pour le tic, les cas d'onanisme inquiétant dont j'ai eu connaissance dans les écoles et dans les familles portaient sur des enfants peu éloignés de leur puberté. L'examen périodique me fit constater chez la plupart l'absence de cause provocatrice locale mais une augmentation brusque des diamètres crâniens. Or cette augmentation survenait chez des enfants d'intelligence moyenne, nullement surmenée, au moment où la préparation pubertaire réduit ou arrête l'accroissement du tissu nerveux. La brusquerie de l'augmentation de volume du crâne dénotait l'intervention de l'accroissement inégal pubertaire. Les autres causes éliminées, je crus pouvoir rattacher l'onanisme à cette cause mécanique de trouble psychique. Une réglementation appropriée des exercices physiques, une culture intellectuelle variée, choisie et notablement plus intensive; la suppression de toute boisson alcoolique, la médication que j'ai instituée pour l'accroissement inégal, et j'obtins en quelques mois un changement de l'aspect de l'état général de ces enfants
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qui impliquait la correction effective de la « déviation psychique ». Mais, en dehors de ces cas parapubertaires, l'onaniste invétéré est toujours un malade qui a un entourage malsain. Remettons donc le malade au médecin, et nous, éducateurs, chargeons-nous de la recherche des causes relevant de l'atmosphère morale, du milieu, des camarades, de l'ami, des lectures. Puis, d'après les résultats de cette double enquête, que soit orientée avec fermeté la direction éducative. En tous cas, il faut à l'éducateur beaucoup de doigté. Il sera sévère sur le choix des relations et écartera impitoyablement l'exemple dangereux; il exercera une surveillance loyale, et s'attachera à inspirer de la confiance à l'enfant rendu défiant par son vice même. Avec quelques-uns, l'éducateur pourra raisonner, en se gardant de toute exagération relativement au mal ou à ses conséquences. Il aura un souci constant de la vérité et n'oubliera jamais que le vrai physiologique, c'est l'éducation saine, l'exemple sain, la propreté morale de l'air que respire l'enfant. Tel est le vrai physiologique parce que telle est la sauvegarde de la chronologie des fonctions. Voilà pourquoi, de quelque côté qu'on l'envisage, la « déviation » susdite est une résultante et relève avant tout de la première éducation, celle qui pénètre l'enfant à la faveur de l'élevage. Il y a bien peu d'onanistes parmi les enfants nourris et élevés par leur mère.
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��CHAPITRE II
ACCROISSEMENTS A GRANDES ALTERNANCES CE QU'EN PEUVENT DÉDUIRE L'ÉDUCATEUR ET LE PÉDAGOGUE Rythme alternant de la croissance pour le rachis et pour le crâne. — Alternances dans le développement du germen.— Indépendance relative des évolutions de croissance à grandes alternances. —■ Rapports entre elles et avec la puberté. — Déductions pédagogiques et éducatives.
Rythme alternant de la croissance pour le rachis et pour le crâne. — Alternance est synonyme pour nous de succession du repos à l'effort, puis de l'effort au repos dans l'accroissement d'un organe, repos relatif, bien entendu. Nous connaissions les alternances brèves ou du moins un [certain nombre d'entre elles ; en voici maintenant qui s'étendent sur plusieurs années. La croissance du rachis est de ce nombre. Ses alternances ont une longue portée. Très active au cours de la vie intra-utérine, elle se ralentit à partir de la naissance jusqu'à la puberté, au point d'atteindre, à ce moment, sa plus faible longueur proportionnelle.
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Dès l'apparition de la puberté, le rachis se remet à allonger de façon à contribuer désormais plus que les membres inférieurs à l'allongement de la stature et cela continue jusqu'à ce que l'état adulte soit constitué. Pl. III. Le crâne offre un autre exemple de grande alternance d'accroissement. Il grandit dans tous les sens chez le fœtus et présente déjà à la naissance les trente centièmes du volume qu'il aura une fois adulte. Pl. IX. Son accroissement ne subit aucun arrêt chez l'enfant bien constitué, et continue activement jusque vers l'âge de cinq ans où se trouvent réalisés les quatre-vingt centièmes du volume définitif. Au delà de l'âge de cinq ans, l'accroissement du crâne acquiert en dix ans les vingt centièmes d'augmentation qui lui permettront d'être adulte à la puberté. Les repos de l'alternance ne sont pas marqués par des arrêts, tant pour le crâne que pour le rachis, mais seulement par des ralentissements de l'activité de croissance. Le crâne atteint l'état adulte aux environs de la puberté, et, bien que son activité d'accroissement ait été continue, elle s'est montrée très inégale, mettant neuf mois à réaliser le premier tiers de son volume définitif, puis cinq ans pour acquérir le second tiers environ, enfin dix ans pour achever ce qui lui manque. Alternances dans le développement du germen. Mais l'alternance de l'évolution du germen est de beau-
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coup la plus accentuée. Son développement, celui de la lignée séminale, se fait pendant la vie intra-utérine sauf la dernière étape, qui consiste dans la modification ultime de la spermatide en spermatozoïde. Cette transformation finale équivaut à la dernière partie de l'accroissement du germen. Elle s'effectuera au moment de la puberté, moment dont elle décide, puisqu'elle en est le phénomène essentiel. Pl. IX. Pendant toute la période qui s'étend de la naissance à la puberté, le repos du germen est complet. Indépendance relative des évolutions de croissance à grandes alternances. — Les trois facteurs organiques sont envisagés ici, le germen d'après les données anatomiques et fonctionnelles, G, le cerveau d'après le volume du crâne, C, le soma d'après le volume du tronc, V (voir p. 273). Leur évolution comparée présente à considérer a.) la modalité du développement et b.) le taux relatif de ce développement. Pl. IX. a.) Modalité du développement. — Le germen se développe en deux bonds espacés, l'un utérin, l'autre pubère. Le cerveau se développe en deux bonds successifs, l'un avant la naissance, l'autre aussitôt après. Le soma se développe sans faire de bond, de l'œuf à l'état adulte. b.) Taux relatif du développement. — A la naissance, le germen atteint déjà un point voisin, environ les quatre-vingt-quinze centièmes de son développement total. Le cerveau atteint les trente centièmes du sien.
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Le soma (tronc) réalise seulement les six centièmes de son état adulte. Pl. IX. A cinq ans, le germen est stationnaire. Le cerveau atteint les quatre-vingt centièmes de son état adulte. Le soma ne représente encore que les trente centièmes du soma adulte. A 15 ans x/2, le germen est adulte. — le cerveau est adulte. — le soma n'est pas encore adulte. Telle est, au cours de la croissance, la manière de se comporter des trois grandes composantes organiques de la vie. Elle peut se traduire ainsi au point de vue de ses conséquences éducatives. « Le transformateur-distributeur (soma) des éléments de la nutrition se développe avec régularité chez l'enfant sain, depuis l'œuf jusqu'à l'âge adulte, âge qu'il détermine par l'achèvement même de sa croissance. Le soma est devancé par le germen et par le cerveau qui sont adultes dès la puberté. Or tandis que le soma achevé est une condition importante de la meilleure fonction germinale, il n'est qu'une condition secondaire de la meilleure fonction cérébrale. Au lendemain de la puberté l'activité psychique n'échappera donc point à une direction éducative qui aura préparé cette période post-pubertaire, mais cette direction aura à tenir le plus grand compte de la maturité germinale qui n'est pas la maturité fonctionnelle, puisqu'une condition de haute importance fait encore défaut, mais qui. se trouve à chaque ins-
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tant sollicitée par le cortège même de la culture psychique. Avant la puberté, au cours de la vie « agénitale » l'activité psychique est entièrement disponible. La fonction cérébrale est prête, puisque l'achèvement somatique n'est pas pour le cerveau une condition fonctionnelle, puisque le germen immature sommeille, puisque enfin le cerveau est en possession de toutes ses cellules, qui n'ont plus qu'à s'hypertrophier. Il dépend de l'éducation que l'hypertrophie cérébrale devienne une richesse ou une pauvreté, un bienfait ou une menace, pour la société comme pour l'individu. Laisser s'effectuer librement ce travail d'hypertrophie, c'est abandonner 1' « ameublement» (Claparède) cérébral à la rue, à l'incurie éducative de la société, qui accumule les exemples hideux avec une monstrueuse inconscience. Uéducation est entièrement responsable de la valeur des acquisitions cérébrales de toute l'enfance. Pendant cette période de « vie agénitale » l'influence du germen ne se fait sentir somatiquement ou cérébralement, que chez les déviés, et, à moins d'état pathologique, c'est à l'éducation qu'il faut demander compte de la déviation.
��CHAPITRE III
DIVERSES APPLICATIONS PÉDAGOGIQUES
Pubères et non pubères. — Leurs différences somatiques et psychiques. Déductions pédagogiques. — a Moment éducatif de chaque organe. — Respect de la loi des alternances. — Croissance et intelligence. — Station en classe de l'écolier, nécessité de la varier.
Pubères et non pubères. — La vie de l'enfant, jusqu'à sa transformation en adulte, forme deux parts avec la puberté pour centre. L'enfant est pré-pubère ou il est post-pubère, si l'on peut ainsi s'exprimer, et plus simplement, l'enfant, l'écolier est pubère ou il ne l'est pas, la période pubertaire elle-même n'étant qu'un point autour duquel gravitent les transformations révélatrices, qui tendent vers les perfections désirables pour la conservation intégrale de la race. Pré-pubère, c'est l'enfant. Post-pubère c'est le jeune homme. L'enfant continue à grandir dans le jeune homme, mais nous savons quelles différences profondes marquent cette seconde partie du développement.
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Ce fait est capital pour l'éducateur et lui explique le sort différent du même procédé à l'égard du même enfant à ces deux périodes ou à l'égard d'écoliers qui, bien que d'âges voisins, sont les uns impubères et les autres pubères. Différence somatique et psychique entre les pubères et les non pubères. — Leurs corps sont à des degrés différents de développement, leurs proportions l'expriment clairement. Leur cerveau peut être très comparable, si leur éducation et leur culture a été la même; mais le cerveau de l'impubère est libre, celui du pubère est aux prises avec la prolifération conjonctive de la puberté et avec le germen. En dehors de ces conditions cérébrales et en dehors de la mentalité qui s'ensuit, les phénomènes de majoration, de réduction ou d'arrêt, de croissance totale ou d'involution affirment cette distinction entre le prépubère et le post-pubère. Les troubles pathologiques et para-pathologiques spéciaux de la puberté achèvent de l'établir. Entendons-nous bien : « pathologie spéciale » ne signifie pas ici toutes les affections auxquelles est exposée la période pubère. Par pathologie pubertaire spéciale, il faut entendre les troubles provoqués par l'essence même du phénomène pubertaire, et qui ne se produisent qu'au moment de la puberté, autour d'elle et à cause d'elle. Les troubles qui constituent la pathologie spéciale pubertaire, sont, en propres
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termes, les déviations de l'état physiologique qui résultent de l'accroissement inégal et de la mauvaise nutrition placentaire, ainsi que, dans une large mesure, de l'alimentation de l'année qui suit la naissance. L'impubère est un gamin que sépare de l'état adulte un nombre d'années plus ou moins grand; le pubère est un jeune homme qui est à une distance précise de sa nubilité, qui sera adulte dans cinq ans s'il commence sa puberté, dans quatre si elle a apparu l'année précédente, dans trois si l'éclosion pubertaire date chez lui de deux ans. Il n'a que 17 ans ce jeune homme, et il fait déjà un adulte parce qu'il a été pubère dès 12 ans, comme dans le cas cité plus haut des deux jumeaux dont l'autre, non pubère encore, sera nubile tout au plus tôt à 22 ans. Déductions pédagogiques. — Vous sentez bien que les procédés d'éducation ou d'instruction convenables pour l'un ne sont en rien appropriés à l'autre. Vous comprenez encore, d'après cela, que, hormis le foyer familial, des garçons aussi différents que le sont les pubères et les non-pubères, ne peuvent demeurer ensemble, partager la même vie, échanger des idées sans inconvénient pour les impubères qui ne tarderont pas à imiter les pubères dans tous leurs faits et gestes, préjudiciables aux uns comme aux autres, mais offrant pour les impubères un véritable danger. De là des désordres trop souvent irréparables.
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Rappelez-vous ce que nous a enseigné l'alternance pubertaire des accroissements organiques. Le cerveau qui possède les cellules qu'il avait déjà lors de la naissance, cellules qu'il n'a point renouvelées, dont il n'a pas accru le nombre, mais seulement les dimensions, le cerveau va devenir adulte à l'heure où éclora la puberté; il enfermera dans sa gangue désormais inextensible les enseignements recueillis précédemment; il greffera les notions nouvelles sur les acquis antérieurs; toute élaboration cérébrale portera, plus ou moins apparente, plus ou moins dissimulée, l'empreinte de l'instruction et de l'éducation reçues jusque là. Avant la puberté, vous avez eu le champ ouvert à toutes les cultures, mais aussi à toutes les imitations, aux rapides et précises assimilations. Veillez aux exemples, et, si malheureusement la famille n'a pas pris ce soin avant vous, éducateurs, attachezvous au plus tôt à l'œuvre d'orthopédie psychologique et morale et redressez de votre mieux, mais n'espérez pas effacer quoi que ce soit. Hâtez-vous d'utiliser la liberté prépubertaire de l'esprit de l'enfant, car demain, dominé par le germen triomphant, il deviendra lourd et fatigable, presque fermé dans les domaines où il était le plus ouvert. Heureux si votre ensemencement a été fait avec tact, avec discernement, si les exemples dont les sens ont meublé le cerveau étaient tous marqués au coin
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d'une pure morale ! Car du musée cérébral, nul ne peut compter dérober l'image de l'action mauvaise, de la scène immorale qu'une imprudence y a suspendu un jour passé. Elle y demeure et son évocation peut entraîner les pires conséquences à répercussion lointaine. La puberté sera tôt installée, et le jeune homme vous fera payer cher vos erreurs envers l'enfant, vos oublis, vos négligences. Il y a un moment éducatif de chaque organe. —• Chaque organe, suivant son développement et ses possibilités a son « moment éducatif », moment plus ou moins étendu dans le temps, mais où l'organe offrira réellement un état excellent de réceptivité éducative, si l'on a pris soin de le préparer. Ainsi le moment du cerveau est pré-pubertaire par les motifs que nous savons. Il commence à l'heure précoce où les sens commencent à informer le cerveau. A l'éducateur, il appartient de conformer son orientation, d'approprier sa méthode à ce qu'il peut dégager de l'individualité du petit enfant. Elle existe. Il s'agit de savoir la découvrir. A l'éducateur revient l'appréciation du dosage des notions, mais par-dessus tout de leur choix. Car les leçons, ici, sont faites toutes d'exemple, de manière de vivre, d'égalité d'humeur, de volonté ferme et douce, d'ordre, de régularité dans les soins; elles sont faites d'images, de celles-là mêmes qui sont pendues aux murs
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de la chambre, formant l'horizon habituel de l'enfant. Préparée depuis les premières heures de l'entendement, la direction se fera excellente et de plus en plus facile. Sans doute, au cours des années qui constituent la deuxième période d'évolution, de 6 à 15 ans environ, à côté des utiles provisions se font aussi les inutiles et les dangereuses, et cela, malgré l'éducateur qui, cependant, pourra rejoindre en temps utile la fuyante personnalité de son pupille, s'il a été renseigné exactement sur elle par des examens périodiques, par une observation méthodique et sagace. Il est clair qu'un éducateur averti de la sorte, ne suivra pas, pour atteindre la « citadelle » de l'enfant qu'il dirige, des chemins quelconques, mais bien ceux que lui tracent les notions acquises sur l'individualité de l'enfant. Il aura pour se guider la connaissance de son tempérament, autrement dit de la dose d'énergie dont il dispose, et de la façon dont il la dépense, de la rapidité ou de la lenteur avec laquelle il la récupère et du temps qu'il lui faut pour cette récupération. Il se guidera sur le rapport entre la durée de l'effort et la durée du repos récupérateur -§• (voir la formule individuelle).] Respect de la loi des alternances. — Vous ne pouvez vous faire une idée de l'influence sur le fonctionnement organique actuel et à venir, du respect ou de la transgression d'une phase de repos à la suite d'une
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phase d'effort. Les alternances organiques d'activité et de repos s'appliquent à toutes les manifestations de la vie de l'enfant comme à sa croissance. Elles s'imposent à l'entraîné comme au non entraîné; le premier réussit toutefois à allonger temporairement la phase d'activité aux dépens de la phase de repos. La transgression de l'alternance naturelle de l'individu conduit à un déséquilibrement organique à brève échéance ou bien à échéance plus éloignée (surmenage) suivant les ressources individuelles; chez ceux qui résistent, grâce à la richesse de leurs ressources, il arrive que plus tard un organe leur fait sentir qu'il en a pâti (cœur, cerveau, appareil digestif), ou que les effets avantageux recherchés par l'entraînement ne subsistent pas. Alternance et croissance intellectuelles. — Dans l'ordre intellectuel, les effets de la transgression de l'alternance ne sont pas meilleurs. Le maître a le plus grand intérêt à faire respecter par tous cette loi de nature, dont l'application aux écoliers exige toutefois du doigté et une connaissance parfaite de leur individualité, les phases de travail et de repos variant leur durée relative avec chacun. Mais cette application de la loi des alternances somatiques à l'activité cérébrale est, pour l'instant, en dehors de notre domaine. Elle représente un des aspects des rapports de la croissance avec l'intelligence, il est vrai; et ce chapitre qui comprend les
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rapports de l'accroissement du cerveau avec ses manifestations psychiques d'une part et avec l'accroissement du soma d'autre part, qui étudie les diverses influences sur le développement cérébral des facteurs capables de l'accélérer, de le retarder, de l'arrêter et leur répercussion sur l'intelligence, pourrait faire l'objet d'une étude, qui aurait'désormais une base somatique solidement établie. Du reste, vous trouverez matière à réflexion sur ce sujet dans les éléments rencontrés au cours des chapitres qui précèdent. J'appelle tout spécialement votre attention sur les accroissements à grandes alternances du cerveau, du soma et du germen (2me partie chap. II), sur les conséquences possibles de l'accrois* sèment inégal de la puberté, qui peut atteindre la croissance du crâne en fonction de celle du cerveau, comme il atteint celle de la moelle spinale en fonction de celle du rachis (2me partie, chap. Ier). Je vous signale encore la loi des alternances (p. 125 et 135), le tempérament, etc. Station en classe de l'écolier, [nécessité de la varier. — En classe, le respect de la loi des alternances intéresse simultanément le corps et l'esprit de l'enfant. L'une de ses modalités -se formule en ces termes : La station assise de l'élève n'est pas une position de repos; l'élève est tenu de la 'garder longtemps dans l'immobilité, et ses réactions en montrent les inconvénients. Quelle que soit l'excellence de la table-banc, et
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nous verrons plus loin qu'il s'en faut de beaucoup qu'elle soit excellente, l'immobilité dans une posture déterminée devient plutôt une gêne pour l'enfant, et dégénère en souffrance si elle se prolonge encore. La gêne se manifeste déjà par les déplacements fréquents des membres et du tronc et elle influe sur l'attention. La souffrance trouble la normalité physique et intellectuelle de l'enfant, elle la met en péril si elle dure trop et dans ce cas elle agit fâcheusement sur son état moral. Il n'existe pour l'homme que deux positions de repos ! la position couchée et la position accroupie (s'accroupir, s'asseoir sur les talons. Les vieilles femmes s'accroupissent auprès du feu1). Cette dernière posture est encore celle du bébé jouant avec le sable, celle de l'écolier jouant aux billes, celle de l'Arabe sur la place publique. Au souk et chez le cafetier, l'Arabe croise ses jambes repliées et prend une autre posture qui est la position assise sur le sol, analogue à celle des tailleurs d'autrefois sur leur large table sans appui pour le dos. Il n'y a de repos relatif pour le corps que dans des postures se rapprochant plus ou moins de ces deux positions. La station assise est intermédiaire à la position couchée et à la position accroupie. Elle participe de l'une et de l'autre, et plus de l'une que de l'autre suivant l'élévation du siège ou l'inclinaison du dossier; mais elle n'est ni l'une ni l'autre et ne donne
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Littré.
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pas le repos si elle n'est modifiée dans le sens de la position accroupie ou dans le sens de la position couchée. C'est cette dernière que recherche une personne assise sur un siège libre quand elle ne prend point d'appui fixe pour ses pieds et relève le devant de sa chaise, se renversant elle-même en arrière et se rapprochant ainsi de l'horizontalité. L'écolier corrige dans le même sens la position assise quand il se laisse glisser sur sa chaise jusqu'à ce que ses ischions correspondent à l'arête du siège, son buste décrivant une forte courbe à convexité lombo-dorso-cervicale pour permettre à sa partie supérieure d'épouser la direction du dossier. L'enfant est dit alors « assis sur le dos » par ses parents et ses maîtres qui s'y opposent sans succès. Si la disposition du siège par rapport à la table, sa fixité, l'existence d'un dossier presque vertical ne laissent pas à l'enfant la liberté de « s'asseoir sur le dos », il ne tarde pas à se placer obliquement sur sa chaise fixe, et à se mettre ainsi à même de corriger dans le sens de la position accroupie les inconvénients de la station en ~|_ que lui impose le mobilier qu'on pourrait dire « orthostat », l'angle droit régnant au niveau de l'axe bi-cotyloïdien fémoral et de l'axe des deux genoux : son buste, abandonnant la rectitude fatigante, s'incline en avant, se « tasse » en quelque sorte, en formant une convexité cyphotique qui, à travers les vêtements, paraît uniforme et à
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grande courbure. Sur l'enfant nu, on observe 1 au niveau de la région lombaire une saillie, une véritable bosse que l'on reconnaît constituée par les apophyses épineuses des 3me et 4me vertèbres lombaires, et à laquelle répond, en avant, une concavité ventrale plus ou moins anguleuse dont le sommet est formé par une dépression en sillon passant par l'ombilic, ou se dédoublant en deux plis dont l'un reste au-dessus, l'autre au-dessous de la cicatrice ombilicale. Il arrive fréquemment que la courbure rachidienne prenne l'aspect d'une cassure de la colonne au niveau de la saillie apophysaire, au-dessus de laquelle la colonne forme une ligne presque droite, inclinée de bas en haut et d'arrière en avant, tandis qu'au-dessous d'elle, la portion lombo-sacrée reste dans le plan vertical. Il faut que l'enfant ressente un besoin bien impérieux de repos pour recourir à cette posture mixte, qui est encore une fatigue, car elle ne représente que l'ébauche d'une position de repos et n'a d'autre avantage que de relâcher certains groupes de muscles et de déplacer un peu le lieu des pressions. Ou bien le mobilier scolaire supprime la fatigue de la station assise et enlève ainsi à l'écolier tout motif de rechercher une position de repos; ou bien le mobilier scolaire ne supprime pas la fatigue et alors il encourt une lourde responsabilité en entra1 Dr P. Godin. L'attitude scolaire : 1906.
l'Educateur moderne,
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vant toutes les positions de repos, et expose de ce chef l'écolier aux effets connus de la fatigue quotidiennement répétée. Le remède est précis et simple : l'enfant doit pouvoir varier sa station au cours de l'étude, au cours de la classe; il doit pouvoir se tenir debout et assis alternativement. La durée de la station assise est indiquée par l'échéance de la fatigue. En vertu des lois d'alternance, il y a intérêt à éviter tout ce qui peut faire transgresser les phases d'alternance, transgression néfaste pour l'économie et qui peut entraîner l'état de maladie. La fatigue qui naît elle-même de la transgression par l'effort trop prolongé de plusieurs phases de repos, implique, une fois acquise, une transgression de plusieurs phases d'efîortj et enraye l'activité individuelle. Dans l'espèce, la fatigue apparut en moyenne dans les classes où j'ai observé et expérimenté, au bout de 35 à 45 minutes. On fera donc varier la station de demi-heure en demi-heure. Cela fait un seul changement de position au cours d'une classe d'une heure. Quand les mobiliers de Féret, de Mauchin de Genève, de Schindler, voire même celui de Kottmann, l'optostat du Dr Rolland de Toulouse, celui de Brudenne seront anatomiquement individualisés selon la méthode simple que je propose, ils pourront, être utilisés avec le plus grand avantage, parce qu'ils facilitent ce changement de station sans trouble pour l'enseignement. Mais ils sont inutilisables tant
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qu'ils ne sont pas anatomiquement individualisés. Déjà, le siège convenablement bas aura laissé aux jambes une liberté dont auront bénéficié les muscles et la circulation. La position debout achèvera de réaliser cette action bienfaisante qui se traduira, ainsi que l'expérimentation me l'a démontré, par la substitution de l'« euryplastie » à la « macroplastie », par la croissance en grosseur des membres inférieurs, dans une plus juste proportion avec la croissance en longueur. Et l'on verra de moins en moins de ces pauvres collégiens « échassiers », maladroits sur leurs jambes trop longues, fatigables, terrain trop bien préparé à toutes les greffes bacillaires.
��CHAPITRE IV
INDIVIDUALISATION DU MOBILIER SCOLAIRE
C'est assis et non debout que l'écolier s'en sert. —Erreur résultant de la mesure de la taille debout de l'écolier prise pour guide dans l'attribution d'une table-banc. — Taille debout et taille assis. — Conditions anatomiques et conditions physiologiques qui doivent régler le choix du mobilier individuel. — Moyen simple de s'y conformer. — Manuel opératoire.
C'est assis et non debout que l'écolier se sert du mobilier scolaire. — Comme il n'est pas à la portée de tous les maîtres de faire varier la station au cours de la classe, et que tous les enseignements d'ailleurs ne comportent pas les changements de position, je me suis attaché à établir entre l'enfant et le mobilier qui lui est destiné, une relation aussi étroite que possible, à «individualiser» le mobilier scolaire, et j'en ai fait l'objet d'une longue communication au congrès des Sociétés Savantes en 1912, à Paris. Qu'est-ce donc que « l'individualisation » du mobilier scolaire ? C'est simplement son appropriation à l'enfant, à celui-là même qui est destiné à s'en servir. Cette appropriation ne peut se faire qu'autant que l'on prend pour guide l'anatomie et la physiologie
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de l'enfant dans leurs rapports avec la station assise, ce qui n'a pas été pris suffisamment en considération jusqu'ici. Il est indiqué, en premier lieu, que la table-banc s'approprie aux proportions réelles de Vindividu, telles qu'elles se présentent dans la position assise. Il est indispensable que cette appropriation anatomique subsiste à travers les changements apportés aux proportions du corps par la croissance. Jusqu'à présent, et cela dans le monde entier, c'est la taille, c'est-à-dire la hauteur de l'individu dans la position debout, qui a été prise pour guide et pour ordonnée de tous les classements de mobiliers scolaires : en Angleterre, le système bi-personnel de Moss offre 5 tailles. Le « Single Desk » des EtatsUnis tient compte de ^? tailles différentes. La Suisse, d'après les dimensions de Guillaume, accepte 8 tailles aussi. Le Conseil d'hygiène belge fait 12 catégories d'après la taille. M. Gréard réduisait à 3 le nombre des tailles d'après lesquelles devaient être construites les tables-bancs. Et c'est encore la taille qui a servi de guide aux études de la Commission d'Hygiène scolaire. Les derniers Congrès relatifs aux questions d'hygiène dans les écoles n'ont formulé aucune protestation contre cette méthode. Et quand Cardot, Bagnaux, Fahrner réclament des mesures multiples, ils ne les voient que comme des compléments du facteur taille. L'optostat du Dr Rolland répond à 3 tailles.
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Erreur résultant de la mesure de la taille debout de l'écolier prise pour guide dans l'attribution d'une table-banc. Taille debout et taille assis. — La connaissance très précise des « Proportions du Corps »1, de leurs variations d'un individu à l'autre, de leurs variations chez le même individu en travail de croissance d'un âge à l'autre, ne laisse aucun doute sur l'absence de corrélations fixes entre la taille et les rapports réciproques des segments qui entrent dans la constitution. Contentons-nous pour exemple d'envisager les deux grands segments, le membre inférieur et le buste. Par buste, nous le savons, on entend exactement tout ce qui dépasse le plan du siège de l'individu assis. Le rapport du membre S au buste B n'est qu'exceptionnellement le même chez deux jeunes gens de même taille, et, corollaire nécessaire, deux individus de taille égale dans la station debout deviennent de taille inégale dès qu'ils sont assis sur un même banc. Pl. XI. Ce fait, de vérification si facile, suffit à montrer à quelles erreurs peut conduire l'utilisation systématique de la taille quand il s'agit d'approprier individuellement un mobilier que l'enfant n'utilisera que pour S'ASSEOIR. Si, en effet, avec Féret, Mauchin,
1 Prof. L. Manouvrier. Etudes sur les rapports anthropométriques en général et sur les principales proportions du corps. D* Paul Godin. Les « Proportions du corps pendant la Croissance » Bulletin de la Société d'Anthropologie de Paris. Paris, Maloine, éditeur.
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Schindler, Kottmann, Brudenne, on veut adapter un mobilier assis à la position debout, il faut lui faire subir une véritable transformation qui entraîne un mécanisme compliqué. Voici un graphique qui donne une idée de ce que devient la ligne des têtes chez dix enfants de 13 ans et chez dix jeunes gens de 17 ans suivant qu'ils sont debout ou assis. Pl. XI. Debout, c'est une ligne droite horizontale; assis, c'est une ligne brisée en soufflet d'accordéon, comme l'a démontré M. L. Manouvrier. Le rapport -§-> rapport du buste (B) au membre inférieur (S), préside au rapport de hauteur entre le plan du siège et celui de la table. La distance entre ces deux plans est une résultante de la valeur du rapport -§-> et il serait indispensable de calculer ce rapport s'il ne se trouvait impliqué dans la détermination de la distance fixe du pupitre aux yeux. Conditions anatomiques qui doivent régler le choix du mobilier individuel. — Nous devons déduire de ce qui précède : 1° que la taille ne peut servir d'ordonnée au classement des tables-bancs; 2° que deux facteurs se substituent à ce facteur unique, les membres et le buste; 3° que chacun d'eux intéresse distinctement l'un des éléments du mobilier, les membres devant guider dans la détermination de la hauteur du banc, et le buste étant seul à même de dicter la différence entre banc et pupitre. En sorte que le constructeur devra bâtir des tables
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dissociables de leurs bancs, une table quelconque pouvant s'associer à un banc quelconque du modèle admis, le couplage et le découplage (à tenons, par exemple), pouvant s'effectuer avec autant de facilité que de rapidité. Table haute se mariera à siège bas et réciproquement, suivant le besoin. La table haute associée au banc peu élevé correspondra à un buste long soutenu par des membres pelviens courts. Un siège relativement haut, associé à une table dont la tablette est basse relativement, en ce sens que son plan est peu distant de celui du banc, sera approprié à un écolier de structure toute différente (macroskèle), bien que, peut-être, de taille égale, avec buste court et jambes longues. Si nous appelons X le premier de ces deux écoliers et Y le second, le mobilier de X ne pourra être utilisé par Y, et réciproquement, qu'au prix d'une gêne, d'une souffrance peut-être, et, en tous cas, au grand dommage de la régularité du développement et de la capacité de travail. Au cours de la croissance, les proportions respectives de X et de Y pourront rester les mêmes, mais on doit plutôt s'attendre à ce que chacun d'eux voie se modifier son rapport -§- qui, très généralement, se montrera différent suivant qu'on l'envisagera chez le même adolescent, avant ou après 1 la puberté. C'est qu'en effet, « la taille doit la plus grande part
1 D* Paul Godin. Alternances des accroissements au cours du développement du corps humain.... Société de Biologie, séance du 25 juin 1910, t. LSVIII, p. 1119.
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de son développement, avant la puberté au membre inférieur, après la puberté, au buste », ainsi que nous l'avons établi en étudiant les lois d'alternance pubertaire. Pl. X, A. Il y aura donc lieu de répéter le travail d'appropriation de la table-banc tous les semestres, tous les ans au moins. Conditions physiologiques qui doivent régler le choix du mobilier individuel. Moyen simple de s'y conformer. — Examinons maintenant les principes physiologiques sur lesquels doit s'appuyer l'appropriation individuelle. a) L'enfant, l'écolier a besoin d'être assis relativement bas. Toute personne fatiguée cherche le repos sur un siège bas, an siège dont l'arête et le plan ne compriment en aucun point toute la partie adjacente au genou de la face postérieure de la cuisse. Cette pression, à laquelle nul ne prend garde, est une cause actuelle de gêne qui provoque chez l'écolier en classe un déplacement fréquent des membres inférieurs, attribué trop exclusivement, au « besoin de mouvement » des enfants. A la longue, la compression de la face postérieure de la cuisse dans son tiers inférieur surtout, détermine des troubles circulatoires, nutritifs, nerveux, et contribue à l'empâtement des formes de la jambe comparées à celles des jambes des Arabes, par exemple; elle cause chez beaucoup d'adolescents une fatigabilité de leurs membres inférieurs
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dont on cherche la raison ailleurs, ou qu'on leur reproche comme un prétexte à la paresse. Or un siège convenablement bas, approprié à la hauteur de la jambe du sujet (SANS TENIR LE MOINDRE COMPTE DE SA TAILLE) évite cet inconvénient. La hauteur convenable est fournie par le point culminant du tubercule (tubérosité) antérieur du tibia, si visible sur la jambe nue de l'enfant, de profil surtout. b) L'écolier doit pouvoir distinguer sur la table les caractères d'écriture et d'imprimerie sans avoir à se pencher en avant, soit de la tête soit du rachis cervico-dorsal. La distance de 35 centimètres entre la table et l'œil est nécessaire et suffisante. Tout enfant emmétrope, ou rendu tel par les verres correcteurs, distinguera nettement le texte manuscrit ou imprimé, ainsi que les contours des lettres tracées par la pointe de la plume, si le plan binoculaire est à 35 centimètres du point de la tablette où court la plume. Il convient donc que cette distance soit comptée entre la ligne binoculaire et le centre du pupitre En général, l'inclinaison sera moindre pour les bustes courts, pour les macroskèles (Manouvrier) ; elle sera plus accentuée pour les bustes longs (brachyskèles). Cette différence répond à des proportions différentes corrélatives de la longueur du buste dans ces deux groupes; elle a pour but d'assurer l'appui naturel de l'avant-bras sur la tablette du pupitre
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sans élévation ou abaissement de l'épaule, condition du troisième principe physiologique (c) de l'appropriation individuelle. Telles sont les données qui, au point de vue de l'individualisation doivent compléter les règles générales touchant la « distance nulle », la largeur admise pour la table-banc, le mobilier à place unique. Une conséquence des raisons physiologiques qui exigent le siège bas, est, en outre de l'appuipieds, l'existence d'un plancher, d'un sol régnant sous le siège comme sous la table et que l'écolier peut aborder de ses deux pieds dans les diverses positions que ses jambes prennent spontanément. Une autre conséquence est l'adoption du dossier tel que le demande le Dr Dufestel dans [son hygiène scolaire (Paris, 0. Doin, édit., 1910, p. 76), « dossier légèrement incliné et remontant aux omoplates ». En résumé, banc à siège plan horizontal, répondant au niveau du culmen tibial antérieur de l'enfant qui doit s'y asseoir, et muni d'un dossier légèrement incliné et remontant aux omoplates ; la profondeur du siège sera égale à sa hauteur. Table à pupitre incliné davantage pour les bustes longs (grande « différence »), et moins pour les bustes courts (petite « différence »), le centre de la tablette se trouvant, pour chaque écolier, à 0,35 centimètres au-dessous de la ligne binoculaire (et les autres points de la surface, à une distance voisine de 0,35 centimètres), tout en permettant à l'avant-bras de s'y poser sans
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que la tête ou le tronc s'incline, ou bien que l'épaule ait à se soulever. Manuel opératoire. Bien simple sera le manuel opératoire destiné à déterminer pour chacun le banc et la table appropriés. A la rentrée des classes, dans une salle de l'établissement, sont rangés d'un côté des tabourets de hauteur progressivement croissante et numérotés de 1 à 20, de l'autre côté des tables-pupitres dont l'inclinaison peut varier à volonté autour d'un axe horizontal passant par le centre de la tablette ; la hauteur de ces tables est différente et elles sont également numérotées de 1 à 20. Ce sont les meubles d'essai. Les hauteurs des tabourets se succéderont de 5 en 5 millimètres et commenceront à 32 ou 33 cm. pour se terminer à 42 cm. ou 43 cm. s'il s'agit du lycée, avec quelques numéros supplémentaires en-dessus et en-dessous, pour les cas aberrants. Il en sera de même pour les hauteurs des tables de ce mobilier d'essai, qui s'échelonneront de 5 en 5 millimètres entre 52 et 62, par exemple. Dans la salle susdite, le jour de la rentrée des classes, l'écolier se présente les genoux nus, dégagés au-dessus et au-dessous. Il passe devant le rang de tabourets. L'expert muni d'une règle plate, arrête l'enfant dès que le plan d'un siège répond au niveau de la saillie du tubercule antérieur du tibia. Ce tabouret, qui se
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trouve numéroté 6, je suppose, est porté auprès d'une table. L'enfant se présente assis devant les tables successives jusqu'à ce que, son buste restant vertical, la règle en T de 35 centimètres prenne exactement place entre les yeux et le centre de la tablette. La table ainsi choisie est numérotée 14. Entre le plan de la table et celui du banc, la différence est grande, on a affaire à un buste long : admettons que l'inclinaison du pupitre soit de 18°. Ces trois nombres, 6, 14, 18° sont inscrits sur le registre en regard du nom de l'élève X.... L'ouvrier spécial couplera un siège 6 avec une table 14 à pupitre incliné à 18°. Dans l'aménagement de la classe, cette table haute sera placée vers le fond, les premiers rangs étant réservés aux tables basses, et le mobilier de l'élève X.... se trouvera en un point du plancher de la classe où la craie aura tracé soit un numéro, soit le nom même de l'élève. Il est procédé de même pour chaque écolier. A la première entrée en classe, le maître ayant le registre sous les yeux aura la plus grande facilité à répartir les places sans désordre. Tout cela se fait très vite, et assure vraiment l'appropriation individuelle de la table-banc, ainsi que j'ai pu m'en rendre compte par de nombreux essais dans les écoles. Quand au degré d'inclinaison du pupitre, il suffit, empiriquement, de faire varier l'obliquité de la ta-
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blette de façon que l'appui de l'avant-bras soit assuré et aisé, le centre de la tablette demeurant invariablement à 35 centimètres du plan binoculaire. L'écolier est, de la sorte, en possession d'une tablebanc qui répond vraiment à ses proportions dans la position assise et qui est conçue de façon à suivre les changements que la croissance lui fera subir. L'enfant et l'enseignement ont le plus grand intétêt à la mise en pratique de ce procédé si simple et qui est une garantie pour la liberté du développement du corps, comme pour la liberté de l'activité cérébrale.
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��CHAPITRE V
CONTROLE DE L'ÉDUCATION PHYSIQUE PAR LA MÉTHODE AUXANOLOGIQUE Compte à tenir de la Croissance. — Contrôle des effets de l'exercice à la barre fixe sur le développement de la stature, du thorax, du bassin, des membres. — Gymnastes et non gymnastes. — Causes diverses d'abstention. — Conclusions relatives aux résultats de l'exercice visé et à la méthode de contrôle.
Compte à tenir delà croissance. — Nous sommes en possession d'une méthode précise de détermination des conditions anatomiques présentées par un enfant à un moment donné de sa croissance. En effectuant cette détermination, avant de lui appliquer un régime d'éducation physique ou un régime scolaire, et en répétant cette opération après quelques mois ou quelques semestres d'emploi de ce régime, la différence exprimera nettement le gain réalisé. Il y aura toutefois à répartir ce gain entre deux facteurs, l'apport de la croissance spontanée s'étant sans cesse ajouté à l'apport dû au régime suivi. C'est là qu'apparaît clairement la nécessité de l'étude préalable de la croissance telle que nous venons de la faire, à défaut de quoi nous serions hors
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d'état d'apprécier mieux que nos devanciers les résultats d'une forme quelconque de l'éducation physique ou d'une condition malsaine de développement créée à l'enfant par le régime qu'il subit. Prenons pour exemple un exercice momentanément démodé, l'exercice à la barre fixe. La barre fixe était répandue dans les cours des écoles où j'ai observé, à la disposition des élèves pendant les récréations. Les exercices auxquels elle donnait lieu étaient de véritables jeux, méthodisés toutefois par les leçons périodiques de gymnastique, et rendus par là utiles sans cesser d'être des jeux. Dans le mémoire intitulé : « Du rôle de l'anthropométrie en éducation physique » que j'ai publié en 1901, et que l'Académie de Médecine a couronné en 1912, j'ai traduit le plus possible en courbes les faits individuels. Je vous en donne seulement une interprétation concise, suffisante cependant pour vous permettre de bien saisir la marche d'une observation qui tient de l'expérimentation par divers côtés, et qui se moule sur les faits successifs. Elle utilise les points de repère admis en anthropométrie et la comparaison incessante des enfants en expérience avec un nombre égal d'enfants témoins. Je serais heureux que vous trouviez un guide pour vos évaluations éducatives ou pédagogiques dans cet exemple pratique d'application de la méthode auxanologique à une matière sur laquelle l'éducateur est chaque jour questionné.
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Contrôle des effets de l'exercice à la barre fixe sur le développement de la stature, du thorax, du bassin, [des membres. Gymnastes et non gymnastes. Taille. — Les courbes individuelles I, /, de la Pl. XII, représentent deux adolescents qui sont partis de 1 m. 43 pour aboutir finalement à 1 m. 64. Le gymnaste monte un peu plus haut que le non gymnaste, et atteint 1,645 milimètres. Le même fait nous frappe quand nous jetons un coup d'œil sur les courbes suivantes. Le trait plein est constamment aussi long, plus long même que le trait interrompu; le gymnaste, de même taille, à 14 ans que le non gymnaste, le dépasse à 18 ans. Tant que la différence ne s'élève pas au-dessus de 1 centimètre, on doit cependant considérer qu'il y a égalité, comme l'enseigne M. Manouvrier. C'est ce qui a lieu pour les courbes de taille I. La supériorité devient au contraire absolue dans les groupes V et VII, en faveur des gymnastes. Pl. XII. Le dessin des deux courbes, portant le même numéro, n'est pas le même. Le trait plein se rapproche beaucoup plus de la ligne droite que le trait interrompu. La comparaison des portions d'une courbe à trait plein avec celles de la courbe à trait interrompu correspondante, donne lieu à des remarques intéressantes. Dès le départ, elles présentent des différences de longueur qui se poursuivent dans toute l'étendue de la courbe.
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Les composantes du trait plein ont le plus souvent des longueurs à peu près égales entre elles; celles du trait interrompu sont de dimensions très inégales. Entre deux courbes de gymnastes, partant du même chiffre, il y a souvent des ressemblances frappantes, et quelquefois les mêmes chiffres aux étapes correspondantes. Tandis que, pour les non gymnastes, partis d'une taille commune, on ne peut établir aucun rapprochement de ce genre. Laissant de côté les détails de l'évolution et son rythme, ne pouvons-nous pas déjà tirer des cas individuels que nous venons d'étudier, la déduction suivante : de deux adolescents de même taille à 13 ans V , celui qui atteint la taille la plus élevée est le gymnaste. Les cas individuels analysés sont forcément peu nombreux, mais les mêmes phénomènes s'observent sur tous ceux que je possède, à peu de chose près. C'est ici du reste que les moyennes calculées sur un grand nombre de courbes particulières, vont nous fournir des données d'une importance telle qu'elles suffiront à infirmer ou à asseoir la déduction qui précède. Les moyennes inscrites en A et B ont' été calculées sur 100 individus dont 50 se livraient à la gymnastique, tandis que les 50 autres pouvaient être considérés comme non gymnastes. Pl. XIV, A et B.
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La ligne A, taille, partie comme la ligne B de 142, atteint 163, tandis que la ligne B s'arrête à 160. Nous pouvons maintenant, avec de grandes chances de certitude, formuler la proposition que voici : La gymnastique aux appareils n'empêche pas de grandir. Il est même probable que l'allongement de la taille chez les gymnastes est plus accentuée que chez les non-gymnastes. Ceci, pour les adolescents à la période qui s'étend entre 14 */2 et 18 ans. Périmètre thoracique. — Après la taille, examinons comment s'est comporté le périmètre thoracique dans les mêmes circonstances. Les tours de poitrine sont précisément ceux des six sujets dont nous venons d'étudier la taille. Pl. XII. Au premier coup d'œil, on se rend compte que la circonférence thoracique du non gymnaste se différencie totalement de celle du gymnaste. Celle-ci se dresse, l'autre se couche. Celle-ci franchit 15,17, 20, 21 centimètres; celle-là croît de 10 centimètres, et le plus souvent de 8, de 6 et même de 4 centimètres seulement dans le même laps de temps. Le développement de la cage thoracique se fait dans ces deux circonstances de façon toute différente. Dans une analyse du mode et du rythme de la croissance, nous remarquerions que l'élargissement de la cage thoracique qui se chiffre souvent par un nombre de centimètres supérieur à celui?de la taille
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paraît indépendant de l'allongement total du corps. Il affecte un rythme spécial qu'il serait intéressant de rapprocher de celui du tronc. Mais cela n'a pour nous, en ce moment, qu'un intérêt secondaire. Ce qu'il nous importe de savoir, ce sont les caractères essentiels qui marquent la différence entre la cage thoracique d'un gymnaste et celle d'un non gymnaste au point de vue de leur augmentation circonférencielle. Nous avons remarqué d'abord, ainsi que nous le disions tout à l'heure, la supériorité de l'accroissement totale du thorax du gymnaste sur celui du non gymnaste. Cette supériorité est bien plus accentuée qu'elle ne l'est pour la taille, et il est commun de trouver 8 à 10 centimètres d'écart à 18 ans, entre deux jeunes gens présentant un périmètre égal à 14 ans 1/2. On peut s'en rendre compte en examinant les courbes périmétrales à trait plein et à trait interrompu du groupe VII. La fréquence des plateaux est grande au cours de l'évolution de la cage thoracique ; chez les non gymnastes, ces plateaux, plus nombreux encore, se singularisent par leur étendue. Il n'est pas rare d'observer le statu quo pendant trois, quatre, jusqu'à cinq semestres, comme on le voit sur les courbes à traits interrompus des groupes V et VII, chez les enfants qui ne font pas de gymnastique. Il faut reconnaître que cela se rencontre aussi chez
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les gymnastes, mais en général au sommet de la courbe et non plus à sa base. Ce n'est plus avant de se développer que s'observe la période stationnaire (voir courbes à traits pleins V et VII) mais seulement après avoir atteint une certaine ampleur, et souvent son développement maximum. Les courbes à traits pleins comparées les unes aux autres ont un. air de famille : leur allure générale est caractérisée par une ascension rapide coupée de courts arrêts suivis aussitôt de nouvelles poussées ascensionnelles d'une grande vigueur. Tandis que les traits pleins montent presque droits, les courbes à traits interrompus se rapprochent du plan horizontal; parfois leur tendance ascensionnelle est presque nulle, comme dans la courbe V. A part cette forme d'ensemble qui est l'expression d'une grande lenteur dans l'élargissement du thorax osseux, les courbes périmétrales des non gymnastes ne supportent aucun rapprochement entre elles, tant est variable leur constitution, tant elle est capricieuse. Il n'en résulte pas moins avec évidence que le thorax d'un gymnaste s'accroît plus vite et atteint un élargissement final bien supérieur à celui d'un non gymnaste. Les moyennes calculées sur 100 cas particuliers (50 gymnastes et 50 non gymnastes) et ramenées à un même périmètre originel, confirment ce qui précède et permettent de formuler une nouvelle propo-
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sition : La gymnastique [aux appareils procure à la cage thoracique plus d'ampleur qu'elle n'en prendrait spontanément entre 14 et 18 ans. Pl. XIV, A etB. Poids. — Considérons maintenant le poids chez les gymnastes et les non gymnastes, et voyons ce qu'il devient pendant que la taille s'allonge et que le buste s'élargit. Nous trouvons une augmentation de poids appréciable de part et d'autre. Mais, tandis que chez les non gymnastes cette majoration totale oscille autour de 14 kilos, elle devient 20, 25, 27, 29 kilos pour les gymnastes. La forme de la courbe qui exprime l'augmentation progressive du poids, tient en quelque sorte le milieu entre la courbe taille et la courbe périmètre thoracique. Pl. XII. Les plus grandes analogies sont avec cette dernière. Nous retrouvons la même vigueur ascensionnelle que pour la taille dans la courbe poids du gymnaste. Pour le non gymnaste la courbe poids se moule en quelque sorte sur la courbe périmétrale. En fin d'analyse, l'accroissement en poids du gymnaste est toujours supérieur à celui du non gymnaste. Le trait plein est constamment plus long que le trait interrompu. Nous pouvons formuler d'après les cas particuliers comme d'après les moyennes notre troisième proposition : La gymnastique aux appa-
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reils accroît la densité des tissus, le poids du corps des adolescents de 14 x/2 à 18 ans. Le gymnaste atteint presque toujours à 18 ans un poids supérieur à celui du non gymnaste. Organes thoraciques. — Voyons, maintenant, comment l'anthropométrie nous renseigne sur les modifications apportées par la gymnastique à certaines dimensions partielles du corps de l'adolescent, et nous indique dans quelles limites ont varié les rapports que ces dimensions avaient entre elles au début de la période d'expérimentation. Bassin et thorax. — Cherchons, par exemple, dans quel rapport se trouve le bassin vis-à-vis du thorax ; quels sont les rapports circonférenciels des membres inférieurs avec les membres supérieurs. Pl. XIII. Sans entrer dans une analyse minutieuse des faits, nous voyons en lisant les courbes du groupe B (moyennes), que spontanément la vie civilisée, au collège comme dans la famille, favorise le développement du bassin et celui des membres inférieurs avec plus d'activité que celui du thorax, du diamètre bi-acromial et des membres supérieurs : les non gymnastes nous présentent un accroissement du diamètre du bassin supérieur de beaucoup à celui du diamètre du thorax, ainsi que du diamètre biacromial. Chez eux, les circonférences de la cuisse et du mollet ont un développement notablement plus considérable que ne l'est le développement des cir-
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conférences du bras et de l'avant-bras maxima. Moyennes et cas individuels sont unanimes et permettent en conséquence de déduire ce qui suit : Le membre inférieur, en tout temps sollicité à l'action, croît en volume davantage que le membre supérieur chez les individus de 14 1/2 à 18 ans qui s'adonnent aux occupations courantes de la vie urbaine, de la vie de collège, sans pratiquer la gymnastique aux agrès; chez eux le diamètre du bassin présente un accroissement total plus considérable que celui du diamètre thoracique et biacromial. Voilà ce que démontre l'examen des courbes du groupe B. Si nous passons des non gymnastes aux gymnastes, si nous jetons les yeux sur les groupes A (moyennes) la quasi égalité des courbes nous saute aux yeux par son contraste même avec l'inégalité de tout à l'heure. Cette longueur à peu près équivalente des courbes, traduit la tendance de la ceinture thoracique et des membres supérieurs à prendre un développement plus considérable sous l'influence de la gymnastique. Nous voyons la circonférence du bras (prise au niveau du biceps) gagner presque autant de centimètres que la circonférence de la cuisse. L'avant-bras, lui-même, malgré des arrêts, bénéficie d'un accroissement en volume (périmètre relevé au niveau de son maximum) égal à celui du mollet.
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Un tableau très simple nous rendra plus saisissable la différence d'accroissement des diamètres et circonférences mesurées, suivant qu'on les envisage chez les gymnastes ou chez les non gymnastes.
Supériorité dans Vaccroissement des organes thoraciques due à la gymnastique.
SUR UNE PERIODE DE
4
ANS ENVIRON Accroissem. total moyen en centimètres
Longueurs diamétrales et circonférencielles
chez les non chez les gymnastes gymnastes
Diamètre
bi-acromial du thorax du bassin
Circonférence
4 3 6 4 6 3 5
6 5 6 5 6 6 6
du bras de la cuisse de l'avant-bras du mollet
On retrouve sur ce tableau les chiffres inscrits sur les courbes des moyennes des groupes A et B, qui ont servi à l'établir. D'un coup d'œil on embrasse les bénéfices dus à la gymnastique pour toute la partie thoracique du corps de l'adolescent. Les mêmes diamètres de la portion thoracique du corps sont représentés par des chiffres différents suivant qu'ils appartiennent au gymnaste ou au non
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gymnaste. Cette remarque s'applique également aux circonférences supérieures. Diamètres et circonférences au contraire, demeurent identiques ou peu s'en faut chez les deux groupes quand ils concernent la moitié pelvienne du corps. Il semble donc que nous soyons autorisés dès maintenant à poser le principe suivant qui se déduit des faits individuels comme des moyennes. L'égalité dans l'accroissement en volume des quatre membres ainsi que dans l'élargissement simultané (diamètres transverses) du thorax et du bassin, tend à s'établir sous l'influence de la gymnastique, chez les adolescents de 14 ans et demi à 18 ans. Résultats généraux. — Faisons maintenant un retour en arrière, et examinons dans leur ensemble les chiffres et les courbes, pour savoir si nos quatre propositions expriment bien tout ce que signifient les faits représentés sur les graphiques. Il n'est pas nécessaire de poursuivre longtemps l'examen pour entrevoir une idée générale de la plus haute importance et qui naît de toutes pièces de la stricte observation des faits : C'est l'action régulatrice sur la croissance de la gymnastique aux appareils. Cet exercice, nous a-t-il été démontré, n'empêche pas de grandir; il semble même favoriser jusqu'à un certain point la croissance du corps en longueur, l'élévation de la taille, en d'autres termes. Nous avons encore acquis la conviction que la
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cage thoracique prend, sous l'influence de la gymnastique aux appareils, plus d'ampleur qu'elle n'en prendrait spontanément. Et aussitôt nous trouvons un contrôle de cette amélioration dans la comparaison avec l'élargissement du bassin. Spontanément le bassin gagne en largeur, dans un temps égal, plus que le thorax. Quand la gymnastique intervient, le thorax s'élargit presque autant que le bassin, lequel ne ralentit cependant pas son développement dans ces circonstances. Le même phénomène se reproduit en s'accentuant, lorsque nous rapprochons les circonférences du membre thoracique de celles des parties correspondantes du membre pelvien, et l'inégalité dans l'accroissement progressif et dans l'augmentation totale entre ces deux groupes d'organes s'atténue et disparaît même parfois. La gymnastique aux agrès a contribué à rétablir l'équilibre. Cette action régularisante se traduit, sur toutes les courbes ci-jointes, par la simultanéité dans l'accroissement de la taille, du périmètre et du poids, par la tendance à l'égalisation des développements partiels des deux moitiés thoraciques et pelvienne supérieure et inférieure du corps humain. Cette action se manifeste encore par la raréfaction des temps d'arrêt et l'atténuation des secousses qui se produisent au cours du développement du corps, ce qui prend les proportions d'une régularisation générale du rythme de la croissance.
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Autant de faits précis, qui, physiologiquement interprétés, conduisent à cette conclusion : La gymnastique aux appareils ne réduit aucun des phénomènes vitaux qui se manifestent par l'accroissement morphologique de l'organisme. Le travail nutritif et sa répartition uniforme dans toute l'économie sont énergiquement favorisés par ce procédé de l'éducation physique. Tant il est vrai qu'en matière d'éducation physique, « il n'y a pas de mauvais moyens, il n'y a que de mauvais maîtres »1. Ici le maître habituel a été la nature et l'imitation libre. Je ne mentionne même pas la leçon hebdomadaire, dont on sait la valeur pour l'immense majorité. La gymnastique est restée un jeu. La même étude est à faire pour d'autres engins. Mais si la barre fixe donne de si bons résultats, que n'est-on pas en droit d'attendre d'appareils moins « congestifs 2 », mieux compris, plus conformes aux aptitudes de l'homme et à son mode de lutte pour la vie. Ai-je besoin de faire remarquer qu'aucun des éléments de classement qui précèdent n'aurait pu être recueilli sans l'anthropométrie. L'intervention de l'anthropométrie permet de subtituer des idées précises et justes sur les effets de la gymnastique aux idées trop souvent fausses et toujours vagues qui ont eu cours jusqu'ici.
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Ph. Tissié : La fatigue, Paris, 1897. Ph. Tissié : Art. Gymnastique; — Larousse.
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Causes diverses d'abstention. — « Les enfants qui ne se livrent pas à la gymnastique, ne seraient-ils pas des enfants constitués d'une façon relativement désavantageuse à quelque point de vue, et ne seraient-ils pas incapables d'atteindre, même avec le secours de la gymnastique, un développement squelettique et musculaire égal à celui des enfants portés à s'exercer avec une certaine violence ? Une sélection ne se produirait-elle pas dès les premiers essais qui seraient encourageants pour les vigoureux « ayant de l'étoffe » et décourageraient au contraire les faibles de constitution et de complexion ? » Telle est l'objection qu'a bien voulu me faire M. Manouvrier. Je l'en remercie. Cette question a en effet une grande importance et, en essayant d'y répondre, je vais combler une lacune de mon mémoire. Oui, incontestablement, il se produit une sélection dès les premiers essais. Ces premiers essais sont en effet encourageants pour les uns, mais ils ne sont pas également décourageants pour tous les autres. Quelques-uns de ces derniers tiennent bon dès ce moment. Un plus grand nombre s'éloignent des agrès ; parmi ces derniers, il en est qui reviendront d'eux-mêmes, il en est qui auront besoin qu'une circonstance ou un ordre les y ramène; d'autres enfin resteront réfractaires. Dans les rangs des réfractaires se trouvent des adolescents qualifiés de «malingres». A ceux-ci j'ai prescrit la gymnastique pour unique médication.
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J'en puis grouper quatorze, dont sept ont suivi mes prescriptions tandis que les sept autres ont négligé de s'y conformer. Les quatorze étaient malingres au même degré, de tempérament également hyposténique et de proportions très voisines, présentant toutefois des caractères un peu différents, autant que j'ai pu m'en rendre compte. Pl. XIII et XIV. J'ai exclu les adolescents porteurs de difformités même légères, scoliotiques ou autres. Ces quatorze malingres n'ont pris, naturellement aucune part à la constitution de la série de 100. Les moyennes ont été établies pour chacun de ces deux groupes dans les mêmes conditions que pour les gymnastes et les non gymnastes précédemment étudiés. Examinons maintenant ce que mettent en lumière l'observation d'une part et d'autre part ces deux groupes de moyennes présentées comme précédemment sous forme de courbes. 1er Groupe : Gymnastes. — Ces rebuts de la sélection de la première heure ont pu, quoique de deux ans plus âgés, et de constitution aussi débile qu'à leur arrivée à l'école, se livrer à la gymnastique, y réussir, et qui mieux est, en bénéficier au point d'être aptes à l'engagement volontaire à 18 ans. 2e Groupe : non gymnastes. — Ces sept adolescents présentaient des conditions sensiblement pareilles à celles des sept qui se sont soumis à la gymnastique prescrite. Mais, soit par entêtement simplement capricieux, soit par amour-propre, soit par indifférence,
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soit par désir de se faire exclure de l'école, chacun de ces sept malingres, qui ne donnaient pas dans les différents actes de la vie de signes de paresse plus prononcés que leurs camarades gymnastes, chacun s'est abstenu d'une manière absolue de toute gymnastique. En les obligeant à jouer à toutes les récréations, à prendre part à toutes les marches et à tous les exercices de plein air, à recevoir enfin à l'infirmerie une dose quotidienne d'huile de foie de morue, j'avais pensé suppléer à l'inaction gymnastique. Or aucun de ces sept non gymnastes n'a pu s'engager à 18 ans. Tous cependant avaient atteint la taille réglementaire, mais présentaient à l'heure de l'engagement un périmètre thoracique insuffisant et un poids trop faible. Je ne crois pas que les résultats demeurent aussi absolus avec des séries plus nombreuses que ne le sont celles-ci. Il me semble toutefois que ces faits dégagent avec assez de netteté des influences connexes, l'influence de la gymnastique et qu'il y a lieu de reconnaître qu'elle exerce sur tous les adolescents une réelle action bienfaisante quelque peu secondée qu'elle soit par suite de mauvaises dispositions naturelles, comme il s'en rencontre, cela est hors de doute, chez les malingres. La sélection qui se produit dès les premiers essais est confirmée par l'existence même de cette catégorie de malingres, par l'adaptation des uns et la répulsion des autres.
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La cause de cette sélection n'est certainement pas une. La constitution paraît, au premier abord, avoir une influence prépondérante. Mais, un nouveau facteur apparaît bientôt qui prend le pas, dans certaines circonstances, sur la constitution physique; je veux parler du caractère. Ne voyons-nous pas, en effet, un certain nombre de ceux qui s'étaient éloignés des agrès au moment de leur arrivée à l'école, s'en rapprocher plus tard sous l'influence d'un incident insignifiant en apparence, et qui n'agit comme cause déterminante que parce qu'il était de nature à faire résonner la tonique, la génératrice fondamentale de la gamme du caractère de l'adolescent. Leur ardeur dure exactement ce que dure la cause déterminante, l'initiative s'éteint avec les dernières vibrations de la tonique. Il arrive qu'ils aient le temps d'exceller dans l'exercice choisi, bien que leur constitution moyenne ou faible ait paru a priori une raison suffisante de leur abstention. Puis brusquement, ils redeviennent abstentionnistes comme devant, tout en conservant l'acquis dû à leur pratique temporaire. N'est-ce pas aussi le caractère qui imprime leur tournure aux actes de cet autre adolescent? Il est aussi peu musclé à 15 ans qu'il l'était à 14; il se détermine cependant à faire de la gymnastique à sa deuxième année de scolarité. Agit-il par souci d'assurer son aptitude physique future à l'engagement volontaire ? N'a-t-il pas plutôt pour but d'apprendre à se défen-
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dre, fatigué qu'il est d'être victime ? Ses agresseurs sont pour la plupart des gymnastes, il l'a remarqué et veut devenir gymnaste pour être de force à leur tenir tête. Mouvements courants, mouvements dits « de force » n'ont bientôt plus de secrets pour lui. Ce faible a réussi à faire un gymnaste, comme les forts ; gymnaste imparfait pourtant, car les exercices périlleux constituent autant d'obstacles insurmontables. Quand il est mis en demeure d'exécuter l'un d'eux, il est envahi par un malaise vague dans sa forme mais d'une puissance d'inhibition décisive. Il se reconnaît capable de l'effort qu'il exige, il se sent la souplesse et l'adresse nécessaires; il pourrait enlever ce mouvement tout comme un autre; et cependant il reste comme cloué sur place. Et il assiste sans volonté à la reproduction de ce phénomène en présence de chacun des exercices qui réclament de la hardiesse. Il est devenu gymnaste jusqu'à un certain point, mais il est aussi incapable de se défendre qu'avant de l'être. Comment pourrait-on dans ce cas faire peser sur la constitution la responsabilité de l'abstention de la première heure, et ne pas reconnaître l'influence, sur cette manière d'agir, du caractère de l'adolescent? Cet exemple montre encore que la constitution est sujette à se prêter à une virtuosité que sa faiblesse ne laisserait pas prévoir. Il n'y a donc pas, à proprement parler, de constitution normale qui ne puisse s'adapter aux exercices
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de la gymnastique aux agrès. Certaines constitutions sont plus avantageuses que d'autres, mais aucune n'est désavantageuse d'une façon absolue. En revanche, certains enfants trouvent dans leur caractère l'obstacle que ne leur a pas opposé la constitution ou la complexion qui leur est propre, et qui gêne la pratique d'une partie plus ou moins étendue de la gymnastique. Dans les autres exercices, dans les jeux, ce «défaut» du caractère a des conséquences analogues et capables de priver la constitution des occasions les meilleures de se fortifier. S'il n'y a pas de constitution réfractaire aux exercices gymnastiques, s'ensuit-il que toutes les constitutions tirent un égal bénéfice de sa pratique ? Les faits établissent que le bénéfice est relatif; en d'autres termes, des muscles grêles acquerront le maximum de développement dont ils sont capables, le maximum de force que comporte leur contexture sans que soit changée cette contexture qui posera elle-même une barrière anatomique au progrès physiologique. Il en est de même des proportions squelettiques, et il sera exceptionnel de voir des systèmes d'un dessin délicat prendre des formes épaisses sous la seule influence de la gymnastique. Les proportions relatives se sont par contre notablement améliorées. Les courbes des malingres (voir page 24) nous montrent que chez eux, aussi bien que chez les gymnastes précoces, le développement des organes thoraciques a pris un essor, inconnu jusque
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là, à dater du moment où a été inauguré ce « traitement » spécial. Les organes thoraciques de ces malingres se sont accrus presque autant que leurs organes pelviens. Le périmètre thoracique et le poids ont progressé d'une façon bien différente et autrement considérable chez les malingres gymnastes qu'ils ne l'ont fait chez les malingres non gymnastes. En un mot, si la gymnastique n'a pu changer la contexture anatomique, si elle n'a pu, sauf exception, faire de gros muscles avec des muscles grêles, elle a du moins fait acquérir à ces muscles la puissance d'action la plus grande que comporte leur contexture. Quant à son influence très indirecte sur le squelette, elle est plus aisément appréciable à la vue chez le faible que chez le fort, parce que les muscles du premier couvrent les os d'un voile moins épais, mais elle n'est pas plus marquée chez l'un que chez l'autre. Les effets des exercices sur le squelette méritent du reste une étude particulière qui viendra en son temps. En attendant, à ne se baser que sur les progrès relatifs du poids, on peut noter que la gymnastique grossit le squelette du fort comme le squelette du faible dans une certaine mesure. Peut-être, dans la présente discussion, pourrait-on se placer à un autre point de vue et envisager directement les groupes formés par la sélection qui se produit dès les premiers essais, comme l'avait prévu M. Manouvrier.
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Jetons tout d'abord les yeux sur les chiffres inscrits à l'origine des courbes moyennes des non gymnastes, et rapprochons-les des mêmes chiffres des courbes moyennes des gymnastes. Ces nombres expriment les moyennes de mensurations relevées au moment même où s'est opérée la sélection qui nous intéresse. Or ces nombres sont à peu près égaux, ce qui signifie déjà que la vigueur n'est pas l'apanage d'un seul des deux camps, pour peu qu'on admette que les mensurations prises soient capables de renseigner sur la vigueur des adolescents observés. Si l'on procède à une sériation des chiffres fournis par les mensurations individuelles et qu'on ait soin de répéter cette opération pour chacun des deux groupes, on s'aperçoit qu'aucun des deux camps n'offre l'homogénéité sur laquelle on aurait cru pouvoir compter, et que, tout au contraire, l'un et l'autre présentent des forts et des faibles. La comparaison entre eux des éléments de cette double sériation démontre clairement que la proportion de forts et de faibles est sensiblement égale de part et d'autre, ainsi, naturellement que la proportion de constitutions moyennes. Cet examen direct des groupes, résultant de la sélection, qui suit les premiers essais, nous amène donc à considérer comme secondaire le rôle de la constitution dans cette sélection, laquelle se produit sous les influences multiples dont quelques-
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unes des principales ont été étudiées plus haut. A un autre titre, cette répartition initiale provoquée par la gymnastique est encore intéressante. Elle fournit une indication précieuse d'intervention médicale ou morale et parfois de l'une et de l'autre simultanément. Elle est enfin dans certains cas un auxiliaire utile dans la détermination des tempéraments. Si donc la gymnastique,—et les quelques pages qui précèdent paraissent pouvoir se résumer ainsi, — si la gymnastique en plein air et libre n'est pas plus capable de combler les défauts des caractères que les lacunes des constitutions, elle représente du moins un exercice à la portée de tous les individus, mérite que ne possèdent pas tous les agents de l'éducation physique. On doit en outre lui reconnaître une action énergique et recommandable sur le développement général et local des organismes et regarder comme applicables à tous les adolescents normaux, sans distinction de force ou de faiblesse, les quatre propositions que j'ai tenté d'établir dans la première partie de ce mémoire.
Conclusions relatives aux résultais de l'exercice visé et à la méthode de contrôle.
Chez les adolescents de 14 ans 1/2 à 18 ans, la gymnastique aux appareils : 1° Ne gêne pas la croissance en hauteur. 2° Procure à la cage thoracique plus d'ampleur qu'elle n'en prendrait spontanément.
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3° Accroît la densité des tissus, le poids du corps, 4° Favorise activement l'égalité dans l'accroissement en volume des quatre membres, dans l'élargissement simultanée du thorax et du bassin, et d'une manière générale régularise les phénomènes vitaux qui se manifestent par l'accroissement morphologique de l'organisme. Précisons aussi, en la formulant, la méthode qui a été suivie ici pour la première fois dans des recherches de ce genre, et qui me paraît de nature à faire progresser scientifiquement l'éducation physique en tant que science du perfectionnement de l'organisme appliquée à l'enfant et à l'adolescent : a. Il est nécessaire que l'étude de la croissance précède celle du modificateur, agent de l'éducation physique. b. Pour connaître les changements durables, définitifs dus à un exercice, il faut faire porter les recherches sur ce qui est le plus susceptible de devenir définitif, à savoir ses effets éloignés, ses résultats à distance. Je suis convaincu que la nouvelle conception gymnastique française, fille de la pensée de Richepin et de la tradition grecque, l'énergique initiative du lieutenant de vaisseau Hébert, bénéficiera largement de cette méthode auxanologique de contrôle, qui mettra en relief, pour chacun des pupilles de la marine, la vigueur développée au suprême degré dans le respect, à travers la croissance, des lignes harmonieuses des proportions humaines.
�CHAPITRE VI
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Moitié du corps. —■ Variation de la longueur du sternum et rachitisme. — Les épaules de l'enfant. — Asymétrie du corps humain; celles qu'il faut connaître en raison de leur intérêt éducatif. — Part probable prise par le cerveau aux asymétries fonctionnelles. — Education bimanuelle (ambidextérité).
Moitié du corps. — Si la toise a mesuré la hauteur totale du corps, divisez par 2 cette hauteur et vous pourrez faire passer un plan horizontal à la hauteur à laquelle se trouvera le point correspondant au chiffre obtenu, certains que vous coupez le corps en deux tronçons de longueur égale. Cette brève opération fait ressortir la différence de constitution de ces deux moitiés et vous rappelle ce que nous avons dit de la complexité de la taille. Si vous la répétez sur plusieurs personnes, vous êtes frappés des organes différents chez chacun que coupe le plan horizontal médian imaginaire. Et si vous le répétez chez le même enfant tous les six mois, vous serez intéressés par le déplacement des organes relativement au plan horizontal médian, vous
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serez intéressés au point que vous poursuivrez l'investigation par les mesures et notations multiples que vous hésitiez un peu à entreprendre; vous voudrez savoir comment et pourquoi ces organes se déplacent chez l'enfant en travail de croissance ; vous voudrez le voir grandir et comprendre comment il grandit, pressentant l'influence que ces notions ne peuvent manquer d'avoir sur votre direction éducative. Variations de la longueur du sternum et rachitisme. —Aussitôt cette investigation vous réservera des surprises et vous permettra de tranquilliser les parents que tourmente l'incurvation du sternum, qu'ils constatent chez leur enfant. Isolée, cette incurvation concave ou convexe n'est point un signe de rachitisme, mais un effet de l'accroissement inégal parapubertaire. L'examen périodique du même enfant vous fera assister à la reprise de l'allongement effectif du sternum qui avait paru s'arrêter plus ou moins longtemps. En réalité, le grand cartilage thoracique n'avait pas cessé de grandir en longueur, mais l'accroissement inégal ayant trop souvent chez l'enfant civilisé, chez l'enfant des villes, chez l'écolier, rompu le parallélisme entre la poussée de l'allongement costal et celle des ligaments qui fixent le sternum par les deux extrémités, il s'en était suivi une incurvation du sternum qui parvenait à masquer son allongement réel. Désormais, par suite d'une évolution contraire,
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arrêt ou réduction du taux de l'allongement des côtes et poussée conjonctive pubertaire de l'accroissement, le sternum va se trouver en partie libéré, et l'observateur assiste, à dater de ce moment, au redressement sternal. Il est témoin de ce phénomène contradictoire d'un cartilage qui semble retrouver son activité de croissance au moment même où le tissu cartilagineux de l'économie est frappé d'arrêt ou de réduction dans son accroissement. Nous savons qu'il n'y a là que l'effet du redressement. Ce changement dans la disposition anatomique du sternum est corrélatif du changement de sens de l'ampliation majeure du poumon, laquelle passe, à la même époque (puberté), du plan horizontal au plan vertical. Les épaules. — La disposition offerte par les épaules a une grande influence sur l'aspect de la silhouette. On note : épaules hautes, basses ou tombantes, moyennes ou ordinaires, c'est-à-dire s'écartant plus ou moins du plan horizontal et offrant de haut en bas une certaine obliquité à partir du cou jusqu'à l'acromion. Les épaules hautes elles-mêmes n'atteignent que rarement l'horizontalité. Vous remarquerez par la suite diverses corrélations fonctionnelles de chacune de ces conformations, et je vous engage à les noter. Théoriquement, les épaules doivent être symétriques. En réalité, une des épaules est plus basse que l'autre, et c'est la droite qui habituellement occupe le plan inférieur.
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Il est entendu que vous inscrivez simplement une inégalité que votre coup d'œil exercé vous fait percevoir, mais je ne vous demande pas de le mesurer. Il faudrait pour cela relever les mensurations bilatéralement comme je l'ai pratiqué au cours de mes recherches sur la croissance, et cela sortirait du cadre auquel votre rôle complexe vous oblige à vous limiter. L'inégalité de hauteur des deux épaules est une asymétrie qui a été attribuée à l'escrime (Lagrange) et par d'autres auteurs à un vice de conformation. J'ai pu établir que c'était une asymétrie normale et la classer en tête des asymétries fonctionnelles. Elle résulte de l'activité du membre supérieur droit, infiniment plus intense que celle du membre supérieur gauche. Asymétries; leur intérêt éducatif. — Et du reste, bien que l'investigation que j'engage l'éducateur à pratiquer ne le mette pas aux prises avec ces nuances de la morphologie, je crois devoir vous renseigner en peu de mots sur les principales asymétries et sur leurs causes. Elles constituent, en fait, des particularités qui sont du ressort médical, surtout, mais ne laissent pas que d'offrir pour vous, éducateurs, un vif intérêt. Répartition des asymétries1. — On a quelquefois
1 D'après mes deux notes à l'Académie des Sciences, la première lue par Marey en 1900, la seconde, suite de la première, lue par le Prof Laveran dix ans plus tard, en 1910.
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parlé des asymétries que peuvent présenter les organes pairs chez l'homme normalement conformé; on n'a jamais, que je sache, appliqué à leur détermination une méthode rigoureuse. J'ai eu recours à celle qui m'a été enseignée en 1893-1894 par le Prof. Manouvrier; je l'ai étendue aux deux côtés du corps sur 200 jeunes hommes; voici les différences qu'elle m'a permis d'établir entre le côté droit et le côté gauche : « 1. Le membre supérieur droit est plus gros que le gauche d'un demi-centimètre. « 2. Pour les membres pelviens, c'est, au contraire, le gauche qui l'emporte sur le droit; la différence est d'un demi-centimètre, et elle s'affirme au niveau du mollet. « 3. La suractivité fonctionnelle est donc croisée. La nutrition plus active qu'elle entraîne doit avoir autant d'influence sur l'allongement des membres qui en sont le siège que sur leur augmentation de volume. C'est, en effet, ce qui a heu. « Le membre supérieur droit moins la main (humérus et radius) est plus long que le gauche de 1 centimètre. « Le membre inférieur gauche moins la hauteur du pied (fémur et tibia) est plus long que le droit de 1 centimètre. Ces différences de longueur se retrouvent pour une part proportionnelle dans les segments des membres. « 4. Les gauchers observés constituent un con-
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trôle de valeur; chez un grand nombre, la supériorité de volume et de longueur reste croisée, mais en sens inverse. « 5. La plus grande longueur du membre inférieur gauche chez les droitiers relève tout le côté correspondant du tronc : l'épine iliaque gauche plus haute de 1 centimètre révèle l'inclinaison du bassin. Il en est de même de la ceinture thoracique, dont l'extrémité scapulaire gauche domine la droite de 1 centimètre en moyenne. « 6. Le mollet gauche, qui est le plus volumineux, est aussi plus bas que le droit de près de 1 centimètre. « 7. Les oreilles offrent également une notable et presque constante asymétrie : en mesurant leur grand axe vertical, on trouve 5 millimètres de plus en faveur de l'oreille gauche. » L'asymétrie des oreilles se modifie avec l'âge au cours de la croissance; elle a tendance à s'atténuer surtout lorsqu'elle était très marquée chez le petit enfant, ou même chez le garçon ou la fillette avant la puberté. Ainsi un enfant de 13 ans, dont l'oreille gauche, par exemple, est plus longue que la droite, de plus de */2 centimètre, verra à un moment donné, au voisinage de l'éclosion pubertaire, grandir sa seule oreille droite, la plus petite, qui semblera se hâter de rejoindre l'autre, laquelle du reste l'attend et ne s'allonge plus. La différence entre les deux pourra n'être plus que de 2 millimètres à 18 ans. Le fait de
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cette croissance unilatérale est bien particulier, et je vous le signale. Chose à noter, tout en se gardant d'en tirer trop vite des conclusions générales, les 23 sujets de 13 ans 72, porteurs de fortes asymétries auriculaires, étaient pour la plupart des « minus habens ». En exceptant les deux qui ont fait leur chemin dans la vie, et deux autres qui ont vécu « comme tout le monde » : il reste 10 jeunes gens pourvus de moyens médiocres, 6 dépourvus de moyens et 3 nullités, non seulement au point de vue classes, mais encore au point de vue métier. Si ces 9 derniers sont classés dans la catégorie des anormaux, dans ce cas, une forte asymétrie des oreilles se rencontrerait chez 40 anormaux pour cent ! Le fait est à contrôler, mais il exige la plus grande réserve dans son interprétation, comme toutes les manifestations morphologiques des états psychiques, du reste. Dans ma seconde Note à l'Académie des Sciences, j'insistai sur les variations des asymétries au cours de la croissance, et sur leurs causes : A 13 ans, le côté droit est supérieur au gauche : en longueur et en grosseur, au bras et à l'avant-bras ; en hauteur, au cou et à l'abdomen inférieur. Tandis que le côté gauche l'emporte sur le côté droit : en longueur et en grosseur, à la cuisse et à la jambe; en hauteur, au thorax. Variations au cours de la croissance. — Entre 13 et 18 ans, spécialement, chaque paire de membres,
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chaque paire de segments correspondants, ou bien se différencie davantage, ou bien conserve à peu près son degré d'asymétrie : les asymétries de longueur des deux avant-bras, des deux cuisses, et l'asymétrie de grosseur des deux bras s'accentuent avec l'âge, et réalisent brusquement une majoration importante, au moment de l'apparition de la puberté, vers 15 ans et demi. Des variations semestrielles caractérisent au contraire les inégalités qui régnent entre la longueur du bras (humérus) droit et celle du bras gauche, entre la grosseur de l'avant-bras droit et celle de l'avantbras gauche. Malgré ces oscillations, qui sont en rapport avec les « alternances des accroissements » telles qu'elles ressortent de mes recherches, ces dernières asymétries sont, à peu de chose près, à 18 ans ce qu'elles étaient à 13 ans. Une stabilité comparable se rencontre au cou dans la différence de hauteur, au profit de la droite, de ses deux moitiés latérales; la supériorité de hauteur de l'hémithorax gauche est dans le même cas. L'abdomen se comporte très différemment suivant que l'on envisage sa portion supérieure, susiliaque ou sa portion inférieure intra-iliaque. Cette dernière maintient, au cours de la croissance, la supériorité de sa moitié droite; tandis que, pour la portion sus-iliaque, la supériorité d'un semestre à l'autre passe de gauche à droite, et réciproquement. Causes des asymétries. — Les asymétries des mem-
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bres thoraciques existent chez le nouveau-né. Elles sont mesurables. Les autres asymétries ne le sont pas : j'entends celles du cou, du tronc et des membres pelviens. Les premières procèdent donc de l'élaboration ontogénique embryo-fœtale déterminée, je pense, par l'hérédité. Les divers facteurs autres que l'hérédité ne résistent pas à l'analyse. Du reste, l'hérédité gauchère et l'hérédité ambidextre ne sont pas contestées. Pourquoi en serait-il autrement de l'hérédité droitière ? Nous sommes bien certainement en présence de l'hérédité d'un caractère acquis par l'effet des conditions fonctionnelles de la vie courante. Une particularité de son évolution semble favorable à cette manière de voir, c'est sa progression à travers l'âge, en sens inverse de celle de la croissance mais dans le sens même de la fonction. Et d'ailleurs, ne voyonsnous pas les asymétries « consécutives », celles des membres abdominaux, du tronc, du cou, à la genèse desquelles nous assistons, procéder bien qu'indirectement de la fonction ; dériver de la localisation unilatérale de la suractivité manuelle 1 En effet, c'est à dater de l'époque où l'enfant se met debout et commence à agir d'une façon continue, pendant les heures de veille, que les asymétries « consécutives » apparaissent peu à peu : celles du membre inférieur qui se tasse sous la surcharge du côté correspondant, droit chez le droitier, gauche chez le gaucher, laisse à l'autre membre le rôle le
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plus actif, la supériorité de longueur osseuse et l'hyperplasie musculaire, ce qui crée l'asymétrie croisée, mentionnée dans ma Note de 1900. Viennent encore, sous l'action de cette surcharge du membre supérieur droit, l'abaissement de l'épaule droite, chez le droitier, l'affaissement du sommet de l'hémithorax droit, la sollicitation des premières vertèbres dorsales de ce même côté, avec production d'une inflexion du rachis dorsal à convexité gauche, c'est-à-dire en sens inverse de la plus habituelle incurvation pathologique et même de la dépression physiologique due à l'aorte. Par compensation, la colonne cervicale devient convexe à droite, et la tête reste inclinée légèrement à gauche. En bas, l'inclinaison à droite du bassin corrige les tendances compensatrices du segment sous-thoracique de la colonne vertébrale. Chez les gauchers, ces phénomènes sont renversés. L'ambidextre ne les présente pas si son activité bimanuelle est, non pas spéciale, mais générale. N'est-on pas autorisé à admettre qu'il en a été de même des asymétries qu'il nous faut actuellement considérer comme primitives, et qu'elles sont elles aussi nées de la fonction ? J'y suis d'autant plus porté que j'ai vu s'effacer plus ou moins complètement les différentes asymétries, sans en excepter celles des membres supérieurs, chez les adolescents auxquels, secondé par des éducateurs avertis, j'ai réussi à faire prendre l'habitude de l'activité bimanuelle (ambidextérité).
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Part probable prise par le cerveau aux asymétries fonctionnelles. — Tout récemment, un médecin distingué de Cette, M. le Dr Herber, a proposé comme cause de la localisation à droite de la suractivité manuelle, la place du cœur à gauche, et la tendance naturelle à éviter ou du moins à atténuer les gênes que peut lui procurer le travail du bras gauche. Cela semble logique. Cliniquement, l'auteur établit des corrélations étroites entre le fonctionnement du cœur et le fonctionnement du membre supérieur gauche; les nombreux gauchers que l'on rencontre ne plaident cependant pas dans ce sens. L'activité fonctionnelle du membre supérieur gauche qu'une éducation bimanuelle tôt commencée obtient aisément chez les droitiers, que j'ai moi-même obtenue, ne m'a pas fourni d'occasion de constater de répercussion sur le cœur. Si le cœur était par la place qu'il occupe à gauche, la cause de la localisation susdite à droite, la gaucherie devrait être l'apanage exclusif de ceux dont le cœur occupe le côté droit du thorax ! Or, sur 100 gauchers, je n'ai pas trouvé un seul cas d'inversion splanchnique, de transposition du cœur à droite. Je n'ai en vue que les gauchers invétérés, adultes, n'offrant aucun signe de dégénérescence ainsi qu'on en rencontre en grand nombre. Il convient toutefois de ne point se décider contre cette manière de voir avant d'avoir beaucoup observé. D'autant plus que cette corrélation fonctionnelle
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entre le membre supérieur et le cœur serait susceptible peut-être d'éclairer la question de la part prise par le cerveau aux asymétries fonctionnelles. Une localisation fonctionnelle ne peut pas ne pas impliquer une participation cérébrale. Cela ne fait de doute pour personne. La question est de savoir s'il s'agit d'une modification anatomique au niveau du centre appelé à présider à la fonction unilatéralement suractive, ou bien s'il n'y a du côté cérébral qu'un état de repos physiologique, une insuffisance éducative, ne portant nullement atteinte à la condition cellulaire, et par conséquent susceptible d'être modifiée par une éducation appropriée ? En 1883,—Bardeleben n'avait point encore, que je sache, abordé ce sujet, — j'eus l'occasion d'examiner deux cerveaux d'Arabes gauchers, un jeune homme et un vieillard. Une étude approfondie de ces deux cerveaux n'y montra aucune trace de modification anatomique macroscopique correspondant à la fonction du membre supérieur. D'autre part, mes différentes statistiques de gauchers chez les Arabes et les Kabyles, chez les soldats de diverses régions de France, chez les écoliers, dont j'ai comparé métriquement les deux mains et les deux pieds, ne m'ont jamais révélé un état particuculier du membre le moins actif susceptible de l'empêcher, à un moment donné, de faire comme l'autre. Education bimanuelle (ambidextérité). — Chez un
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grand nombre de jeunes gens, quelques jours d'exercice suffisaient pour rendre la main gauche apte à exécuter la plupart des mouvements utiles que faisait seule la main droite auparavant. En ce moment même, je viens d'obtenir avec un mois d'exercice chez une fillette gauchère de 11 ans qui est à deux ans de sa puberté (voir chap. x), l'usage indifférent des deux mains. Il s'agissait d'une scoliose par asymétrie fonctionnelle ; la scoliose a cédé en quatre mois. L'effet de l'éducation bimanuelle est un argument excellent en faveur de la participation purement physiologique du cerveau à l'asymétrie fonctionnelle primordiale du membre supérieur; il tend à démontrer que la gaucherie n'est point un signe stable de dégénérescence; il est en même temps une précieuse indication pédagogique. Chez un enfant dont l'asymétrie des épaules paraît s'accentuer avec exagération, hâtez-vous de faire exercer systématiquement la « main paresseuse ». Si l'enfant est encore à deux ans de sa puberté, l'éducation se fera assez vite. Elle eût été encore plus rapide, si les parents avaient songé à habituer leur enfant des le berceau à se servir des deux mains. Et vous assisterez au retour d'une symétrie plus ou moins parfaite, aux épaules, aux membres supérieurs, aux membres inférieurs, au tronc. Cette éducation est tout à fait du ressort de l'éducateur. Elle n'a rien de spécial et elle dote l'enfant de ressources appréciables. D'après les résultats que
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vous obtiendrez, le médecin fera à coup sûr le diagnostic différentiel et rejettera toute idée de rachitisme si les symétries se reconstituent. Vous jugez par cet exemple de la mesure dans laquelle vous pouvez seconder l'action du médecin par les procédés mêmes qui donnent à votre direction éducative sa plus grande ampleur et sa plus féconde influence. Le Dr Livi, admet \ comme cause de la prédominance de la droiterie, la première position connue du fœtus dans l'utérus, laquelle résulte de la place occupée par les intestins de la mère. Le membre supérieur droit, se trouvant dirigé vers la paroi abdominale de la mère, est libre ; il a plus d'aisance pour s'exercer, et c'est lui qui agira après la naissance. Je me rallie entièremeut à cette conception physiologique qui laisse à la fonction son rôle prédominant et n'élimine pas l'influence de l'hérédité.
1 Dr R. Livi. — Sulla causa del destrismo e del mancinismo (Atti. soc. rom. adtropol. 1908, vol, 14, p. 91-94).
�CHAPITRE VII
INVESTIGATION AUXANOLOGIQUE DE L'ÉCOLIER
Conditions anatomiques de la fonction. •— Forme et squelette. — Leurs modifications par la croissance. — Points de repère anthropométriques.
Chacune des applications éducatives envisagées dans les précédents chapitres de cette 2me partie ont montré que l'éducateur n'était pas libre de faire simultanément à plusieurs enfants l'application d'un procédé éducatif ou pédagogique, et la nécessité absolue pour lui d'individualiser le procédé quel qu'il soit dans l'ordre physique comme dans l'ordre intellectuel. Rien n'est donc plus naturel et d'ailleurs plus logique que d'aborder maintenant l'objet éducatif capital de l'étude analytique du développement de l'enfant, à savoir la détermination de son individualité somatique. La formule individuelle, à laquelle mes recherches m'ont conduit, synthétise suffisamment l'individualité somatique à chaque instant de la croissance, et
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cette part de l'individualité cérébrale qui en est solidaire. La récolte des éléments nécessaires à la constitution de la formule individuelle se fait au moyen des procédés d'observation de l'enfant que nous avons appelés « méthode auxanologique », pour dire d'un mot qu'elle est périodique, qu'elle suit le même enfant de semestre en semestre, qu'elle est anthropométrique, non pas par une, deux ou trois mesures, mais par beaucoup de mesures, qu'elle est enfin physiologique et clinique. Etudions d'abord ce procédé d'investigation de l'enfant, après quoi nous verrons comment doivent être traitées les indications recueillies pour aboutir à la constitution de la « formule individuelle ».
De chacune des notions générales, anatomie, physiologie, clinique, etc.... nous ne retiendrons ici que les notions indispensables aux connaissances que nous nous proposons d'acquérir. C'est ainsi que la « forme » sera envisagée seulement en fonction de la croissance. L'analyse squelettique de la forme est à étudier avec une attention spéciale, parce qu'elle est le guide le plus sûr de l'observateur à travers le dédale organique. Conditions anatomiques de la fonction. — Avec mon
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éminent maître, le Professeur L. Manouvrier, je cherche à saisir la (onction, à en reconnaître le degré d'activité et de perfection à travers les conditions anatomiques en m'appuyant sur les rapports anthropométriques et sur les corrélations. Les variations de la forme, telles qu'elles se montrent au cours de la croissance, aident singulièrement à interpréter les rapports de la surface avec la profondeur. Encore faut-il que les dimensions du corps soient bien déterminées, que ses proportions aient été exactement calculées, si l'on veut se rendre compte des modifications qu'entraîne la croissance. Cela nécessite des points de repère fixes que fournira le squelette, lequel est l'ensemble des diverses pièces qui soutiennent les organes, leur donne attache, leur constitue une boîte, une cage ou une gaine, leur procurant protection et aide fonctionnelle. Aussi notre devoir d'éducateur est-il d'avoir une idée très nette du squelette, de connaître si exactement celles de ses saillies choisies pour points de repère que le doigt les trouve instantanément. Forme et squelette. Pl. XV. — Il est indispensable que nous dessinions mentalement le squelette à travers les contours tégumentaires du sujet que nous observons, et que nous ne soyons nullement embarrassés pour le reconstituer, si, au lieu d'un adulte, nous avons à examiner un enfant dont les pièces squelettiques sont entre elles dans un rapport très diffé-
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rent de ce qu'il est chez l'adulte ou même chez un enfant d'un autre âge. Avec ce rapport change la silhouette en raison de l'influence capitale de l'ossature sur les formes. On sent les modifications subies par la silhouette avec les âges successifs de la période de croissance, on sent ces modifications à travers les écarts de la forme, mais il est difficile au simple examen de préciser la nature des modifications. Le seul moyen de nous en faire une idée juste est d'utiliser les points de repère et le mètre à l'appréciation des distances, puis de comparer entre eux les rapports auxquels donnent lieu les dimensions notées. La charpente osseuse détermine les arêtes de la silhouette humaine; elle limite encore les cavités occupées par les organes internes, par les « viscères », en sorte qu'elle est vraiment le trait d'union entre les organes de surface et les organes profonds. Le squelette osseux est le soutien de l'appareil locomoteur, qui s'attache à lui et règle sur les siennes ses propres dimensions. Pour ces diverses raisons, le squelette restera le point d'appui de notre observation à travers les âges successifs, jusqu'à la fin de la période de croissance. Les 193 os dont se compose le squelette quand il est au complet et non pourvu d'os surnuméraires ne nous intéressent qu'autant qu'ils se groupent en organes.
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Il se constitue ainsi deux cavités et quatre branches qu'il nous faut bien comprendre anatomiquement pour que l'interprétation de leurs corrélations physiologiques soient aisées et sûres. Les cavités sont limitées par des os de forme aplatie, tandis que les tiges membrales sont représentées par des os longs. A la colonne vertébrale, ainsi qu'au niveau des extrémités, là où la main et le pied se rattachent aux membres, on rencontre une troisième sorte d'os, les os courts. Leur rôle est à quelques égards celui des billes dans les rouages de certaines machines, ils multiplient les surfaces articulaires et rendent plus varié, plus souple et plus fort le jeu de la main comme celui du pied. La colonne vertébrale utilise aussi les os courts, quoique d'une façon un peu différente; mais c'est encore de la multiplicité des articulations qu'elle tient la merveilleuse variété de ses mouvements et sa force. Les articulations permettent aux os de prendre les uns à l'égard des autres des positions favorables aux mouvements à accomplir. Elles fournissent quelques points de repère, quelques points d'arrêt pour notre œil et notre doigt. Enfin, la plupart des os présentent des apophyses, c'est-à-dire des saillies, des tubérosités, des sortes d'excroissances destinées à donner attache à des ligaments et à des muscles. Quelques-unes de ces saillies sont pour nous d'excellents points de repère, les meilleurs qui soient
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pour la reconstitution du squelette et l'évaluation de ses dimensions. Les deux grandes cavités sont celle du tronc et celle du crâne. Les côtes et le bassin, réunis par la colonne vertébrale forment ensemble un vaste réservoir où prennent place de nombreux organes. Chacun connaît leurs noms. C'est leur rôle fonctionnel qui nous importe. Or, dans leur ensemble, ils constituent ce qu'on peut appeler le « transformateur-distributeur » nutritif. L'appareil digestif ne transforme-t-il pas ce qui lui vient du dehors en substance assimilable, que la lymphe et le sang vont ensuite distribuer aux tissus dont ils assurent ainsi la nutrition. Le tronc est un foyer dynamogène. Le cou est la communication entre le tronc et le crâne; c'est par lui que passe de bas en haut la distribution nutritive et de haut en bas la distribution nerveuse partant des centres encéphaliques, lesquels remplissent le rôle d'« accumulateur-dispensateur » d'énergie. Au-dessus du cou, au-dessus de cette portion cervicale de la colonne vertébrale dont on voit bien l'isolement du reste du squelette, et supporté par elle, s'élève l'autre cavité, la boîte crânienne. L'encéphale tout entier y est enfermé. Au-dessous du cerveau se trouvent, avec le cervelet, les renflements successifs continués en bas par la moelle épinière qui descend dans le canal de la colonne vertébrale.
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C'est le cerveau qui en occupe la partie la plus élevée comme la plus étendue, et ce sont les variations de son volume qui décident des dimensions du réservoir que constitue le crâne. Il est donc entendu que, lorsque nous mesurons le crâne, nous ne mesurons pas le cerveau, mais que nous évaluons la capacité d'une cavité dont les dimensions sont proportionnelles à celles du cerveau lui-même; nous avons de la sorte, sur le volume du cerveau, des renseignements tels que nous pouvons formuler de ce dernier une évaluation suffisamment approchée. De cette tige à axe rachidien qui s'étend des ischions, point d'appui dans la position assise, jusqu'au sommet du crâne, et qu'on désigne sous le nom de buste, se détachent quatre branches à des niveaux différents, mais qui tous sont pris sur le tronc, sur le cylindre thoraco-pelvien. Les quatre membres offrent habituellement une symétrie deux à deux, comparable à celle que l'on constate au tronc à droite et à gauche de la ligne médiane, de l'axe du corps, du rachis. Les membres intéressent l'éducateur par leur longueur relative, c'est-à-dire par la proportion qui règne entre leur longueur et la puissance des organes centraux de la vie. Us nous intéressent encore par les ressources dont ils disposent pour l'action. Ces ressources se manifestent par la grosseur relative des os et des muscles d'un même segment, de l'avant-
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bras, par exemple (segment du membre supérieur compris entre le coude et la main). Points de repère anthropométriques. — Supposons maintenant que nous voulions reconstituer ces réservoirs, apprécier les rapports qu'affectent entre elles ces diverses parties, ce sera désormais avec le mètre et non plus avec les yeux, et non plus au moyen d'une représentation mentale approximative qu'il nous faudra « voir » le squelette. Pl. XV et Pl. XVI. N'oublions pas que c'est sur le vivant que nous devons le retrouver; c'est à travers les chairs recouvertes de leur tégument que nous devons le reconstituer. Aussi n'aurons-nous jamais trop précisé les points de repère, et ne nous serons-nous jamais trop familiarisés avec leur découverte sur le vivant. Les points de repère anthropométriques sont les suivants : Le sommet, le point culminant de la tête, ou vertex. La pointe de la saillie qui défend l'entrée du conduit auditif ou pointe de l'antitragus. La fourchette sternale, ou bord supérieur du sternum. Le pubis, bord supérieur de la partie médiane de l'os antérieur du bassin. Le grand trochanter, bord supérieur de la saillie que forme l'extrémité supérieure du fémur. L'acromion, bord externe de l'apophyse du sca-
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pulum qui forme voûte au-dessus de la tête de l'humérus. Le médius, extrémité inférieure du doigt médian de la main. Les points de repère qui précèdent sont utilisés pour la détermination des hauteurs au-dessus du sol. La mesure des diamètres exige deux points de repère situés dans un même plan horizontal ou vertical, sauf pour le diamètre antéro-postérieur du crâne, où l'on prend le centre du front environ (au point métopique) et le point le plus éloigné de la convexité occipitale. Les autres points de repère diamétraux du crâne sont : les points les plus écartés des convexités pariétales pour le diamètre transverse maximum, puis, pour le diamètre vertical, la distance du vertex à l'anti-tragus. Le thorax offre, pour niveau diamétral, l'interligne sterno-xiphoïdien, le sommet du sternum, et c'est à son niveau qu'est cherchée en arrière la saillie correspondante de la colonne vertébrale. C'est au niveau encore de l'articulation de l'appendice xiphoïde avec le sternum qu'est déterminé l'espacement entre les surfaces convexes latérales des côtes. Les circonférences sont relevées au niveau de la grosseur maxima, grosseur la plus considérable, correspondant au ventre des muscles, et au niveau de la grosseur minima, grosseur la plus faible du segment. La grosseur minima répond à la grosseur des
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os. Ces deux circonférences sont relevées sur l'avantbras, d'après notre fiche individuelle. Les circonférences thoraciques sont prises à deux hauteurs. L'une passe immédiatement au-dessous des bords axillaires, l'autre relève le pourtour du thorax au niveau de l'articulation xiphisternale. La forme en tronc de cône et les divers reliefs du tronc rendent ces circonférences difficiles à prendre avec exactitude, et à peu près impossibles dans le sexe féminin. Il n'y a que des avantages à les remplacer par les diamètres thoraciques. Les extrémités, le pied et la main sont bien repérés par un tracé de leur contour. Mais il faut savoir reconnaître la tête ou l'extrémité antérieure des premier et cinquième métatarsiens, et de même, à la main, des deuxième et cinquième métacarpiens, car la distance qui les sépare représente le diamètre de chacun de ces organes. L'extrémité de l'apophyse styloïde radiale au poignet, bien facile à reconnaître, marque la terminaison de l'avant-bras et le commencement de la main. La ligne transversale tangente à [l'extrémité du doigt ou de l'orteil le plus long, marque le terme de ces deux organes. Ce dernier est tantôt le gros orteil, tantôt le deuxième orteil.
�CHAPITRE VIII
MENSURATION DE L'ÉCOLIER D'APRÈS LA « FICHE INDIVIDUELLE DE CROISSANCE1 ».
La salle d'observation. — Les instruments anthropométriques. — Soin de se contrôler soi-même. — Manuel opératoire. — Hauteurs, diamètres, circonférences, contours, poids.
La salle d'observation. — Vous réaliserez les indispensables conditions d'une observation scientifique en ne craignant pas d'étudier avec soin chacun des détails susceptibles de contribuer à votre bonne préparation. Dans une pièce plutôt petite, facile à chauffer, ayez un plancher artificiel très uni sur lequel les pieds de l'enfant ne rencontrent pas d'échardes; un plancher qui assure un même plan horizontal à la plante des pieds du sujet et à l'extrémité inférieure de la toise. Si ce parquet fait partie de la toise, comme dans l'auxanomètre, on n'a point à en faire construire un spécial, c'est tout bénéfice et commodité. Les mesures de hauteur une fois prises, le plan1 D1 Paul Godin. La Formule individuelle de croissance. Paris, A. Maloine, édit., 1913 et à l'Institut J.-J. Rousseau. Mensurations pages 2, 3, 5, 6. Notations pages 1, 3, i, 6, 7, 9,10,11 et 12.
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cher de rauxanomètre disparaît avec la toise et n'encombre pas le sol de la chambre. L'observé se place sur ce plancher et fait face à la fenêtre. L'observateur tourne le dos au jour et voit en pleine lumière l'enfant qu'il examine. Le secrétaire, assis face au jour, a devant lui une table, dont une des extrémités est à un demi-mètre du plancher de la toise, à la portée de la main, qui peut y prendre, au moment du besoin, divers instruments : le ruban métrique, le crayon d'aniline, le compas d'épaisseur, la petite glissière de métal ou la grande glissière de bois. Les instruments anthropométriques. — La toise se tenant seule (elle fait corps avec le plancher de l'auxanomètre), les deux mains de l'observateur sont libres et peuvent être employées à la recherche des points de repère et au maintien dans la position voulue de l'enfant en examen. C'est aussi une condition avantageuse de rapidité d'exécution. Uauxanomètre. — L'instrument, que je construis \ suffit à toutes les mensurations que peuvent avoir à relever l'éducateur et le médecin. Il réunit trois instruments en un seul : toise debout, toise couché et grande glissière. La toise se démonte en deux moitiés. La moitié supérieure porte une graduation latérale en sens inverse de la graduation totale de la toise, ce qui permet de l'utiliser comme grande glissière.
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Déposé chez Maloine fils, rue Casimir Delavigne, à Paris.
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Trois curseurs reçoivent des tiges destinées à prendre contact avec les points de repère. Un des curseurs est fixé à l'extrémité supérieure de la toise. Il fera la manette de la grande glissière dans la mensuration des diamètres. Des deux autres curseurs, l'un est muni intérieurement d'un ressort pour empêcher sa chute dans la mensuration verticale. Le pied de la toise est garni d'une gaine de cuivre dans laquelle pénètre une tige de fer soudée ellemême par sa partie inférieure à une plaque carrée du même métal ; la tige traverse un trou du plancher et la plaque prend place dans un cadre de ses dimensions creusé à la face inférieur du plancher. Une rondelle, surmontée d'un écrou, est passée ensuite dans la tige, pour f aciliter le mouvement de la toise rectangulaire autour de cet axe, lequel présente vers la moitié de sa hauteur une gorge dans laquelle s'engage une vis dont la tête émerge à la surface de la toise. Le serrement de cette vis rend solidaires la toise et le piveau métallique sans entraver l'évolution du rectangle autour de son axe. Le pied de la toise se fixe dans les mêmes conditions bien qu'horizontalement au butoir qui s'adapte à volonté à l'une des extrémités du plancher, et qui permet la mensuration couchée du bébé. La toise horizontale est appuyée à l'autre extrémité du plancher sur une pièce mobile. Un tabouret pliant de 30 centimètres de hauteur
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complète l'outillage, qui dans son ensemble a reçu le nom d'auxanomètre de l'éducateur et compte : 1. Pied de la toise. 2. Haut de la toise. 3. Curseur fixe. 4. Curseur mobile à ressort. 5. Curseur mobile sans ressort. 6. Baguette pour le curseur à ressort. 7. Baguette pour le curseur fixe. 8. Baguette pour le curseur sans ressort. 9. Plancher. 10. Butoir. 11. Appui. 12. Tabouret de 30 centimètres. 13. Axe métallique soudé à la plaque de fer carrée. 14. Rondelle métallique. 15. Ecrou. 16. Clé. 17. Ruban métrique. Le compas d'épaisseur de Broca et la glissière métallique ne sont utilisés que pour les mensurations du crâne et de la face. L'éducateur et le médecin peuvent les remplacer par la grande glissière de l'auxanomètre d'un maniement plus aisé et sans danger pour les petits enfants. Un crayon dédoublé dans l'eau bouillante, ou un crayon plat, permet de suivre exactement les contours du pied et de la main d'après la méthode de Manouvrier. Si l'on s'en tient aux deux diamètres
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du pied et de la main, c'est aux glissières que l'on a recours. Mais le contour est très vite relevé, et le graphique obtenu est d'une documentation très sûre. Enfin, on réserve une place à une bascule pouvant peser au moins 80 kilos. Après s'être assuré que les petits instruments sont à la portée de la main, de façon à les pouvoir prendre à la machinalement, et à n'être ainsi distrait par rien de l'observation de l'enfant, l'observateur placé comme il est dit plus haut tournant le dos à la fenêtre et ayant en face de lui l'enfant éclairé en plein, procède à la mensuration. Il détermine chaque point de repère, et, abaissant ou montant le curseur, il amène la tige au contact du point de repère, l'index de la main gauche de l'opérateur étant toujours porté en éclaireur, autant pour assurer l'exactitude du point de contact que pour protéger la peau contre la pointe de la tige métallique ou de la règle de bois que j'y substitue pour les petits enfants. Chaque nombre lu sur l'instrument en mains est appelé à haute voix par l'observateur, et répété à haute voix par le secrétaire, qui l'écrit en même temps et annonce aussitôt la rubrique de la mensuration suivante. De la sorte, le nombre appelé deux fois à haute voix est mieux garanti contre l'erreur. Soin de se contrôler soi-même. — D'autre part, l'observateur réalise un contrôle de valeur, s'il ignore le chiffre obtenu au précédent examen quand il relève la mesure nouvelle.
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Au début de chaque période de mensuration, un même sujet doit être mesuré deux ou trois fois, soit le même jour, soit à un jour d'intervalle, de façon à contrôler tout à la fois la main de l'opérateur et l'attention du secrétaire, l'attitude de l'adolescent et la justesse des instruments. J'ai toujours eu grandement à me louer d'avoir procédé ainsi au cours de mes mensurations dans les écoles (1891-1901). Ces expériences présentaient en outre l'avantage d'être fort instructives à d'autres points de vue. L'éducateur et le médecin se partagent le soin de relever les mensurations et les notations de la fiche individuelle. Par la fiche médicale individuelle, le médecin apportera à la direction éducative des informations de la plus grande importance. Mais si l'éducateur est isolé, s'il ne peut assurer à ses élèves l'assistance d'un médecin qu'en cas de maladie, alors il fera bien d'ajouter aux mensurations toutes les notations qu'il pourra formuler avec des garanties absolues d'exactitude. Manuel opératoire. Hauteurs. — Le corps de l'enfant étant bien d'aplomb, bien vertical, l'observateur place la tige du curseur de la toise sur le vertex du sujet qu'il a pris soin de faire asseoir sur un tabouret de 30 centimètres de haut ; les membres inférieurs écartés et en demi-extension ; le buste est redressé, ce qui s'obtient avec tous, petits, grands, cultivés et incultes pourvu qu'on sache que la main gauche doit
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appuyer sur les apophyses épineuses des troisième et quatrième vertèbres lombaires, tandis que la droite presse sur le menton. Le redressement est instantané et la taille assise est relevée avec une grande exactitude. Aussitôt cette mesure appelée et inscrite, on fait lever l'enfant debout, très droit, les talons rapprochés, mais pas tout à fait joints (Manouvrier) et les pointes de pieds écartées. La tige vient alors effleurer le vertex dont les cheveux ont été écartés. On a la stature. L'observateur amène ensuite la pointe de la tige au niveau du conduit auditif représenté par le point culminant de Vanti-tragus. Il appuie la tige sur le méplat que présente la fourchette slernale, à la base antérieure du cou. De là, il la fait descendre sur le pubis, dont le bord supérieur à la partie médiane se reconnaît en déprimant un peu la paroi abdominale et d'ailleurs se trouve très exactement marquée par le pli cutané transversal qui raie la peau de l'abdomen à ce niveau. L'enfant est alors placé de trois quarts (ce déplacement ne peut être une cause d'erreur grâce au plancher de l'auxanomètre), et on lit les hauteurs des points de repère suivants : Acromion, au bord tranchant externe de cette apophyse qui fait voûte au-dessus de l'articulation de l'épaule, mais est un peu en retrait sur la saillie que forme au-dessous la tête de l'humérus. Médius, à l'extrémité inférieure du doigt médius non compris l'ongle, la main bien allongée.
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Grand trochanter, son bord supérieur, saillie située au-dessous de la saillie de la hanche, à l'origine de la cuisse, à la même hauteur que le pubis, à quelques millimètres près, en dehors. On la reconnaît en posant les deux mains à plat sur les cuisses à la partie moyenne, puis en les faisant glisser de bas en haut en appuyant un peu. Pendant ce temps, la main gauche empêche le corps de céder à la pression de la main droite, et celle-ci peut suivre ainsi le relief de la grosse tubérosité fémorale et s'enfoncer aussitôt qu'elle cesse dans le méplat de la fosse iliaque externe. On met l'index gauche sur la crête du trochanter pour guider avec précision la tige du curseur de la toise. Une autre façon de procéder pour repérer le grand trochanter est la suivante : les bords radiaux des deux index sont appuyés sur les hanches droite et gauche (crêtes iliaques) de l'observé. Les index franchissent cet obstacle et descendent en déprimant les tissus jusqu'à la rencontre de la saillie trochantérienne qui semble plus rapprochée du plan postérieur de la cuisse. Diamètres. — A la suite des hauteurs, il convient de mesurer les diamètres. Les diamètres relevés directement mesurent l'épaisseur et la largeur. Les diamètres verticaux, qui sont des mesures de longueur sont obtenus par soustraction de deux hauteurs. L'un d'eux, cependant, est pris directement. C'est le diamètre vertical du crâne. Le diamètre thoracique antéro-postérieur se prend au niveau de l'extrémité inférieure du sternum, que
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l'on trouve aisément au sommet [de l'angle formé par les bords inférieurs convergents de la cage thoracique, en avant. Pl. XV. Une des tiges de la grande glissière est appliquée tangentiellement sur le bas de la dernière pièce du sternum, l'autre branche, sur la saillie de l'apophyse épineuse qu'elle rencontre dans le même plan horizontal. L'autre diamètre du thorax, le transverse, est relevé à la même hauteur xiphi-sternale (Pl. XV), les deux tiges de la grande glissière appuyant sur les convexités costales et serrant un peu. Une première fois, on note le diamètre quand l'enfant est au repos, c'est-à-dire respire posément. On le note une seconde fois quand l'enfant a fait une profonde inspiration et que la cage thoracique est dilatée au maximum. Il peut être utile de relever un troisième diamètre ainsi que me le demandait l'un de vous, le diamètre transverse au moment où le poumon est en expiration forcée. Il exige, il est vrai, de la part de l'enfant, un certain degré de culture physique et un apprentissage spécial sans lesquels il exécuterait mal le mouvement d'expulsion thoracique. A la tête, le compas de Broca s'appliquera en avant, à peu près au centre du front, au-dessus des arcades sourcillères, entre les bosses frontales; en arrière, l'autre branche cherchera la partie la plus saillante de la convexité de l'occipital dans le même plan antéro-postérieur. C'est le diamètre antéro-postérieurmétopique.
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Le diamètre transverse est relevé maximum, c'està-dire là où le compas est le plus ouvert dans le plan horizontal, plus ou moins haut au-dessus du pavillon des oreilles; plus en avant ou plus en arrière suivant les individus. Quant au diamètre vertical, qui représente la distance entre le centre du conduit auditif et le vertex, on le mesure au moyen de la glissière métallique dépourvue de son curseur. On pose sa branche horizontale fixe sur le sommet du crâne, les cheveux écartés, la branche graduée descendant tangentiellement aux tempes; on s'assure avec le plus grand soin de la verticalité de la branche descendante qui doit être parallèle à l'axe du corps, puis on lit sur la graduation le chiffre correspondant à la pointe de l'anti-tragus. Circonférences. — Les circonférences sont des mesures intéressantes parce qu'elles donnent des renseignements sur la grosseur des diverses parties du corps. Leur inconvénient est de varier beaucoup pour une très faible différence de niveau, aussi bien aux membres qu'au tronc. Pour les membres, on remédie à cela en prenant le pourtour maximum. Il s'agit de faire monter puis descendre le ruban métrique jusqu'à ce qu'on ait la certitude du chiffre maximum, et c'est celui-là que l'on note. Il en est de même pour la circonférence minima, qui évite une erreur de même ordre. Elle exige le
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même souci de bien déterminer le pourtour le plus réduit, ce qui nécessite plusieurs essais à différentes hauteurs. La circonférence minima de l'avant-bras se rencontre au-dessus des saillies épiphysaires inférieures des deux os de l'avant-bras, radius et cubitus. Le poignet reste au-dessous de ces saillies, entre elles et la main. La rubrique : « circonférence du poignet » ne convient pas. C'est « circonférence minima de l'avant-bras » qu'il nous faut conserver comme désignation de cette mesure, d'autant plus importante qu'elle nous fournit la grosseur des os. Or les os de l'avant-bras, chez l'enfant, ne sont pas sensiblement plus gros au tiers supérieur de l'avant-bras, au niveau des ventres musculaires. En sorte que la différence entre leur circonférence, ou circonférence minima de l'avantbras, et la circonférence musculaire ou pourtour maximum de l'avant-bras nous renseigne fort exactement sur la grosseur des muscles. Immédiatement au-dessous du coude, là où l'avantbras se montre le plus volumineux, se trouve la circonférence maxima de ce segment. La recherche du maximum et du minimum n'est applicable aux circonférences du tronc que d'une façon approximative. On se contente de prendre les périmètres thoraciques au niveau anatomique recommandé sans rechercher la grosseur maxima ou minima. On veille soi-
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gneusement à l'horizontalité du ruban métrique. Pour l'une, le ruban passera tout contre les bords des creux axillaires, et fournira la "circonférence sousaxillaire. Pour l'autre, plus spécialement appelée « périmètre thoracique », on fera passer le ruban métrique autour du corps, à la hauteur à laquelle ont été relevés les diamètres du thorax, à savoir, au niveau de l'extrémité inférieure du sternum, décrite précédemment. ■ Malheureusement, chez l'enfant surtout, le stermum est encore très court et le ruban rencontre dorsalement les angles inférieurs des omoplates (ou scapulum) et passe en pont de l'une à l'autre pour franchir le sillon médian qui correspond aux apophyses épineuses du rachis. Il y a dans ces conditions anatomiques une importante cause d'erreur. L'erreur est ici rendue plus grave par ce fait qu'elle n'est pas évaluable par un chiffre constant, permettant sa correction ferme; elle varie à chaque répétition de la mesure. Elle s'accentue encore, au moment de la puberté, par suite de la disposition « ailée » que prennent souvent les omoplates, et par suite du volume que prennent les seins chez la fillette. Ces diverses conditions morphologiques troublent nécessairement la mensuration circonférentielle du thorax déjà si peu sûre. Vous vous expliquez, n'est-il pas vrai, ma tendance à ne tenir qu'un compte très relatif du périmètre thoracique, et à demander aux diamètres les infor-
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mations fermes que les circonférences ne peuvent donner, à moins qu'elles ne soient multipliées et encadrées dans de nombreuses autres mesures telles qu'elles le sont dans mes recherches. Contours de la main et du pied. — Il peut se faire que vous n'ayez pas les facilités voulues pour relever les contours de la main et du pied suivant l'excellente méthode de Manouvrier, et c'est dans ce cas que vous aurez à vous limiter à la mesure de la longueur et de la largeur de chacun de ces deux organes au moyen des compas-glissières, la main, comme le pied reposant à plat sur une surface plane. Je vous rappelle les points de repère analysés plus haut à l'occasion de l'étude du squelette : pour le pied, du talon à l'extrémité de l'orteil le plus long, pour la main, depuis la pointe de l'apophyse styloïde du radius, qui répond à peu près chez tous au pli de flexion cutané de la face antérieure du poignet, jusqu'à l'extrémité du doigt le plus long. Quant aux largeurs, ce sont les têtes articulaires du cinquième et du premier métatarsien au pied, du deuxième et du cinquième métacarpien à la main qui constituent les points de repère. Je sais que vous ne traitez pas ces répétitions comme des redites négligeables et que vous saisissez, avec votre avidité de connaître tout ce qui est utile à l'enfant, ces notions qui, grâce à notre objectif, se rattachent directement à la fonction, et n'ont rien de la sécheresse habituelle des données anatomiques. Et c'est parce que vous m'avez maintes
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fois témoigné votre volonté de connaître l'enfant non pas superficiellement, mais aussi profondément que possible, c'est pour cela que je n'hésite pas à revenir à propos du manuel opératoire sur les points de repère importants. Quant aux contours, vous les obtenez excellents en prenant les soins suivants : la main est posée à plat, la paume appuyée sur une table dont la sépare une feuille de papier. Les doigts sont dans l'extension, rapprochés, à l'exception du pouce qui garde son écart naturel. Le doigt médius est maintenu sur le prolongement de l'axe de l'avant-bras qui reste légèrement soulevé. Avec le crayon plat, ou le crayon rond dédoublé par un passage de quelques minutes dans l'eau bouillante, on marque les deux extrémités du pli de flexion de la face palmaire du poignet; ou bien, si l'on ne veut pas avoir une différence souvent gênante, embarrassante, entre la longueur de la main mesurée en projection et la longueur de la main mesurée sur le contour, ou marque de deux traits transversaux les pointes des apophyses styloïdes du radius et du cubitus. Le crayon restant vertical, parcourt ensuite le pourtour de la main en appuyant toujours sa surface plate contre les téguments. Ensuite, on écarte un à un les doigts sauf le médius qui doit rester l'axe immuable, et on marque un point au fond de chaque espace interdigital. On a tout avantage à tracer sur les bords externe et interne, autant de traits transversaux, extérieurs
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au contour, que l'on perçoit d'interlignes articulaires ou d'extrémités osseuses apophysaires. On se comporte de la même façon pour le pied; on le contourne avec le crayon plat après avoir marqué de deux traits transversaux le milieu des deux malléoles. Il ne faut pas manquer de suivre à chaque nouvel examen le même procédé qu'aux examens précédents. On peut admettre que la forme du pied est plus exacte, anatomiquement, si le poids du corps ne porte pas sur le pied observé. J'ai toujours fait porter le poids du corps sur les deux pieds, comme dans la station debout régulière, pendant le relevé du contour de chacun d'eux, de façon à avoir le pied dans son état fonctionnel, avec ses dimensions à l'état de travail, comme la station debout les présente pour chacun des segments du corps. Poids du corps. — En tête de la fiche individuelle figure le poids. Il suffit de savoir que la pesée devra toujours être effectuée, l'enfant étant dépourvu de tout vêtement. Le procédé de pesage de l'enfant vêtu, puis la soustraction du poids des vêtements pesés ensuite et à part, est à peine acceptable pour le nourrisson auquel on craint de faire prendre froid. Il est tout à fait à rejeter pour les grands enfants. Telle est la manière d'opérer la mensuration d'un enfant donné, lequel devra toujours être observé dépourvu de vêtements, muni tout au plus d'un caleçon de bain.
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��CHAPITRE IX
NOTATIONS A INSCRIRE SUR LA FICHE INDIVIDUELLE DE CROISSANCE1
Cadre physiologique et clinique des mensurations. — Les alternances des accroissements et la période semestrielle. — Notations à relever sur l'enfant découvert. — Notations à relever sur l'enfant couvert et parmi elles, couleur des yeux et des cheveux. — Tempérament. — Rapport de la durée du repos à la durée de l'effort.
Cadre physiologique et clinique des mensurations. — Les mensurations ne donneraient que des renseignements incomplets et d'une utilisation limitée si elles étaient isolées. Il leur faut toujours un cadre physiologique et clinique, et le but des notations est de leur constituer ce cadre. Parmi elles, les unes sont à prendre une seule fois, les autres sont à répéter semestriellement. Le semestre est en effet la période la plus pratique et la plus conforme aux exigences physiologiques de l'observation. La plupart des alternances de la croissance, je crois l'avoir démontré précédemment, peuvent être
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Note de la page 243.
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saisies par la répétition semestrielle de l'observation. Sans doute, quand l'enfant est encore un bébé, il est intéressant de le suivre de plus près, mais cela importe plus à la direction de sa santé qu'à celle de son éducation proprement dite, et le médecin avisera. Toujours est-il que la période semestrielle est suffisante à l'âge auquel l'enfant fréquente l'école. Pour chacune des notions qu'est appelé à relever l'éducateur, je veux indiquer le mode d'appréciation le plus pratique, le plus rapide, et cependant le mieux capable de passer avec le maximum de précision dans la « formule individuelle » lors de sa constitution. Notations à relever sur l'enfant découvert. — L'enfant étant nu, son « ensemble » est apprécié dès l'abord, et noté au moyen de deux qualificatifs : grand, moyen, petit, auquel on aj oute : gros, grêle, massif, svelte, découplé, etc.... Cette notion d'ensemble ainsi entendue, sert de temps en temps à éclairer diverses autres notations; elle est en outre utilement représentative. Comme l'ensemble peut se modifier avec les progrès de la croissance, la fiche individuelle réservera pour cette appréciation comme pour toutes celles qui vont suivre, le même nombre de colonnes que pour les mensurations. La « maladie présente » est à inscrire d'après le diagnostic du médecin. De même, il appartient au médecin de diagnosti-
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quer les signes de maladie générale, limitée ou acquise, les symptômes d'affection nerveuse, les troubles nerveux actuels ou menaçants. Le maître reconnaîtra parfaitement, et il notera avec le plus grand soin les cicatrices de blessures, les traces de coups, de bosses, les ecchymoses ou plaques violacées, bleuâtres, verdâtres ou jaunes, leur siège et leur cause avec l'époque à laquelle la blessure a été reçue. On ne connaît pas assez les conséquences éloignées des traumatismes. Il suffit de suivre les mêmes enfants en les observant attentivement à travers les années pour comprendre tout l'intérêt qui s'attache aux premiers soins bien compris d'un trauma même léger. Vous pourrez toujours noter les asymétries qui vous frapperont, celles du visage en particulier. Le médecin notera aussi de son côté les défauts de symétrie ayant des corrélations avec diverses circonstances que son examen clinique fera ressortir. La rubrique « particularités » où peuvent s'inscrire les asymétries, est destinée aux remarques qui ne trouveraient pas place ailleurs. Les déformations sont les modifications qui surviennent au cours de la croissance telles que les déviations. Tandis que les malformations sont les défauts de construction organique que l'enfant apporte en naissant. Vous pourrez apprécier le relief musculaire géné-
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ral, et pour cela vous aurez à distinguer les saillies formées par le tissu adipeux. Un enfant peut présenter des reliefs aux mollets, aux bras, et ne posséder que des muscles très grêles. Ces courbes de la surface du corps qui jouent le relief musculaire, s'observent chez les enfants du sexe féminin surtout, mais aussi chez les petits garçons, très jeunes, et chez ceux qui restent plus ou moins efféminés. Il faut distinguer avec sûreté l'« embonpoint » du « relief musculaire », et cela ne s'apprend pas théoriquement. Laissons au médecin le soin de constater le développement relatif des organes génitaux. Vous pourrez toujours noter l'absence ou l'existence de poil sous les bras, à défaut de la constatation de la pousse pubienne, et vous aurez soin d'indiquer son abondance par des chiffres de 1 à 5, le chiffre 1 correspondant à l'apparition des premiers poils. Vient ensuite l'examen clinique, lequel est tout entier du domaine médical. Vous inscrirez seulement, quand le médecin et la famille vous le communiqueront, le résultat de l'examen clinique en ce qui concerne l'état général; cela en raison des précautions qu'il nécessite ou de son influence sur l'état intellectuel et son développement. Vous aurez aussi à tenir compte des insuffisances visuelle et auditive signalées par l'examen technique.
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Vous ajouterez seulement aux notes précédentes avant de faire reprendre les vêtements à l'enfant, des indications sur la couleur de la peau, sur sa coloration et sur son épaisseur. Notations à relever sur l'enfant couvert. — Une fois l'enfant vêtu, vous pourrez vous occuper d'inscrire sur la fiche individuelle de croissance les renseignements fixes, ceux qui figurent en tête, depuis les noms et les prénoms jusqu'aux antécédents personnels et aux malformations. Vous continuerez ensuite à noter la documentation variable, la partie de cette documentation qui peut être relevée sur l'enfant vêtu, et qui vous réserve les plus délicates observations éclairées désormais par les connaissances que vous venez d'acquérir. Les variations du timbre de la voix, de sa tonalité, les particularités se rattachant à la mue, méritent une mention, ainsi que l'état des dents (bonnes, 3; mauvaises, 1 ; moyennes, 2). Avant d'aborder l'évaluation de la « force », sous ses divers aspects, s'il vous paraissait utile de noter la couleur des cheveux et les changements qui s'y produisent, mais surtout la couleur des yeux, je veux vous indiquer le procédé d'observation auquel j'ai eu recours dans mes recherches, qui m'a assuré une réelle précision, et rendu très attrayante la détermination de la couleur des yeux, Je transcris ce passage de mon ouvrage (Recherches anthropométriques sur la Croissance des diverses parties du corps, 1902-3).
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Couleur des yeux. -— « Contrairement à ce qui a lieu pour la coloration capillaire, la teinte des iris qui est celle des yeux, devient plus claire chez 45 pour 100 enfants aux approches de la puberté. Elle ne devient plus foncée que chez 18 pour 100 seulement. « .... Au total, chez 63 adolescents sur 100, on observe, au moment de la puberté, une modification de la coloration primitive des deux yeux, tandis que 37 sur 100 conservent la même coloration.... «.... Tantôt il s'agit de la réduction à une couleur unique de la coloration complexe primitive, comme cela se rencontre 23 fois sur 100. Tantôt le changement consiste seulement en une modification de la coloration première. «.... La méthode d'observation que je me suis tracée, reconnaît à la surface de l'iris, de l'œil, le petit cercle et le grand cercle : le premier péripupillaire, inscrit dans le second, de couleur constamment homogène, et à peu près constamment de teinte plus foncée que le grand cercle, dont il est souvent séparé par un liseré de couleur variable. « Le grand cercle, étendu des limites du premier jusqu'aux confins de la cornée, de coloration complexe, presque toujours, par suite de la combinaison du pigment rétro-irien (uvée) avec le pigment développé dans la trame même du tissu de l'iris, ou encore du seul pigment de cette trame, composé de grains de [nuances différentes, dont les uns forment la teinte du fond, et les autres affectent des dispositions va-
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riées qui peuvent être toutes ramenées aux quatre formes suivantes : stries, taches, mouchetures, points. » Voilà pour la couleur des yeux. Couleur des cheveux. — Quant à la couleur des cheveux, elle est à mentionner sans détails : roux, blond, châtain, noir, avec les épithètes clair ou foncé; car elle change chez 28 sur 100 enfants. Les couleurs qui se sont modifiées sont : 14 fois le châtain foncé, 8 fois le blond, 4 fois le châtain clair, 1 fois le châtain, et 1 fois le roux-clair. Les couleurs acquises ont été le noir 15 fois, le châtain foncé 6, le châtain clair 2, le châtain 2, le roux foncé 1; 2 jeunes gens ont retrouvé après la puberté la couleur des cheveux qu'ils avaient avant son éclosion, ayant subi un foncement temporaire pendant l'évolution germino-somatique. D'une façon générale, la puberté fonce la couleur des cheveux et rend plus claire la couleur des yeux. Il m'a semblé que ces considérations que j'avais développées en 1902, étaient de nature à vous intéresser et qu'elles méritaient de vous être exposées plus complètement que je ne l'avais fait à propos des influences pubertaires. Possédant la méthode si simple d'observation, vous vous exercerez volontiers à la détermination des couleurs des yeux, et vous parviendrez à une véritable virtuosité dans cette lecture dont votre ingéniosité d'éducateurs peut fort bien tirer d'utiles effets pédagogiques.
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D'ailleurs, ces changements de couleur des yeux ne sont pas sans corrélations physiologiques et psychologiques que vous découvrirez vous-mêmes. Force. — Qu'il s'exerce au jeu ou à quelque sport, qu'il lutte, qu'il fasse des armes, qu'il se livre à la gymnastique sous l'une quelconque de ses formes, l'enfant manifestera l'absence ou la présence de ces trois qualités physiques : force, agilité (et élasticité, détente) et résistance ou rapport de la durée de l'effort à la durée du repos. Le moins bon procédé d'évaluation de la force est certainement l'épreuve dynamométrique dont les résultats sont si différents suivant que l'enfant est livré à lui-même ou qu'il est sous l'influence d'une cause d'émulation ou de stimulation, ou encore suivant que les ressorts exercent directement leur pression dure sur la face palmaire des articulations métacarpo-phalangiennes, ou que cette pression est adoucie par l'interposition d'une bande de molleton. Les résultats enfin varient dans de telles proportions entre le premier essai et celui du huitième jour d'apprentissage méthodique qu'on est contraint de reconnaître que le chiffre obtenu, en soumettant une fois de temps en temps un enfant à l'épreuve du dynamomètre, ne représente ni sa force absolue, ni sa force relative. Je vous propose de conclure qu'un apprentissage méthodique doit, comme pour les autres exercices gymnastiques, du reste, précéder l'épreuve du dyna-
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momètre, celle dont mention doit être faite dans la fiche individuelle. Les autres procédés d'évaluation de la force répondent à des qualités plus générales, moins localisées. Tempérament. — Le tempérament a été magistralement étudié par le professeur Manouvrier dans ses leçons à l'Ecole d'Anthropologie de Paris. Ce maître en a fait paraître la substance dans la Revue Mensuelle de l'Ecole d'Anthropologie nos du 15 décembre 1896 et du 15 juin 1898. M. Manouvrier considère les tempéraments comme étant représentés par les degrés divers de la potentialité nerveuse. Il en distingue trois degrés : le supérieur, ou tempérament sthénique, le moyen ou tempérament mésosthénique et l'inférieur ou tempérament hyposihénique. Il estime que son évaluation doit se réduire à la simple appréciation du degré d'énergie nerveuse manifestée dans certains actes ou dans l'ensemble des actes des individus examinés. Nous notons donc la dépense d'énergie de 1 à 5, suivant le conseil de M. Manouvrier : 3 représente une énergie moyenne, 5 une énergie supérieure, 1 une énergie inférieure; 2 et 4 des énergies très voisines de la moyenne, mais qui émergent, 4 avec une certaine supériorité, 2 avec une relative infériorité. C'est ainsi que depuis 1893, j'ai évalué la quantité d'éner-
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gie des écoliers observés aux Ecoles des Andelys puis de St-Hippolyte-du-Fort, où 300 enfants ont été qualifiés plus ou moins énergiques, non seulement d'après les renseignements fournis sur eux, mais surtout d'après l'observation directe de leur activité en récréation, en promenade, à l'exercice militaire, à la gymnastique, et même en classe. Chaque semestre ajoutait son évaluation aux précédentes, et je puis suivre aujourd'hui pas à pas les modifications de l'énergie apportées par l'âge, la croissance, l'éducation, le milieu. Comme d'autre part les variations de ces diverses influences ont été notées périodiquement en même temps que les résultats de l'examen anatomique, physiologique et clinique, les corrélations organiques de chacun apparaissent au fur et à mesure de la mise en œuvre. J'ai vu ainsi se « constituer » la « formule individuelle » qui ne représente pas une conception plus ou moins heureuse de ma part, mais dérive de ces corrélations de faits. Après l'appréciation du tempérament, l'éducateur notera un certain nombre de manières d'être dont la combinaison avec le tempérament peut mettre sur la voie du caractère, cette synthèse complexe qui n'a pu encore être faite d'une façon définitive. C'est dans ce sens que l'éducateur se renseignera auprès des parents sur l'humeur de l'enfant à son réveil ; est-il triste et taciturne ? est-il souriant, bavard ? est-il maussade, autoritaire ?
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L'humeur indifférente sera évaluée 3. Est-elle maussade, on inscrira 1 ; triste, elle vaudra 2. Si elle est au contraire souriante, elle sera cotée 4, et elle méritera 5 si elle se montre gaie avec exubérance. Rapport de la durée du repos à la durée de l'effort. — L'éducateur précisera son appréciation générale de l'intelligence I, en l'évaluant de 1 à 5, le chiffre 5 marquant toujours le degré intellectuel le plus élevé. La mémoire peut être évaluée par l'éducateur isolément, ou bien être jointe à I suivant sa façon personnelle d'envisager la question. A, exprime l'alternance, le rapport -£- c'est-à-dire le rapport de la durée du repos à la durée de l'effort. La valeur de r et la valeur de e représentent des moyennes d'évaluations multiples relevées à divers moments de la journée au cours des différentes manifestations de l'activité de l'enfant, somatiques (A s) et intellectuelles (A c). Chemin faisant vous avez noté la conduite moyenne du semestre, l'attention moyenne. Et maintenant, la formule individuelle vous demande quelques calculs destinés à fournir les éléments dont vous pouvez avoir besoin en travaillant à sa constitution mais déjà, par eux-mêmes, les résultats de ces calculs vous renseignent utilement sur la longueur de chacun des quatre grands segments constitutifs de la taille, sur la longueur des membres, et des segments de membres, sur la longueur du buste, sur le volume
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du crâne, sur le volume du tronc, sur la longueur totale des membres, les supérieurs ajoutés aux inférieurs, sur le volume de la musculature, sur l'ampliation respiratoire. Ces calculs se limitent à de simples opérations d'arithmétique, soustraction, addition, multiplication et division. Pour l'éducateur, chacun de ces résultats est parlant et représentatif au point de vue de la fonction et des conditions de l'individualité. Aussi, une fois ces calculs faits, se trouve-t-il absolument prêt à constituer la formule individuelle et à l'interpréter avec sûreté, avec précision dans le sens de la mise en relief de l'individualité somatique, dans le sens de l'individualisation de la direction éducatrice.
�CHAPITRE X
DÉTERMINATION DE
L'«
INDIVIDUALITÉ SOMATIQUE »
1
PAR LA « FORMULE INDIVIDUELLE » DE CROISSANCE
La formule individuelle de croissance et l'individualité somatique. — La formule individuelle vise la fonction. — Constitution de la formule individuelle. — Son interprétation.
La formule individuelle de croissance et l'individualité somatique.— L'individualité somatique dont nous venons de détailler les éléments, est, en quelque sorte, synthétisée à chaque moment de la croissance par la « formule individuelle de croissance ». En étudiant la constitution de cette formule, nous saisirons l'utilisation de notre récolte; et nous verrons les diverses interprétations dont est susceptible chacun des facteurs de la formule individuelle. La formule individuelle prend comme terme de comparaison les volumes du crâne et du tronc : le premier parce qu'il fait intervenir comme facteur
1 Voir La Formule individuelle de croissance. Guide des parents, du médecin et de l'éducateur. A. Maloine, édit., Paris 1913.
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la capacité du réservoir de potentiel énergétique qui est aussi le centre des « harmonisations »; l'autre, parce qu'il représente le volume du réservoir dans lequel se trouvent réunis les viscères que leur rôle désigne comme transformateurs-distributeurs. La formule individuelle vise la fonction. — C'est qu'en effet, la formule individuelle de croissance, à travers les conditions et les rapports anatomiques, vise les relations fonctionnelles, telles que celles des segments viscéraux entre eux, les relations fonctionnelles de ceux-ci avec l'étendue à alimenter au point de vue nutritif et énergétique. Le tronc et le crâne sont des contenants, des caisses renfermant les viscères. Il importe, en conséquence, d'en évaluer le volume. Sans doute leur forme irrégulière ne permet qu'une évaluation approchée; ni l'une ni l'autre de ces deux caisses n'a, en effet, une de ces formes définies dont le calcul détermine exactement la capacité. La multiplication de la largeur par la profondeur, puis du produit par la hauteur ne pourra donc nous donner leur véritable cubage. Quans nous emploierons, faute d'autres, l'expression cuber, nous n'aurons pas la prétention d'effectuer un cubage absolu. Nous rechercherons seulement et nous obtiendrons, relativement au volume de leur contenu, une évaluation approchée qui, calculée avec les mêmes éléments chez les divers sujets ou chez le même enfant aux phases successives de la croissance, rendra la comparaison possible et les différences
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observées extrêmement instructives; et c'est ce qu'il nous faut. La division préalable par un même chiffre, 3, de tous les nombres qui ont à entrer en ligne pour les calculs ne change rien à leur valeur relative, et elle a l'avantage de réduire la quantité des chiffres avec simplification consécutive des calculs. Constitution de la formule individuelle et son interprétation au point de vue éducatif. — Le tronc répond aux viscères transformateurs-distributeurs. (L'appareil digestif transforme les substances alimentaires en substances nutritives; l'appareil pulmonaire transforme le sang veineux en sang artériel; les vaisseaux chylifères distribuent au sang les aliments transformés, les vaisseaux lymphatiques vont baigner les tissus, la distribution du sang est opérée par le cœur, etc.) Le tronc est cubé par le produit de la multiplication de ses trois diamètres, transverse, antéro-postérieur et vertical (ce dernier mesuré par la distance fourchette sternale à pubis ou à grand trochanter). Le produit de cette double multiplication est appelé V (Viscères). V varie énormément depuis la naissance jusqu'à l'âge adulte et il est exprimé par un chiffre différent à chacune des phases de la croissance, à chacun des semestres successifs. Il en est de même du produit C de la double multiplication des diamètres du crâne, dont le con13
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APPLICATIONS ÉDUCATIVES
tenu est l'encéphale, le cerveau, par conséquent. Le rapport de C à V donne un quotient qui renseigne sur les proportions relatives des viscères de la vie végétative et de ceux de la vie psychique, ainsi que sur les relations fonctionnelles d'ordre nutritif entre le cerveau et le soma. Le quotient informe l'éducateur du champ libre que lui laissent les ressources végétatives individuelles pour la culture cérébrale; il l'avertit en temps utile d'avoir à supprimer cette culture telle qu'on la donne à l'école, et à la remplacer par une culture objectivée avec participation du corps : à savoir, travaux de la campagne ou, à leur défaut, apprentissage d'un métier, comme le voulait J.-J. Rousseau ; et cela, jusqu'à ce que soient acquises à l'organisme des ressources végétatives plus puissantes ou du moins plus éduquées. Le quotient du rapport au moment de la puberté, va de 20 à 23 chez l'enfant moyen bien équilibré, régulier. C'est là encore un avertissement précieux pour l'éducateur. Il y a plus, le quotient en question, qui est de 74 chez le nouveau-né, s'achemine suivant une progression déterminée vers ce chiffre moyen de 20 à 23. Si bien que, suivant sa valeur, on peut estimer d'une façon très approchée la distance qui sépare encore l'enfant de l'éclosion de sa puberté. Pour apprécier comme il le mérite un renseignement de cet ordre, il nous suffît de nous rappeler ce
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que la croissance nous a appris touchant le « moment éducatif » du cerveau. En faisant connaître à l'éducateur le temps qui doit s'écouler avant l'éclosion de la puberté, la formule individuelle de croissance, le rapport spécialement, lui permet d'évaluer le temps dont il dispose pour la culture prépubertaire du cerveau.
4"
-S- est à mettre en regard de l'évaluation énergétique du tempérament, en regard de la potentialité dont il peut parfois expliquer la pauvreté ou la richesse. Quant à la dépense d'énergie, à sa rapidité ou à sa lenteur, à l'importance du « débit de l'énergie de l'enfant », l'éducateur trouve dans le rapport à V d'une autre grandeur 0 (ossature) une indication très suggestive des causes inhibitrices ou des causes adjuvantes. 0 représente la longueur totale du membre supérieur ajouté à la longueur totale du membre inférieur. C'est donc une dimension linéaire; et, à certains égards, il peut paraître singulier qu'elle soit prise pour numérateur d'une fraction dont le dénominateur est un volume. Mais qu'on n'oublie pas que nous envisageons ici la fonction et non plus seulement la donnée anatomique. La fonction distributrice du tronc viscéral est d'autant plus laborieuse que les membres sont plus longs. Les variations de leur volume dues à des causes autres que l'adipose, n'ont que peu d'influence sur le travail distributeur; la
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APPLICATIONS ÉDUCATIVES
longueur a, par contre, une influence directe et qui se traduit d'une façon précise chez l'enfant, par la faiblesse, l'apathie, la fatigabilité de tout l'organisme avec répercussion sur la fonction ergogène des centres nerveux. -y- nous éclaire sur les proportions relatives de la tige membrale totale et du tronc, ou, si vous le voulez, sur le rapport du tronc aux branches de l'arbre humain. Ce quotient nous renseigne sur les possibilités somatiques probables. Il nous montre de quelle activité nutritive est pourvu l'outillage locomoteur proprement dit. Il désigne à l'éducation physique la partie de l'organisme sur laquelle doit porter l'action fortifiante, la culture développatrice. L'éducateur sait, par lui, l'étendue du déficit à combler : si déjà le rapport -§- nous a montré l'insuffisance du tronc d'un enfant comparé à l'enfant moyen de sa catégorie, et que :-°r confirme cette donnée en nous montrant le déficit du tronc en fonction des membres, il n'y a pas d'hésitation possible, c'est sur le tronc que doit porter la sollicitude de la culture physique secondée par une action combinée sur les membres eux-mêmes. L'éducateur est averti par les deux rapports -y- et -y- de la formule individuelle 'qui lui désignent le point sur lequel doit porter son action; à lui d'agir en conformité de cet avertissement s'il entend avant tout sauvegarder le développement physique régu-
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lier de l'enfant, si la famille le laisse libre dans sa direction éducatrice et que celle-ci soit comprise comme elle doit l'être. Eclairé par la formule individuelle de croissance, on sent combien la marche d'une culture générale est prudente et avisée, on se rend compte de la précision des applications éducatives, des applications pédagogiques en des points aussi clairement désignés. Bientôt, la direction ainsi inspirée recueille des résultats encourageants, l'éducation ne tarde pas à faire changer les chiffres du quotient dans le sens désirable : le transformateur-distributeur gagne en volume, et les membres n'allongent plus que modérément; de telle sorte que, peu à peu, la disproportion s'atténue. Pour simplifier les calculs précédents, je vous le rappelle, je divise tous les nombres par le même chiffre 3, ce qui ne change en rien leur valeur relative. Le développement musculaire est donné par la différence entre la circonférence de l'avant-bras minimum, et la circonférence maximum du même segment. C'est qu'en effet, du volume apparent d'une masse musculaire membrale sont à retirer le volume du tissu conjonctif et celui du tissu osseux. La circonférence de l'avant-bras minimum évalue d'une façon approchée le volume conjonctivo-osseux. En la retranchant de la grosseur la plus grande offerte par l'avant-bras, on obtient pour différence
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APPLICATIONS ÉDUCATIVES
la grosseur de la masse musculaire anti-brachiale avec ses vaisseaux, ses nerfs et ses tissus cutanés. La lettre M qui l'exprime peut être considérée comme représentant le volume musculaire en fonction du volume osseux et -f^-, la puissance en fonction de la longueur des bras de levier. L'éducateur a, en effet, pour premier devoir de maintenir l'équilibre en V, M, C, condition de la stabilité et de la puissance ordonnée de l'individu, avec maintien des ressources nécessaires à l'action procréatrice. Si l'on s'enquiert de l'ampliation respiratoire telle que la traduit l'ampliation thoracique dans l'inspiration, on obtient R en retranchant du diamètre transverse du thorax en inspiration le diamètre transverse du thorax au repos. On a également une valeur de R en retranchant la circonférence thoracique xiphisternale au repos de la même en inspiration. Pour éviter toute confusion dans le travail de comparaison, nous appellerons R d la première et R p la seconde. Je continue à rechercher R p, pour me permettre la comparaison des résultats nouveaux avec la masse des précédents, avec les chiffres de l'enfant moyen à chaque âge, mais je ne néglige pas les diamètres en inspiration, mesures auxquelles je vous engage à vous limiter pour les raisons anatomiques que je vous ai exposées plus haut.
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279
La valeur de R se prête à diverses considérations qui offrent toutes un vif intérêt pour l'éducateur. Cependant, R (ampliation respiratoire) ne peut prendre place sur le même plan que les données précédentes dans la formule individuelle, parce qu'elle implique l'intervention du sujet, de sa bonne volonté, comme du reste l'épreuve spirométrique. Il en résulte de l'incertitude dans l'appréciation de cette valeur et une réserve nécessaire dans son utilisation. Notons cependant que les moyennes calculées sur un grand nombre de cas particuliers permettent d'affirmer l'abaissement du taux respiratoire de R après la puberté. Ce fait est susceptible de diverses interprétations que doit également pouvoir envisager l'éducateur. La réduction de l'ampliation, de R, au lendemain de la puberté, exprime-t-elle une réduction de l'activité respiratoire ? Dans une certaine mesure il y a en effet réduction de l'activité respiratoire comparativement à l'activité pré-pubertaire. Mais la plus forte part de la diminution de Jf? paraît répondre à la production d'un autre phénomène, à savoir, le « changement de sens de l'ampliation majeure du poumon » qui, de transverse avant la puberté, devient verticale après elle. L'éducateur a besoin de contrôler ce fonctionnement et cette suppléance, car la position assise apporte un obstacle au jeu du diaphragme, au refoulement par lui des viscères abdominaux.
�280
APPLICATIONS ÉDUCATIVES
Comme, d'autre part, dans la station assise, la position des membres supérieurs de l'écolier et l'incurvation de sa colonne vertébrale gênent l'ampliation thoracique transverse, il y a en réalité obstacle dans les deux sens à une ampliation pulmo-. naire suffisante, et il se peut que la réduction consécutive à la puberté soit, en partie, imputable à ces circonstances scolaires. R est à suivre par l'éducateur, mais surtout à titre d'indication et d'avertissement. Il y a heu de le contrôler par les données anatomo-physiologiques corrélatives, et d'observer la manière de se comporter de chaque enfant relativement à cette valeur de R et à ses variations.^
La voie est ouverte. Et maintenant à vous tous, qui vous livrez sincèrement à l'observation de l'enfant, de vérifier les déductions qui précèdent et de multiplier les applications utiles des résultats que fournit la méthode auxanologique.
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Voir suite de la Bibliographie, page 285.
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�INDEX DES NOMS CITÉS
AICABD (JEAN), 22. AITKEN. ALBERTI, 36. AMMON (OTTO). ANDRY, 35. ANTHONY. APBBT. ATGIEB. AUBOYEB. BAGNAUX (DE), 184. BABDELEBEN, 230. BAUMEL, 92. BEDDOE. BERGSON, 22. BERNARD (CLAUDE). BERTILLON (AD.). BERTILLON (ALPH.).
BUTTE. CAMEBEB. CAPDE VIELLE. CAPITAN. CARDOT, 184. CABLIEB, 27, 59, 63, 65. CHAILLOU. CHANTÉE. CHABPY. CHAUMET, 59. CHAUVEL. CLAPARÈDB (BD.), 4, 167. COLLIGNON (B.). COLLINEAU. COMBE, 62. COMBY. COBNEVIN. COUBTADE. COUBTOIS-SUFPIT. CRUCHET, 40, 80.
BlÉRENT. BlZZOZÉBO.
BOAS (FR.). BOAS (J.-E.-V.). BONIPAY. BOUCHARD. BOUDIN. BOUILLY. BOULAND. BOUBNEVILLE. BOUVIEB. BOVEBI. BOVET (PIERBE), 20. BOWDITCH. BOYD, 55, 87, 88. BBANCA. BEISSAUD. BBOCA (PAUL), 35, 61, 246. BEOCA (A.). BEUDENNE, 180, 186. BUFPON, 27, 119. BUBK. BUSCHAN.
CCWEL.
DAFFNER, 63. DALCBB. DALLY. DEBIEBEE. DELISLE (FERNAND). DELORME. DEMOLINS, 106. DENIKER. DIMITRESKOY. DONALDSON. DUFESTEL, 190. DUHAMEL. DUPBÉ. DURER (ALBERT), 36. DUVAL (MATHIAS). DELPEUCH (ARMAND). EBISMANN.
�288
FAHBNER, 184. FÉRÉ. FÉRET, 180, 185. FLOURENS. FORGUE (EMILE). FORT (J.-A.).
INDEX
DES
NOMS CITÉS
LANNELONGUE. LAVERAN (A.), 222. LAVERAN (L.), 282. LEGENDRE. LÉTOURNEAU. LEWIS, A. SAYRE. LIEBREICH.
FRANCILLON (D' MARTHE), 70, 80, 136. FRORIEP. GEGENBAUR. GEOFFROY ST-HILAEBE (ISID). GERDY, 35. GIARD. GILBERT. GIROUD. GIUFFRIDA-RUGGIERI. GLEY, 79. GODARD. GODIN (PAUL), GOMBAULT. GOULD. GRANCHER. GRÉARD, 184. GUILLAUME, 184. HACHET-SOUPLET, 19. BLECKEL (ERNST). HALL (ST.). HALLS DALLY. HAMY. HÉBERT (L'.), 218. HERBER (D'), 229. HERTOGHE. HTRTZ. HTRTZEL. IKOW. JACKSON. JOLYET. JOSIAS. KING. KJRMISSON. KOSMOWSKY. KOTTMANN, 180, 186.
LlHARZIK.
LIVI (RID.), 232. LOISEL. LORENZ. LUSCHAN (VON), 61. MAESTRELLI. MAGITOT, 92. MAHOUDEAU. MALLING HANSEN, MANOUVRIER 26, 27. 13, 37, 142,
(L.),
54, 55, 59, 87, 62,
185, 186, 189, 197, 209, 223, 235, 240, 249, 255, MAREY, 122. MARFAN, 39, 65. MARRO, 99. MATIGNON. MAUCHIN 185.
49, 152, 215, 267.
(de Genève),
180,
MAUCLATRE (P.-L.). MAYET, (L.). MEIGE. MELZI. MÉNARD (ST Y.). MENDEL, 68. MÉNÉTRIER, 86. MERZ.
MlNOT Moss,
MILNE-EDWARDS, 118. (S.). 184.
MOLLISON. MONDIÈRE. MONTESSORI. MORACHE. MORAT.
Mosso. Moussu.
NICOLAS. NOOIER. ODIER. OLLIER.
LABIT. LAGNEAU. LAGRANGE.
�INDEX PAGTJIANI. PAPILLAULT,
DES
NOMS
CITÉS
289
SEELAND.
37..
SEGOND (P.). SERGI. SIGNORBLLI.
PARKER. PAUL-BONCOUR (G.). PAULET. PAULIN
SlSTACH.
(et
LABIT).
SOULARUE. SPENCER STANLEY. STIER. STOLAROPP. STRATZ, (HERBERT),
PPITZNBR. PHIDIAS,
31, 63.
35.
PIETRI. PITTARD (E.). PLŒTZ. POIRIBR. POLYCLÈTE, POUTRIN, PONOBT. PRENANT. PRENT. QUBTELET, RECHE. RÉGNIER. RETTERBR.
37, 40.
35. 49, 6]
TENON. TESTUT. THOMA. THOORIS.
TlLLAUX.
TissrÉ, 208. 24, 27, 59, 125.
TOPINARD (P.), TOURDES. TROISIER, VALLIN. VARIGNY (H. DE), VARIOT,
36.
86, 148. 60, 61, 62.
RlBIERRB. RlCCARDI.
RICHARD. RICHBR (P.), RXCUET
59.
VERNBAU.
35. 54, 60, 87.
VIALLBTON.
RICHBT (CH.), RIVET. RIVIÈRE (E.). ROBERT. ROBERTS. ROBIN (PAUL). ROLLAND (D'), ROLLET (ET.).
VlASEMSKY. VlAULT (et JOLYET).
VIERORDT.
VlLLERMÉ.
VINCI (LÉONARD DE). VIOLA. VTRCHOW. VIRY. VITRUVE, VOGT
180, 184. 274.
35.
YUNG).
ROUSSEAU (J.-J.), SACCHI, 99. SALOMON. SAPPEY. SCHTNDLER,
(et
VOLKOV. WAGNER. WEISGERBER. WEST.
180, 186.
WIENER (CHR.).
SCHMID-KUNZ. SCHMID-MONNARD. SCHMXDT, SCHWERZ.
WlLLE. WOILLEZ.
YUNG.
59.
Pour les auteurs dont les noms ne sont pas suivis de l'indication de la page, on est prié de consulter la Bibliographie.
19
�Explication de quelques termes techniques.
Accroissement inégal : activité de croissance différente des divers tissus qui entrent dans la constitution d'un même organe. Acuité des sens: degré, précision, délicatesse de leur fonctionnement. Adipeux, tissa adipeux : graisse. Adipose : envahissement par la graisse des diverses parties du corps. Adolescence : répond à la phase pubertaire de l'enfance; elle s'étend aux deux années qui précèdent et aux deux années qui suivent l'apparition de la puberté. Ages d'évolution : âges qui correspondent aux principaux changements dans les proportions du corps. Alternance : signifie ici succession d'une phase de repos relatif à une phase d'activité. Ampliation thoracique : dilatation du thorax. Anthropologie : histoire naturelle de l'homme. Anthropométrie : mensuration de l'homme au moyen du mètre et d'après des points de repère déterminés. Asymétrie : l'asymétrie des épaules, par exemple, existe quand les deux épaules ne se trouvent pas dans la même plan horizontal Auxanologie : étude de la croissance suivant la méthode auxanologique. Auxanométre : instrument qui réunit les divers moyens de mesure auxanologique (toise debout, toise couchée, plancher, grande glissière) à part le ruban métrique et la balance-bascule.
Brachyskèle : individu dont les membres inférieurs sont courts relativement au buste.
�TERMES TECHNIQUES
291
Bras : segment du membre supérieur compris entre le coude et l'acromion. Buste : étendu du plan du siège au vertex.
C
Canon anthropométrique : les proportions moyennes de l'homme déterminées au moyen du mètre. Cartilage : tissu de transition pour l'os ; certains cartilages, les fibro-cartilages, ne s'ossifient qu'exceptionnellement. Cartilage de conjugaison : cartilage juxta-épiphysaire ; il est situé près de l'extrémité des os longs ; il produit du tissu osseux et contribue à l'allongement de l'os. Clinique : observation clinique, celle d'un organisme qui subit un trouble. Colonne vertébrale : rachis, soutien osseux de la moitié supérieure du corps. Corps thyroïde : glande à sécrétion interne située à la base antérieure du cou, au-dessus de la fourchette sternale, et à laquelle est attribuée une influence importante sur le développement du corps. Cou : segment étendu de la fourchette sternale au conduit auditif.
D
Diaphragme : vaste muscle plat qui sépare la cavité thoracique de l'abdomen, et contribue puissamment à l'acte respiratoire. Distal : celui des deux segments envisagés qui est le plus éloigné du point d'attache du membre.
E
Embryogénique : qui engendre des éléments embryonnaires. Embryonnaire : qui a trait à l'embryon, première phase de la vie intra-utérine. Energie : la force transformée par les centres nerveux et utilisée dans toutes les manifestations de l'activité somatique et psychique. Enfance : période de la vie de l'homme étendue depuis la naissance jusqu'à la jeunesse (c'est-à-dire deux ans au delà de l'apparition de la puberté). Envergure, grande envergure : dimension comprise entre l'extrémité d'un médius et l'extrémité de l'autre quand les bras sont étendus en croix.
/'
�292
TERMES TECHNIQUES
Ergogène : qui engendre de l'énergie. Eunuque : individu privé des organes de reproduction et qui, par conséquent, n'a pu faire sa puberté. Euphorie : état de bien-être, effet du bon fonctionnement organique.
r
Fonction, fonction physiologique : condition organique de l'activité. Fœtal : qui a trait au fœtus, deuxième phase de la vie intrautérine.
o
Gernien : l'élément reproducteur envisagé dans son essence. Germinal : qui dérive du germen, et par conséquent est une condition de la fonction de reproduction. Gigantisme : total, est une exagération de toutes les dimensions du corps ; si l'exagération n'intéresse qu'un segment, le gigantisme est segmentaire. Gymnastes : enfants entraînés à la gymnastique.
H
Harmonisation objective : s'entend ici de l'accord entre le cerveau et le soma en vue de l'acte à accomplir. Hypertrophie : augmentation d'un tissu ou d'un organe suivant une ou plusieurs de ses dimensions, par grossissement ou par multiplication de ses éléments constituants. Hypophyse: glande à sécrétion interne située dans le crâne; au-dessous du cerveau. Il lui est attribué un rôle important dans le développement du corps.
X
Individualité : ce qu'il y a de constant dans un être humain donné. Individualisation : art d'ajuster à l'individualité. Immature : répond chez les animaux à non pubère chez l'homme. Inhibitrice ( cause) : cause qui met obstacle. Instabilité : ne s'applique ici qu'à l'instabilité physique, somatique. lnternubïlo-pubertaire (période....) : répond à la phase de jeunesse, et s'étend de la fin de la puberté P5A3 (deux ans après son apparition) à la nubilité.
�TERMES TECHNIQUES J
293
Jambe : segment étendu de la malléole au genou; segment distal du membre inférieur. Jeunesse : étendue de la fin de la puberté P5 A3 à la nubilité, soit les trois dernières des cinq années qui séparent l'apparition de la puberté de l'état adulte. La jeunesse répond à la période internubilo-pubertaire dans les deux sexes.
X.
larynx : organe de la voix, occupant la partie moyenne du cou. Lignée séminale : générations successives des cellules germinales. Lignée somatique : générations successives des cellules somatiques. Locomoteur : organe locomoteur, le muscle, l'os, les membres, etc.
M
Macroskèle ; buste court relativement aux membres inférieurs. Majorée, croissance majorée : accroissement d'une dimension supérieur à ce qu'il était précédemment dans un même laps de temps. Mature : synonyme de pubère; s'applique aux animaux. Mensuration : action de mesurer, est encore synonyme de mesure. MésatisTcèle : buste moyen relativement aux membres inférieurs ; le mésatiskèle offre les proportions du plus grand nombre, de la majorité. Méthode auxanologique : méthode d'étude de la croissance, qui suit le même enfant et l'observe périodiquement par de multiples mensurations et une observation aussi complète que possible au triple point de vue anatomo-physiologique, psychologique et clinique. Mue, mue de la voix : changement dans le timbre et dans la tonalité de la voix, s'opérant au moment de la puberté.
Ht
Nanisme : réduction excessive des dimensions du corps. Le nanisme peut être total ; il peut n'intéresser qu'un segment du corps, nanisme segmentaire. Nubilité : moment où le soma est en état de prêter un concours parfait au germen; en d'autres termes, époque à laquelle le corps touche au terme de sa croissance et devient un facteur puissant et ordonné de la fonction de reproduction.
�294
TERMES TECHNIQUES
Nutrition: assimilation par les tissus des apports alimentaires transformés et distribués par les viscères du tronc.
O
Ontogénie : développement de l'individu. Ontogénie post-fœtale : développement qui suit la naissance. Ostéogène : qui engendre du tissu osseux; le cartilage de conjugaison a un pouvoir ostéogène, le périoste aussi.
P
P : en auxanologie, représente les poils au pubis. Quand ils appa1 raissent, P reçoit l'exposant 1 : P ; au fur et à mesure que les poils deviennent plus abondants, P reçoit un exposant plus fort, qui cependant ne dépasse jamais 5. Pathologique, état pathologique : état de maladie. Périmètre ; périmètre 'thoracique : circonférence du thorax, grosseur du tronc. Périoste : gaîne conjonctive et vasculaire qui recouvre l'os et possède un pouvoir ostéogène. Phénomènes : s'entend ici de faits d'ordre surtout physiologique. Physiologique : état physiologique : état de fonctionnement régulier de l'organisme. Placenta : organe vasculaire qui, dans l'utérus, transmet à l'enfant, par le cordon, tout le sang nécessaire à l'entretien de sa vie et à sa croissance. Placentaire, alimentation placentaire : alimentation intra-utérine, alimentation de l'embryon et du fœtus, alimentation de l'enfant avant sa naissance. Potentialité : énergie latente dont dispose le cerveau. Prépubère : qui précède la puberté soit depuis la naissance, soit depuis un moment convenu de l'enfance. Il est pratique de 1 3 1 prendre prépubère à dater de P jusqu'à P A , depuis l'apparition des premiers poils jusqu'à l'éclosion de la puberté. Processus : succession des phénomènes qui font progresser une évolution. Proximal : celui des deux segments envisagés qui est le plus rapproché du point d'attache du membre. Puberté : période de maturation des organes de reproduction. Sa préparation demande deux ans en moyenne : P1 à P3 A1 et son installatoin deux ans aussi : P3 A1 à P6 A3 (ou A6). Son éclosion, P3 A1, précède de cinq ans en moyenne l'état adulte dans les deux sexes.
�TERMES TECHNIQUES
295
R
chis : colonne vertébrale. apports anthropométriques : se calculent en divisant par le plus grand nombre le plus petit nombre multiplié par 100. Réceptivité, état de réceptivité : état favorable de l'organisme, cerveau ou soma, aux implantations étrangères, idées, aussi bien que microbes, toxines, etc.
S
Scoliose : déviation du rachis. Segment : partie du corps comprise entre deux points de repère. Sens : organes qui mettent le cerveau en relation avec le monde extérieur. Soma : le corps moins le cerveau. Désigne encore ici la masse viscérale du tronc (le tronc cubé) : V. Spiromètre : appareil destiné à la mesure de la quantité d'air expiré. Stature : taille. Synthèse : reconstitution effective ou mentale du « tout » dont les éléments avaient été dissociés pour l'analyse.
T
Taille : hauteur totale de l'homme, étendue du sol au vertex et constituée par quatre principaux segments superposés : membres inférieurs, tronc, cou et crâne. Tégument : surface cutanée, peau. Thorax : segment costal du tronc, de l'angle antérieur de la 10e côte à la fourchette sternale. Thymus : glande à sécrétion interne située contre la face postérieure du sternum. Elle n'existe que chez l'enfant, et diminue au fur et à mesure que l'ovaire ou le testicule augmentent. Thyroïde: glande à sécrétion interne sise à la base du cou, en avant, au-dessus de la fourchette sternale et à laquelle est attribuée une influence importante sur le développement du corps, désignée : glande thyroïde, corps thyroïde. Thyroïde : cartilage thyroïde; il forme une saillie à la partie moyenne du cou (pomme d'Adam) et donne attache aux cordes vocales. Fibro-cartilage, il ne s'ossifie pas. Traumas : traumatismes, coups, blessures, chutes. Tronc : segment constitutif de la taille étendu du pubis à la fourchette sternale, renfermant les viscères transformateursdistributeurs.
�296
TERMES TECHNIQUES V
Variations des proportions, des dimensions : s'appliquent ici aux changements qui surviennent au cours de la croissance. Végétatif : a ici le sens de nutritif, opposé à psychique. Vertex : sommet de la tête, point de la surface du crâne le plus élevé au-dessus du sol. Viscères : organes chargés de l'élaboration des éléments capables d'assurer la vie, son entretien et l'accroissement du corps organisé qui les renferme. Ils sont répartis dans deux cavités osseuses protectrices : le tronc et le crâne, continué par le rachis. X Xiphisternal : niveau, point de repère xiphisternal, qui répond à l'extrémité inférieure du sternum, à son articulation avec l'appendice xiphoïde.
�TABLE DES PLANCHES
Pl. I. Proportions des divers segments du corps comparés à la taille (= 100) aux âges d'évolution, p. 38, 39, 46, 83, 109,133, 138, 139. Pl. II. Les âges d'évolution comparés à l'âge adulte, croissance absolue, p. 12, 83, 103, 139. Pl. III. Croissance des diverses dimensions du solide humain aux âges où elles doublent, triplent, quadruplent, p. 24, 30, 83, 164. Pl. IV. Stature (taille). Rythme de son allongement, p. 12, 83, 109. Pl. V. Les âges d'évolution rapportés à l'âge adulte. (Croissance relative, totale et segmentaire), p. 37, 38, 39, 83, 109, 133, 138. Pl. VI. Proportions du corps à 13 ans */g comparées aux proportions à 17 ans 1/2 et à 23 ans Vi, P-47,138. Pl. VII. Courbes des variations proportionnelles des points de repère entre 13 ans i'î et 17 ans 1/2, p. 47, 138. Pl. VIII. Proportions différentes du corps chez des individus de même âge, p. 49, 138. Pl. IX. Accroissement schématique comparatif de G, de C et de V. (Grandes alternances), p. 12, 83, 87, 137,164,165,166. Pl. X. Alternances semestrielles des accroissements entre 13 ans Vg et 17 ans '/g. P- 83, 84, 127, 135, 136, 188. Pl. XI. Tailles debout A et tailles assis B des dix mêmes jeunes gens, p. 185, 186. Pl. XII. Contrôle des effets de la gymnastique (taille, périmètre, poids), p. 197, 199, 202. Pl. XIII. Contrôle des effets de la gymnastique (diamètres et circonférences), p. 203, 210. Pl. XIV. Contrôle des effets de la gymnastique (taille, périmètre, poids), p. 198, 202, 210. Pl. XV. Points de repère sur le squelette et sur la silhouette à divers âges, p. 109, 235, 240, 251. Pl. XVI. Points de repère. Demi-silhouettes géométriques et courbes décroissance, p. 12, 83, 109, 138, 139, 240.
�TABLE
DES MATIÈRES
AVANT-PROPOS INTRODUCTION
5
7
PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE CHAPITRE I.
DE LA
CROISSANCE
— MOTIFS POUR LESQUELS LA CROISSANCE
11
A SA PLACE PARMI LES MATIÈRES ENSEIGNÉES DANS UNE ÉCOLE DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION .
L'âge scolaire est avant tout un âge de croissance. — La croissance a une double influence sur la fonction cérébrale. — Enseignement nouveau; sur quoi il s'appuie. — Aperçu des données que peut fournir l'étude de la croissance. — Son aboutissant est la détermination de l'individualité somatique de l'enfant.
CHAPITRE II.
—
MÉTHODE
D'ÉTUDE DE LA CROIS-
SANCE OU MÉTHODE AUXANOLOGIQUE ....
23
Méthodes à ne pas suivre. — Absence de valeur des mesures isolées. — La mensuration de la taille devient utile dès qu'elle est encadrée. — Rythme de l'allongement du corps. — Qu'estce que l'adolescence 1 —Le grand allongement post-fcetal du corps par les membres inférieurs a lieu entre la naissance et l'âge de 7 ans, et non pas aux environs de la puberté. — La méthode à suivre est celle que dictent la nature des phénomènes et l'objectif utilitaire des résultats de l'observation.
CHAPITRE CORPS DE ADULTE III.
—
PROPORTIONS DE LA
MÉTRIQUES A
DU
L'ENFANT
NAISSANCE
L'AGE
35
Les proportions du corps humain et les artistes de l'Egypte, de la Grèce, de Rome, du moyen âge; les contemporains. — Canon anthropométrique de l'enfant aux divers âges. —
�TABLE
DES MATIÈRES
299
Influence de la croissance sur les variations des proportions du corps. — Proportions partielles. — Importance des corrélations fonctionnelles.
CHAPITRE
IV. —
INFLUENCES QUI AGISSENT SUR LA
CROISSANCE
53
Influences qui agissent sur la taille. —■ Influence de l'alimentation, du sexe, de la race, de l'hérédité, des saisons, de la gestation, des exercices. — Rapports de la maladie avec la croissance et réciproquement. — Influence de la fonction de reproduction.
CHAPITRE
V. —
LA PUBERTÉ (INFLUENCE DE L'ÉLÉ-
MENT REPRODUCTEUR SUR LA CROISSANCE
.) .
69
Détermination de l'éclosion pubertaire. — Quelques causes d'erreur. — Saison la plus favorable à l'éclosion de la puberté. — La presque totalité des phénomènes pubertaires échappe à qui ne répète pas semestriellement son observation sur le même enfant. — Qu'est-ce que la puberté ? Définition de la puberté.
CHAPITRE
VI. —
LA PUBERTÉ
(suite î)
. . . .
83
Analyse de la puberté au moyen des phénomènes de croissance qu'elle détermine. — Croissance majorée, croissance réduite ou arrêtée, croissance totale ou apparition d'organes, disparition d'organes, involutions. — Fonction embryogénique de la puberté.
CHAPITRE
VII. —
LA PUBERTÉ
(suite
2)
. . . .
95
Influence de l'alimentation par le placenta : puberté précoce, puberté tardive. — Quelques conditions somatiques de la puberté psychologique (un exemple). —Séparation des pubères et des non pubères.
CHAPITRE
VIII. — LA PUBERTÉ (suite 3) . . . 107 Durée de la période de puberté; signes de début, signes de terminaison. — Période internubilo-pubertaire ou de jeunesse (jeune homme, jeune fille). — Distance de la puberté à la nubilité ou état adulte. — Quelques considérations éducatives touchant ces périodes. — Synthèse des rapports de l'élément reproducteur et de la croissance : phases de la vie en fonction de la reproduction. — Influence sur la croissance de la suppression traumatique du germen (eunuque).
CHAPITRE
IX. —
DES LOIS DE CROISSANCE
.
.
119
Les lois et la méthode. ■— Constitution des lois de croissance. — (Loi des alternances. — Lois pubertaires. — Lois des propor-
�300
TABLE DES MATIÈRES
tions. — Principe de l'accroissement inégal pubertaire.) — Résumé et formules des lois de croissance.
DEUXIÈME PARTIE APPLICATIONS ÉDUCATIVES ET PÉDAGOGIQUES CHAPITRE I. — L'ACCROISSEMENT INÉGAL CHEZ L'ÉCOLIER, LES TROUBLES ORGANIQUES QU'IL PROVOQUE ET DONT LE MAITRE ET L'ÉDUCATEUR ONT A TENIR COMPTE 143 En quoi consiste l'accroissement inégal. — Intérêt éducatif des troubles qu'il détermine. — Exemples de troubles pubertaires dus à l'accroissement inégal. — Conséquences pédagogiques de ces troubles. CHAPITRE II. — ACCROISSEMENTS A GRANDES ALTERNANCES, CE QU'EN PEUVENT DÉDUIRE L'ÉDUCATEUR ET LE PÉDAGOGUE 163 Rythme alternant de la croissance pour le rachis et pour le crâne. — Alternances dans le développement du germen.— Indépendance relative des évolutions de croissance à grandes alternances. — Rapports entre elles et avec la puberté. — Déductions pédagogiques et éducatives. CHAPITRE III. QUES
—
DIVERSES APPLICATIONS PÉDAGOGI-
169 Pubères et non pubères. — Leurs différences somatiques et psychiques. Déductions pédagogiques. — « Moment éducatif a de chaque organe. — Respect de la loi des alternances. — Croissance et intelligence. — Station en classe de l'écolier, nécessité de la varier. CHAPITRE IV. SCOLAIRE
—
INDIVIDUALISATION DU MOBILIER 183
C'est assis et non debout que l'écolier s'en sert. — Erreur résultant de la mesure de la taille debout de l'écolier prise pour guide dans l'attribution d'une table-banc. — Taille debout et taille assis. — Conditions anatomiques et conditions physiologi-
�TABLE DES MATIÈRES
301
ques qui doivent régler le choix du mobilier individuel. — Moyen simple de s'y conformer. — Manuel opératoire.
CHAPITRE V.
—
CONTRÔLE DE L'ÉDUCATION PHYSI. . 195
QUE PAR LA MÉTHODE AUXANOLOGIQUE .
Compte à tenir de la Croissance. — Contrôle des effets de l'exercice à la barre fixe sur le développement de la stature, du thorax, du bassin, des membres. — Gymnastes et non gymnastes. — Causes diverses d'abstention. — Conclusions relatives aux résultats de l'exercice visé et à la méthode de contrôle.
CHAPITRE VI.
—
ASYMÉTRIE ET ÉDUCATION .
.
219
Moitié du corps. — Variation de la longueur du sternum et rachitisme. — Les épaules de l'enfant. —■ Asymétrie du corps humain; celles qu'il faut connaître en raison de leur intérêt éducatif. — Part probable prise par le cerveau aux asymétries fonctionnelles. — Education bimanuelle (ambidextérité).
CHAPITRE VII. DE L'ÉCOLIER
—
INVESTIGATION
AUXANOLOGIQUE 233
Conditions anatomiques de la fonction. — Forme et squelette. — Leurs modifications par la croissance. — Points de repère anthropométriques.
CHAPITRE D'APRÈS SANCE » VIII. LA
—
MENSURATION
DE
L'ÉCOLIER DE CROIS243
« FICHE
INDIVIDUELLE
La salle d'observation. — Les instruments anthropométriques. ■— Soin de se contrôler soi-même. — Manuel opératoire. — Hauteurs, diamètres, circonférences, contours, poids.
CHAPITRE IX.
—
NOTATIONS
A
INSCRIRE
SUR
LA 259
FICHE INDIVIDUELLE DE CROISSANCE
....
Cadre physiologique et clinique des mensurations. — Les alternances des accroissements et la période semestrielle. — Notations à relever sur l'enfant découvert. — Notations à relever sur l'enfant couvert et parmi elles, couleur des yeux et des cheveux. — Tempérament..—• Rapport de la durée du repos à la durée de l'effort.
CHAPITRE X.
—
DÉTERMINATION DE L'« INDIVIDUA271
LITÉ SOMATIQUE » PAR LA « FORMULE INDIVIDUELLE » DE CROISSANCE
La formule individuelle de croissance et l'individualité somatique. — La formule individuelle vise la fonction. — Constitution de la formule individuelle. — Son interprétation.
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Pl. IV.
STATURE (taille). — Rythme de son allongement.
�LÉGENDES DES PLANCHES V, VI, VII, VIII Vertex, point culminant du crâne. Diamètre transverse maximum du crâne, à sa place approximative entre le vertex et le conduit auditif, c Conduit auditif. c' Diamètre bi-zygomatique, tracé dans le plan du conduit auditif, mais qui, en réalité, est, en moyenne, à 10 millim. au-dessus du centre du conduit auditif. d Menton, point médian sur le bord inférieur de la mandibule. e Diamètre du cou, partie moyenne. / Fourchette sternale. g Acromion, bord externe d'où se détache le membre supérieur. g' Diamètre bi-acromial. g" Diamètre bi-huméral, en épaulette, continuant au delà de l'acromion le diamètre bi-acromial. h Mamelon. h' Diamètre bi-mamelonnaire, distance des centres des 2 mamelons. i Extrémité inférieure du sternum (sommet sternal), interligne articulaire xiphi-sternal. i' Diamètre transverse du thorax au niveau de l'interligne xiphi-sternal. I: Ceinture, diamètre minimum. I Coude, interligne articulaire huméro-radial, la plus grande largeur bi-condylienne est à 20 millim. au-dessus. V Diamètre bi-eondylien-huméral. m Ombilic. m' Diamètre bisiliaque, écart maximum des crêtes iliaques (à peu près dans le plan de l'ombilic). n Epine iliaque. n' Diamètre bi-spinal iliaque, distance entre les centres des deux épines iliaques antéro-supérieures. p Grand trochanter, extrémité supérieure. p' Diamètre bi-trochantérien, est ici remonté de 2 centièmes en moyenne, la plus grande largeur mesurée étant à 25 millim. (13 ans et demi) et 35 millim. (23 ans et demi) au-dessus du bord supérieur du grand trochanter. q Pubis, bord supérieur du pubis (symphyse pubienne). r Ischion, relié au grand trochanter par une ligne oblique pointillée (tubérosité de l'ischion). s Poignet, pointe de l'apophyse styloïde du radius. s' Diamètre bi-condylien anti-brachial, la plus grande largeur bi-condylienne est à S millim. en moyenne au-dessus de l'extrémité de l'apophyse styloïde du radius. t Médius. u Genou, interligne articulaire. u' Diamètre bi-condylien fémoral, la plus grande largeur bicondylienne est à 23 millim. en moyenne au-dessus de l'interligne articulaire. v Malléole interne, extrémité inférieure. v' Diamètre bi-condylien malléolaire, la plus grande largeur bi-condylienne est à 8 millim. en moyenne au-dessus de la pointe malléolaire tibia]e. x 7me cervicale. x' Sommet du sacrum. a b
�Pl. V.
Les âges d'évolution rapportés à l'âge adulte. Croissance relative (totale et segmentaire).
Cliché (d'une planche de Godin) obligeamment prêté par la Société d'Anthropologie de Paris.
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Pl. VI.
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Pl. X.
Alternances semestrielles des accroissements
entre 13 ans Va et 17 ans Va-
A. Buste B. Taille
Membre inférieur Poids Grossissement musculaire
C. Cuisse, allongement
(circonférence maxima)
D. Jambe, allongement Grossissement osseux
(circonférence minima)
��Taille debout A et taille assis B des dix mêmes jeunes gens.
A. La ligne droite représente la ligne des vertex de 10 jeunes gens de 17 ans debout. B. La ligne brisée celle des vertex des
10 mêmes jeunes gens assis.
����0,36 0.34 0,32DIAMETRE BI-ACROMIAL
D. TRANSV. DU BASSIN 0,25
D TRANSV. DU THORAX 0,25 0,23 0,21 019
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0,21 0.1 s BRUS ■. CIRCONF. M AU MA
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AVANT-BRAS-. CIRC.MAX.
CUISSE-.CIRCONF. MAX.
A. 50 gymnastes. C. Malingres gymnastes.
MOLLET-. CIRC. MAX.
Pl. XIII B. 50 non gymnastes. D. Malingres non gymnastes. (diamètres et circonférences).
Contrôle des effets de la gymnastique
Cliché (d'une planche de Godin) obligeamment prêté par la Société d'Anthropologie de Paris.
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1|Avant-propos|9
1|Introduction|11
1|Première partie - Analyse de la croissance|15
2|Chapitre I - Motifs pour lesquels la croissance à sa place parmi les matières enseignées dans une école des sciences de l'éducation|15
2|Chapitre II - Méthode d'étude de la croissance ou méthode auxanologique|27
2|Chapitre III - Proportions métriques du corps de l'enfant de la naissance à l'âge adulte|39
2|Chapitre IV - Influences qui agissent sur la croissance|57
2|Chapitre V - La puberté (influence de l'élément reproducteur sur la croissance)|73
2|Chapitre VI - La puberté (suite 1)|87
2|Chapitre VII - La puberté (suite 2)|99
2|Chapitre VIII - La puberté (suite 3)|111
2|Chapitre IX - Des lois de croissance|123
1|Deuxième partie - Applications éducatives et pédagogiques|147
2|Chapitre I - L'accroisselent inégal, chez l'écolier. Les troubles organiques qu'il provoque et dont le maître et l'éducateur ont a tenir compte|147
2|Chapitre II - Accroissemenet à grandes alternances. Ce qu'en peuvent déduire l'éducateur et le pédagogue|167
2|Chapitre III - Diverses applications pédagogiques|173
2|Chapitre IV - Individualisation du mobilier scolaire|187
2|Chapitre V - Contrôle de l'éducation physique par la méthode auxanologique|199
2|Chapitre VI - Asymétrie et éducation|223
2|Chapitre VII - Investigation auxanologique de l'écolier|237
2|"Chapitre VIII - Mensuration de l'écolier d'après la ""fiche individuelle de croissance"""|247
2|Chapitre IX - Notations à inscrire sur la fiche individuelle de croissance|263
2|"Chapitre X - Détermination de l'""individualité somatique"" par la ""formule individuelle"" de croissance"|275
1|Bibliographie|285
1|Index des noms cités|291
1|Explication de quelques termes techniques|294
1|Table des planches|301
1|Table des matières|302